Sans Papiers Ni Frontières

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Contre les frontières et leurs prisons

Marseille : suite des événements au centre de rétention du Canet – 7 au 13 août 2012

Marseille : suite des événements au centre de rétention du Canet

7 au 13 août 2012

Mardi 7 août
18h, rassemblement devant le centre de rétention.
Cette nuit là, fouille générale, les flics ont empêché toute la nuit  les retenus de dormir. Depuis se jour il est interdit aux visiteurs de ramener de la nourriture pour les retenus.

Mercredi 8 août
Un retenu, qui a fait 1 mois de taule  aux baumettes suite à deux refus d’embarquement,  est de retour au centre.
Le soir des personnes se rendent au centre et tirent un feu d’artifice en solidarité avec les retenus.

Vendredi 10 août
Les briquets sont interdits dans le centre. Pour allumer leurs cigarettes, les retenus doivent sonner à l’interphone afin que les flics viennent l’allumer. Les flics se rendent compte qu’un retenu cache un briquet, ils lui confisquent et le tabassent. Le retenu n’en reste pas là, il sonne à l’interphone sans discontinuer pendant une demi heure, jusqu’à se  qu’un flic vienne, le maîtrise au sol, l’écrase et lui dit qu’il ne lui donnera pas de feu.

Samedi 11 août
Un tunisien qui avait déjà refusé l’embarquement est expulsé. Pour ce faire, les flics le baillonent et l’attachent avec du scotch.
La retenue qui était entre la vie et la mort vient de recevoir une greffe du foie, elle est toujours à l’hôpital.

 Lundi 13 août
Le retenu qui a avalé une pile 10 jours auparavant n’a toujours pas reçu de soin. Il est pourtant malade et alité.
Un autre retenu est malade, il doit suivre un traitement 2 fois par jour, mais le matin comme le soir il doit batailler pour qu’on lui donne ses médicaments. Pour protester, il boit des produits ménagers (eau de javel et détergeant). Les flics le tabassent , lui donnent des vomitifs et l’enferment en cellule d’isolement pendant 8h.

 

Italie : Encore des protestations au CIE de Turin – 5 août 2012

Encore des protestations au CIE de Turin – 5 août 2012

(ce jour là, une vidéo est sortie de l’intérieur du centre de rétention : http://www.youtube.com/watch?v=r2gE1e744XU&feature=player_embedded)

À moins de deux semaines des dernières protestations, une autre nuit de bordel a agité le centre de rétention du corso Brunelleschi à Turin.  Suite au tabassage d’un des retenus à l’intérieur de l’infirmerie du centre, les retenus des sections jaune, violette et rouge ont commencé a brûler des matelas. La police intervient en lançant une grosse quantité de gaz lacrymogènes, mais sans entrer dans les sections. Les pompiers interviennent à leur tour, en utilisant les canons à eaux contre les retenus. Le bordel a duré d’environ une heure du matin à cinq heures. Au final, il n’y a ni blessés ni arrêtés parmi les retenus. En revanche, trois d’entre eux montent sur les toits de la section jaune, et déclarent ne pas descendre avant d’avoir parlé avec quelqu’un du bureau de l’immigration.

À 18h aujourd’hui, quelques dizaines de de solidaires se sont rassemblées devant l’ancienne entrée du centre entre le corso Brunelleschi et la via Monginevro et ont commencé à marteler le portail, bloquant aussi la circulation. Après quelques minutes, le groupe parcourt brièvement la via Monginevro en manifestation puis se disperse. Une heure plus tard, d’un autre côté de la ville, le siège de la Croix Rouge, via Bologna, est recouvert de tags et de taches de peinture. Une des caméras de surveillance est détachée du mur.

À huit heures du soir, la police entre dans les sections su centre pour effectuer des fouilles. En outre, deux retenus de la section jaune sont mis à l’isolement et trois autres sont changés de section. On apprend par la suite que les trois personnes qui étaient montées sur le toit en sont descendues à cause des fortes précipitations.

http://www.autistici.org/macerie/?p=29210

[Italie] Torino, journée tendue au CIE – 24 juillet 2012

Journée tendue au CIE de corso Brunelleschi a Torino.

Vers 14 heures, mardi 24 juillet, un retenu de la section jaune monte sur le toit et brule quelques vetements et matelas.
Tout cela non pour lui, mais en solidarité avec un jeune de 16 ans retenu au centre malgré sa minorité. Quand toute la section commence a protester, la police intervient avec les canons à eau, et les retenus repondent en lancant des pierres sur les agents.

Vers 18 heures, un groupe de solidaire se rejoint dehors, devant le CIE, et commence a scander des slogan, taper sur les poteaux et lancer des petards. Dans le meme temps, les retenus de la section jaune etaient déjà sur le toit. Mais maintenant ca se propage aux retenus de la section bleue : eux aussi ont un mineur dans la section, et eux aussi commencent a protester. A côté de cela les retenus racontent aux solidaires dehors que cela fait vingt jours que quatre d’entre eux sont en grève de la faim : Ils protestent contre le bureau d’immigration qui les tiennent enfermés – sans les expulser – alors qu’ils ont le passeport ou le permis de séjour périmé.

A 19 heures, alors que le rassemblement s’est desormais dissous, la protestation s’etend à la section violette. Là bas la police entre en force avec boucliers et matraques, et reussi à ramener le calme. Il semble qu’aucun retenu n’a été bléssé serieusement durant la charge.

 

source : http://www.autistici.org/macerie/?p=29207

Lille : révolte et évasions au centre de rétention de Lesquin – 8 juin

Lille : révolte et évasions au centre de rétention de Lesquin – 8 juin

Vendredi 8 juin 2012 une révolte a éclaté au centre de rétention de Lesquin près de Lille, suite à une embrouille avec des flics. Plusieurs personnes ont défoncé une vitre blindée à l’aide de l’armature métallique d’un lit. Il semblerait que les caméras de vidéo-surveillance ont cessé de fonctionner pendant la révolte. Deux personnes se seraient également évadées.

Lundi quatre autres étaient présentées devant le juge pour passer en comparution immédiate. Le procureur a demandé des peines de prison de 6 mois ferme, soutenu par le directeur du centre de rétention qui s’était constitué partie civile. Le juge les as condamnés à 6 mois de prison avec sursis.

 

Corelli brûle encore (un rendez-vous à Milan)

Corelli brûle encore (un rendez-vous à Milan)

Le 24 mai, au tribunal de Milan, se déroulera la première audience d’un procès contre neuf hommes accusés à divers titre d’avoir participé le 15 janvier dernier à une émeute qui a éclaté dans le centre de rétention (CIE) situé via Corelli.

Jusque là, on pourrait penser à un procès comme on en a déjà vu ces dernières années contre ceux qui luttent dans les centres pour recouvrer leur liberté. Mais cette fois, il vaut la peine de s’attarder un peu plus, et d’observer ce qui est en train de se passer, et les problèmes que cela pose.

Tout d’abord, il est utile de rappeler les faits.

Le 15 janvier 2012, suite au tabassage d’un jeune et suite à l’énième perquisition des chambres à la recherche des téléphones portables (qui sont interdits à Corelli depuis octobre 2010, mais qui sont vendus en cachette par des membres de la Croix Rouge pour la modique somme de 200 euros, avec l’accord tacite de la police), la tension éclate.

Une révolte explose, la section E est entièrement détruite (et reste hors service jusqu’à aujourd’hui), et les 26 retenus de cette section sont tous incarcérés.

Pendant que les autres enfermés du centre lancent une grève de la faim les deux jours suivants en solidarité avec leurs camarades arrêtés, ces derniers sont emmenés au commissariat. Interrogés deux par deux, ils sont soumis à de fortes pressions psychologiques et poussés à s’accuser les uns les autres afin de susciter rancoeur et méfiance.

Et voilà le noeud d’un des premiers problèmes que cette histoire a posé et pose jusqu’à aujourd’hui. Certains d’entre eux n’ont pas cédé aux intimidations policières, d’autres en partie si. Ainsi, sur les 26 arrêtés, l’incarcération préventive a été confirmée pour neuf d’entre eux, deux ont réussi à s’évader du comico, cinq ont été déportés, et les autres transférés dans différents centres de rétention.

Cette situation nous a donné du fil à retordre depuis le début, en particulier sur le fait de donner ou pas de la solidarité. Vu les circonstances dans lesquelles le terrorisme psychologique, sciemment orchestré par les bourreaux en uniforme, a enrayé la solidarité entre prisonniers, il n’est pas facile d’avoir une approche politique qui ne tienne pas compte de cet aspect déplaisant. Mais il ne faut pas non plus oublier le fait qu’ils se sont rebellés en détruisant toute une section du centre.

Il s’agit d’un procès où il y a dans les PV des déclarations explicites qui mettent certains des accusés en position difficile, mais cela ne signifie pas que ce procès ne puisse pas être une occasion de continuer la lutte contre les centres, pour faire sortir du silence les conditions de vie à l’intérieur et les explosions de rage que ces structures génèrent, tout en conservant la perspective de les abattre entièrement.

De plus, les inculpés qui passeront en procès seront accusés de rien moins que de « dévastation et pillage ». Un chef d’inculpation qui est revenu ces derniers temps sur les bancs des tribunaux lors de différents épisodes d’affrontements de rue et qui, avec des peines qui vont de huit à quinze ans de prison, vise à intimider ceux qui luttent pour leur intimer de ne pas trop relever la tête.

Maintenant, on voit ce chef d’inculpation être aussi utilisé par rapport aux révoltes dans les centres.

La tension à Corelli et dans les centres de rétention de toute l’Italie reste très élevée, et oscille entre des gestes d’automutilation, des tentatives d’évasion, des actes de révolte individuelle et des émeutes collectives. Depuis l’augmentation de la durée de rétention (d’abord jusqu’à 6 mois, puis jusqu’à 18 mois), il y a eu une augmentation exponentielle de révoltes et d’évasions, aussi bien en termes quantitatifs que d’intensité. Celle-ci est accompagnée par une administration massive d’anti-dépresseurs pour affaiblir les individus enfermés, mais même cette tactique n’est pas couronnée de succès. A présent se déroule dans les salles d’audience une nouvelle étape de la stratégie répressive : l’utilisation de chefs d’accusation qui prévoient de longues peines de prison. Si ceux qui étaient jugés pour des faits de révolte étaient habituellement inculpés pour dégradation, rébellion, violence, etc. et condamnés à quelques mois de prison, les 9 incarcérés en préventive risquent désormais une peine très élevée. Il s’agit d’une claire tentative de répression afin que quiconque qui a l’intention d’accomplir de tels actes d’insubordination y renonce de soi-même.

Nous pensons qu’il est important de prendre acte des nouvelles stratégies répressives qu’ils utilisent pour frapper ceux qui se rebellent dans les centres de rétention, afin de développer une réflexion sur les luttes qui se déroulent aussi dehors, et de donner plus d’acuité à nos actions.

Jeudi 24 mai, nous serons présents au tribunal pour donner notre soutien à ceux qui se sont révoltés dans le centre de rétention. Le procès débutera à 9h30, salle 1bis, troisième étage.

Assemblée « entre vent et tempête »

Publié le 19 mai 2012 sur macerie, et traduit de l’italien pour « Sans papiers ni Frontières »  .

Italie : CIE de Gradisca fidèle à sa réputation : à peine réouvert tentatives d’évasion et résistances

Italie : CIE de Gradisca fidèle à sa réputation : à peine réouvert tentatives d’évasion et résistances 17 mai 2012

Cette semaine le centre de rétention de Gradisca qui avait été partiellement fermé pendant plusieurs mois suite au révoltes qui mur par mur, cellules par cellules l’avaient rendu inopérationnel, a de nouveau réouvert en grand (mais pas complètement : sur la capacité d’enfermement initiale de 248 personnes, ce sont 168 places qui ont été de nouveau mises en état de nuire).
En tout cas à peine réouvert, les affrontements et tentatives d’évasion ont commencé : jeudi un retenu est monté sur le toit pour tenter de se faire la belle, tentative d’évasion au cours de laquelle un flic a été blessé.
Dans la cour du centre, plusieurs prisonniers ont initié un sit-in et ont refusé de réintégrer les cellules.
A l’intérieur des couloirs les câbles des alarmes incendies ont été arrachés.
les flics se plaignent beaucoup et les syndicats policiers montent au créneau pour dénoncer leurs conditions de travail, l’argent que coûte le transfert de détenus Tunisiens initialement prisonniers dans des CIE en Sicile vers Gradisca….

http://ilpiccolo.gelocal.it/cronaca/2012/05/20/news/il-cie-di-gradisca-ritorna-zona-a-rischio-1.4812355
http://messaggeroveneto.gelocal.it/cronaca/2012/05/20/news/sommossa-al-cie-due-agenti-in-ospedale-1.4816081

Italie : révoltes dans les CIE de Modena, Torino et Bologna, charter frontex au départ de perugia

 Bologna :

Une révolte a éclaté ce matin (lundi 14/05). 7 keufs ont été blessés et 5 retenus, des Marocains et des Tunisiens, ont été arrêtés et inculpés de violences et rébellions envers les forces de l’ordre et destruction en réunion. Ils doivent comparaitre demain. L’après-midi même de la révolte un petit rassemblement s’est tenu devant la préfecture de Bologne où les inculpés ont été emmenés et sont en garde à vue.

Source : http://bologna.repubblica.it/dettaglio-news/17:50-17:50/4163495
Tract traduit ici, original sur macerie 

Modena :

Apparemment les mouvements de protestation initiés vendredi soir par les prisonniers ont continué. (voir ici)

Torino :

Depuis 1 semaine des petits incendies sont régulièrement allumés par les prisonniers dans certains secteurs du CIE. La nuit dernière l’incendie a été plus important : une soixantaiene de prisonniers ont brûlé matelas et autres.Les protestations étaient dirigées contre le juge de pais qui mois après mois maintient les gens en taule. Une fois de plus les militaires de la croix rouge ont éteint les incendies (comme ils ont éteints tous les petits qui avaient été allumés dans la semaine)

Perugia :

Charter frontex pour le Nigeria la semaine dernière un charter frontex pour le Nigeria a décollé de Perugia (une première parait-il)avec 24 nigérians à bord. Il a fait escale à malte, pays à l’initiative duquel le vol a eu lieu, pour embarquer 9 autres Nigerians avant de redécoller pour lagos.

Source : http://www.perugiatoday.it/cronaca/rimpatrio-24-nigeriani-aeroporto-perugia.html

Italie : Modena révolte et tentative d’evasion

Révolte à Modena – 11 mai 2012

Résumé d’articles de journaux

Une révolte qui a duré plusieurs heures a éclaté vendredi soir au centre d’identification et d’expulsion de Modena. Il y a eu plusieurs départs d’incendie, pas mal de mobilier détruit, les lits ayant notamment été démontés pour que les barres de fer les composant soient utilisées comme projectiles contre les flics. Les 60 prisonniers du centre hurlaient liberté. Selon le journal c’est une perquisition dans les cellules au cours de laquelle il y a eu un problème avec un Coran qui a mis le feu au poudre. Les canons à eau ont été utilisés et plusieurs corps de police extérieurs sont intervenus pour mater les révoltés qui le lendemain matin ont annoncé qu’ils se mettaient en grève de la faim. http://www.modenaonline.info/it/2012/05/13/clandestini-in-rivolta-al-cie-fuoco-e-spranghe-contro-la-polizia-12729 http://gazzettadimodena.gelocal.it/cronaca/2012/05/13/news/cie-toccano-il-corano-scoppia-la-rivolta-1.4502575

Traduction de : http://www.ilrestodelcarlino.it/modena/cronaca/2012/05/13/711887-cie-rivolta.shtml

Attention, cet article est issu de la presse. C’est donc la version policière.

« Révolte au centre de retention, pompiers et militaires attaqués avec des barres de fer. Quatre heures de tension au centre. Couvertures en feu.

Ils ont commencé en lancant des barres de fer retirés des lits contre les militaires en service, puis sont passés à l’incendie, incendiant des couvertures et donnant naissance à une douzaine de foyers dans des blocs différents, de sorte que la fumée a pu être vue à l’extérieur de la structure. Nous sommes au Cie (centre d’identification et d’expulsions) de la Via La Marmora.

À 21.30, avant hier : une énième révolte a été organisé par des immigrés clandestins détenus dans l’établissement et qui demandent la liberté.

Hier à 20h,les policiers sont retourné au centre pour une deuxième émeute. Comme d’habitude, le vendredi soir est une excuse suffisante pour réchauffer les cœurs : une perquisition indésirable d’une section, la nourriture fade, pour finir le Coran. Pour les immigrants, la plupart du temps des Nord-Africains, n’importe quelle excuse pour donner lieu à des manifestations violentes et organisées. Pour calmer les 60 immigrés clandestins les flics en patrouille autour, les carrabiniers et la police financière ont dû intervenir. Pas seulement eux, cette fois-ci les pompiers aussi ont du intervenir, ils ont éteint le foyer qui était alimenté avec du papier et des couvertures (qui vont maintenant être rachetées au détriment des contribuables, ndlr (sic!!, ndt)) avant que le feu se propage au reste du mobilier.

La révolte aurait son origine dans la section 6, la plus difficile, ou depuis longtemps sont enfermsé un groupe de clandestin particulièrement dangereux et fauteur de trouble. De cette section, la protestation s’est étendu à l’ensemble Cie et la police ont travaillé dur pour permettre à la situation de se calmer. Les immigrants ont crié, en brandissant des barres de fer, ont mis le feu à des choses, ils ont cassé les grilles et la lampe qui éclaire le centre, ont défoncé les portes et ont tenté de s’échapper. C’est seulement à une heure du matin que la situation est redevenue calme :

hier au Cie, ont comptait les dommages et le centre a été réarrangé. Les recents travaux de sécurité ont évité que, pendant la révolte quelqu’un ai réussi à s’échapper. En attendant, demain le prefet Giovanni Pinto doit visiter le centre, une inspection pour voir si d’autres améliorations sont nécessaires en termes de sécurité. L’autre soir, en concomitance avec l’emeute à Modène, une emeute avait lieu au CIE de Bologne.

Sur la dépense d’énergie pour ‘surveiller’ le Cie et d’accompagner les immigrants illégaux à la frontière, la police de l’Union SIULP souligne que « la présence du centre met Modena dans une condition très différente de celui des quatre-vingt dix autres pefectiures, compte tenu de la nature et de la quantité de travail à effectuer pour ce service – disent-ils – la coupe des heures supplémentaires, tel qu’elle est pratiqué, peut sembler dérisoire et presque anachronique dans une période de crise, mais si nous pensons c’est la troisieme fois que les policiers de Modene, par le biais du SIULP, ont dû recourir à la TAR pour le paiement des heures supplémentaires travaillées dans les services, il est clair qu’une réduction comme celle prévue par le gouvernement ne peut que signifier, au moins, davantage d’aliénation de notre profession, moins de sacrifice de soi, plus de colère envers les choix techniques et politiques très difficiles à digérer. «  »

via macerie

Belgique : dans les centres fermés

Merksplas
Émeute ce 10 mai . D’après certains témoignages c’était très violent.
Des appels nous étaient parvenus dans la matinée pour nous prévenir et pour demander de l’aide.
http://detention.theowlseyes.info/category/Merksplas
Ce 11 mai on apprend que une quarantaine de policiers sont entrés dans le centre, ont matraqué tous les participants à l’émeute et que 5 personnes sont ce jour au cachot, que tout est calme et que la sécurité est renforcée.

 

127bis :
Beaucoup de stress dans le centre, avec des débats multiples, tentative de suicide, conflits entre détenus et mise en isolement des récalcitrants.

Deux personnes en grève de la faim depuis une semaine : un Magrhébin et un Palestinien.
Le Marocain a arrêté sa grève de la faim. Le Palestinien a été amené pendant la promenade et a disparu.

Un afghan expulsé la semaine dernière se retrouverait en prison à Kaboul (info à confirmer).

Un Ivoirien subit ce 10 mai sa 4ème tentative d’expulsion forcée vers Israël !

Ce 11 mai un Tunisien arrivé il y a quelques jours s’est coupé les veines, a été amené à l’hôpital, puis s’est évadé.

Caricole : déménagement terminé ce 08/05 : les occupants du 127 ont désormais de nouveaux locaux « sous clés ».

 

Témoignages depuis la prison pour étrangers de Vincennes, janvier-avril 2012

Témoignages du 18/01/12 depuis la prison pour étrangers de Vincennes

Vincennes – Centre 1 

1ère personne

« Moi j’ai été ramené ici directement après ma peine de prison à Fresnes. C’est dégueu, la police elle parle mal, on peut rien faire, faut pas parler. Les briquets c’est interdit, on n’a pas le droit de fumer dans les chambres. La bouffe est pas bien. Les médecins ils nous parlent comme à des chiens. Tu vas les voir, et ils te donnent pas les bons trucs, tu leur dis qu’il te faut ça, et ils te donnent autrechose, pour le manque d’alcool ou je sais pas quoi…  »

2e personne

« Y’a eu des bagarres à propos de la nourriture, un détenu s’est accroché avec un poulet. Il a fait une garde-à-vue de 48h. a été déferré, il est sorti. Ils ont toujours la même bouffe, la nourriture elle est pas adaptée aux musulmans et aux végétariens, sinon c’est que des haricots et des patates. Personne ne peut prendre de douche parce que l’eau elle est trop froide, y’a pas d’eau chaude.

Y’a pas mal d’expulsions en ce moment. Y’a eu un cas marquant, un mec de 42 ans, il était en France depuis 22 ans. ils l’ont expulsé en Egypte. On s’est organisé collectivement contre son expulsion en s’enfermant avec lui dans la chambre. On a réussi a empêcher une expulsion mais après ils sont venus tôt le matin, personne n’a rien vu, ils l’ont « scotché » et l’ont expulsé.

Je sais qu’il y a trois centres mais on peut pas communiquer avec les autres. Les cours doivent pas donner du même côté. Y’a pas de vis-à-vis, y’a des grilles, y’a pas de filet. Par contre y’a des détecteurs de mouvement et des caméras partout. Mais ils peuvent pas fermer les chambres même pendant la manifestation qu’on a entendu samedi.

Sur 30 détenus y’en a 25 qui sont cachetonnés. En fait même si on essaient de discuter avec les nouveaux arrivants pour qu’ils refusent de prendre certains médicaments, les médecins incitent la plupart des gens à en prendre. Ils leur donnent du valium, du semesta et des substituts de drogues. Certains veulent arrêter les médicaments, les médecins les laissent tranquilles un jour, puis leur redonne un rendez-vous le lendemain pour leur refaire prendre des médicaments. Y’a rien à faire à part dialoguer entre nous.

Moi ça fait 18 jours que je suis là, j’ai été transféré de la prison au cra. Je sais pas ce qui va se passer… »

Vincennes – Centre 3

1ère personne

« C’est l’enfer ici, il fait froid, la nourriture est dégueulasse, immangeable, elle a une odeur bizarre, on dirait qu’elle est périmée. J’ai été arrêté hier, ils m’ont pris mon téléphone parce il a un appareil photos. Je comprend pas, j’ai deux enfants, ils m’ont attrapé à la préfecture. Je suis malade, j’ai vu le médecin, il m’a dit d’attendre, j’attends depuis ce matin. »

2e personne

« Ici y’a que des bagarres, les flics ils nous cherchent la merde  ! On a entendu une manifestation pour les retenus samedi dernier. On a entendu et on a beaucoup crié pour eux, on a tapé, on a crié, on a fait du bordel, mais depuis ça c’est calmé. La police elle nous a dit : ’’ Restez tranquille et vous allez sortir. ’’ Mais ici ils continuent à expulser et moi je sais que j’ai beaucoup d’amis qui sont au bled. Est-ce qu’il y a une manifestation ce soir ou demain ? Sinon ici y’a des playstation s, y’a des télés »

Témoignages du 29/01/12 depuis la prison pour étrangers de Vincennes

Vincennes – Centre 3

« On mange pas bien, y’a pas de quoi manger. Des fois si tu te lèves trop tard ils te donnent même pas à manger. On dort pas, c’est le stress ici. Y’a des gens qui se coupent avec des lames, c’est la galère.

Moi je suis là depuis vingt jours, y’en a trop qui sont expulsés, deux ou trois chaque jour, les policiers sont pas violents mais l’autre fois ils ont coupé l’eau chaude et le chauffage, on est resté dans le froid pendant douze heures. Le médecin tu le vois qu’une seule fois, et après tu vois que des infirmières, c’est dur de revoir un médecin. Moi par exemple j’ai une grippe, je tousse très fort. J’ai demandé des médicaments, ils m’en ont pas donné, ils disent qu’y’en a pas, qu’il faut se les faire amener de dehors. Par contre si tu veux des drogues et des somnifères, là y’a pas de problème ils te les donnent très facilement, tout comme les calmants. En fait y’a pas de doliprane, aspirine, fervex, tout ça pour soigner un rhume, mais y’a des trucs pour te calmer, pour que tu t’énerves pas, quand tu prends ça t’es sur une autre planète.

Ici y’a des caméras partout, tout le monde reste tranquille, on s’est révolté, on a fait une grève de la faim pendant 3 jours, enfin pas tout le monde, mais ça a rien changé.

Avant y’avait de la place, mais ils ont ramené des détenus et y’avait plus assez de place, du coup y’en a qui sont trois par chambre et le dernier dort parterre parce qu’il y a que deux lits par chambre.

Moi j’ai été arrêté suite à un contrôle dans la gare de Lyon. J’suis en France depuis un an et demi, ma femme a été hospitalisée ici puis elle est morte, donc je suis resté là. Y’a des détenus qui sont en France depuis douze ans, dix ans, huit ans.

Hier soir y’a un mec qui avait déjà refusé le premier vol, ils sont venus le rechercher pour l’expulser avec un deuxième vol, il s’est ouvert l’estomac avec une lame. Les policiers quand ils sont arrivés ils ont eu peur à cause du sang, donc ils ont appelé les infirmières qui ont appelé les pompiers. Ils l’ont emmené à l’hôpital pour le recoudre et ils l’ont déjà ramené ici. A mon avis il va avoir un vol ce soir, si c’est le cas, il va s’égorger lui-même.

En fait, ici ça dépend des situations, par rapport aux ambassades, aux avocats. Ceux qui ont de l’argent, un avocat, ils sortent, sinon tu sors pas. Moi, ils m’ont prolongé de vingt jours, alors que ça fait déjà vingt jours que je suis là. Normalement ils peuvent te garder que quarante-cinq jours. Ici personne ne peut savoir si il sera expulsé ou pas, tu sais rien, t’attend le papier qui est affiché le soir pour les vols, le juge, les rendez-vous avec l’ambassadeur.

Ca se vide jamais, ils expulsent et arrêtent tout le temps. Si quelqu’un part, quelqu’un rentre. Par exemple s’ils en expulsent deux, il y aura deux nouveaux détenus. On est tous dans la même galère. La première journée c’est dur, si y’a un nouveau on lui explique ses droits, comment ça se passe, où il est, on s’intègre doucement… »

Vincennes – Centre 1

« Je suis là depuis jeudi soir. Jusque là y’a pas de problème avec les policiers. 
 On ne mange pas vraiment, si y’a dix détenus, y’en a deux qui vont finir leur plat, le reste est jeté. On jette une grande partie de la nourriture. Jusqu’à présent ça se passe bien avec les médecins. Ici on est une vingtaine en ce moment, y’a pas de soucis avec les autres détenus.

Aujourd’hui j’ai vu affiché le règlement intérieur du centre, y’avait écrit « le détenu peut entrer de l’extérieur avec un maximum de 80 euros ». Mais les policiers m’ont dit « seulement 40 euros », ils ont mis le reste à la consigne pour que je le récupère à la sortie.

Chacun a son lit, y’a des chambres de deux ou quatre lits. A mon arrivée, j’ai eu une couette trop petite, j’ai gueulé, on me l’a changée, par contre faut attendre 7 jours pour que la serviette soit changée. La laverie est ouverte tous les jours, sauf le week-end.

Moi je suis dans une situation surprenante. Je suis passé devant le juge hier, avec un avocat commis d’office, l’avocat a dit que c’était pas un souci. Mais tous les gens qui étaient jugés ont été relâchés, sauf moi.

Je suis arrivé en 2005 avec un visa, je suis pacsé depuis 2008 avec une Française, et en couple déclaré depuis 2007. Je n’ai eu que des récépissés qui ne m’autorisaient pas à travailler, j’ai eu 4 récépissés, au 5ème j’ai fait un scandale à la préfecture. La meuf m’a dit de m’asseoir, je ne voulais pas. Finalement on m’a donné un récépissé qui m’autorisait à travailler. J’ai des qualifications, je suis électricien. J’ai eu deux CDI depuis. Avant je travaillais au black. Mon titre de séjour a expiré, j’ai encore eu un récépissé pendant un an avec autorisation de travail, puis après un an j’ai appelé pour prendre un rendez-vous, le mec m’a dit « on ne peut plus vous renouveler car on vous a envoyé une notification de quitter le territoire. » Mais j’ai pas reçu le courrier, il m’a dit d’envoyer une lettre à la préfecture. J’ai écrit deux fois là-bas et j’ai jamais eu de réponse.

Mon arrestation, c’était en pleine circulation. J’étais au volant dans le véhicule d’un ami avec son permis, au boulevard de Clichy. Derrière moi je vois un fourgon de police qui allume son gyrophare, alors je me rabats, ils me disent qu’ils me contrôlent parce que je roule sans phare. Je réponds « impossible, mon tableau de bord est allumé » Je vérifie que les phares fonctionnent et ils fonctionnent. Ils demandent les papiers de la voiture et le permis, ils appellent le central et me disent que le permis n’est pas répertorié sur le territoire. C’est parce que mon ami a un visa touriste. Du coup ils veulent m’emmener au poste pour vérifier, je leur dis qu’en fait ce n’est pas mon permis, je donne mon identité, ils vérifient et voient que j’ai une obligation de quitter le territoire. Je leur dis que je ne l’ai jamais reçue et que j’ai pas pu faire les démarches pour un recours. On m’emmène en garde à vue, puis au centre de rétention où on me dit qu’on fera le recours.

J’ai fourni tous les justificatifs de 2006 à 2012 : EDF, loyers, contrats de travail. Je suis passé devant le juge hier. Tout le monde a été libéré sauf moi car ils m’ont dit que j’avais fourni des justificatifs avec différentes adresses. Pourtant il y avait à chaque fois nos deux noms sur les papiers. Ils se sont même pas dit qu’on avait pu changer d’adresse. Ma femme elle peut pas venir me voir, elle est invalide à 80% et elle est trop loin, dans un autre département.

Ici y’a pas de révolte, beaucoup ont des documents italiens, des permesso, on leur dit qu’ils vont être expulsés vers l’Italie, mais on ne sait pas… »

 

Témoignages du 4/02/12 depuis la prison pour étrangers de Vincennes

Vincennes – Centre 2

« Moi je suis dans le centre de rétention, depuis le 14 Janvier je suis là, j’suis inexpulsable et ils veulent rien faire le consul m’a pas donné de laisser-passer, j’suis en France depuis 74. J’me suis fait arrêter suite à un contrôle en moto, j’avais le permis et j’ai ma carte jusqu’à 2013, c’est le préfet qui veut m’expulser.

C’est la merde, c’est dégueulasse, tout est dégueulasse , les toilettes, il fait froid, y’a des outrages, y’a des détenus qui s’font taper. Ici ils tapent les gens et après ils nous disent de porter plainte à la Cimade, et ça sert à rien, après les RG ils viennent ici mais ils font rien. Nous quand on tape un policier tout de suite on est mis en garde-à-vue et ils nous font la misère. Tout le monde porte plainte. Les RG ils viennent, ils prennent la plainte et ils repartent. Ils s’en battent les couilles. Y’a des mecs qui se coupent à mort, c’est un truc de fou, j’ai jamais vu ça, tu vois l’Haïde ? C’est comme ça ici. C’est un truc de fou, j’ai jamais vu ça de ma vie. Ils te font de la filouterie, ça veut dire que quand ils veulent ramener quelqu’un au bled, ils font genre ils vous rassemblent parce que y’a quelqu’un qui se sauve, qui s’est évadé, et après ils viennent attraper le mec, il l’attrapent ils le tapent ils le scotchent. Et après c’est pour ça que y’a des mecs y veulent se couper pour pas partir au bled, tu comprends ? C’est comme ça.

La bouffe c’est dégueulasse, tout est dégueulasse. Toujours la même chose, et pas hallal. Ils nous ramènent que des trucs où y’a de la gélatine, où y’a de la viande pas hallal. Les douches c’est dégueulasse, les toilettes c’est dégueulasse, les chambres laisse tomber. Ils te ferment la télé à 1h, on dirait que t’es en prison. On est privés de liberté et on est privés du visuel. Est-ce que c’est normal ? Non. Moi je vais pas voir le médecin, moi j’ai pas besoin de cachets, moi j’ai besoin de liberté, j’ai besoin de voir ma fille dehors. Moi ils veulent me priver de liberté, j’suis là, ils veulent me laisser 45j parce qu’y peuvent pas m’expulser, le consul y veut pas donner de laisser-passer.

On est 48 dans le CRA 2 là, on a des contacts avec les autres CRA, on a voulu faire la grève de la faim, mais c’est pas des mecs qui tiennent le coup, ça sert à rien une grève de la faim, ça aboutit à rien. Y’en a qui sont à 3 dans des chambres à deux personnes, y dorment parterre, c’est pas normal. Les flics ils parlent mal, ils insultent les gens, ils les insultent de « sales arabes »… »

Vincennes – Centre 1

« Ca se passe bien, le mauvais truc c’est chez le juge, ils renvoient les gens dans un pays comme ça. Ce sont des gens qui sont arrivés depuis même pas une semaine, huit jours au CRA et on les renvoie direct, les Roumains, les Algériens…Moi je suis Roumain. Avant j’étais incarcéré à la maison d’arrêt de la Santé, j’ai fais 18 mois là-bas, de là-bas ils m’ont ramené ici, et c’est mon huitième jour, demain ils me renvoient en Roumanie. Dans ma chambre on est quatre, tout le monde a un lit, ça se passe bien entre détenus. Par rapport à l’hygiène ou aux policiers aussi. J’ai vu le médecin, il m’a donné des médicaments, je suis pas malade, mais il m’a donné des trucs pour être tranquille. Je m’excuse mais j’suis appelé à la la visite là. »

Vincennes – Centre 3

« On est traité ici comme des animaux d’élevage. On est réveillé le matin, on mange, mais pas tout le monde parce que y’a des musulmans ici qui mangent pas le cochon. Donc une grande partie du repas est jetée, parce que c’est de la viande et que certains ne la mangent pas. On tourne en rond ici parce que c’est comme une prison. On est enfermé toute la journée, et les seules sorties sont pour aller voir le juge. On est transporté comme des malfaiteurs, tu vois, menottes aux poings dans le panier à salade, on est enfermé dans des cages là qui sont à l’intérieur du camion. On est vraiment traités comme des malfaiteurs, ce qui n’est pas le cas.

Actuellement y’a un grand nombre de suicides, tous les jours y’a une tentative de suicide, y’a 5 minutes y’en a un qu’a essayé de se pendre sur une grille. Lorsqu’il y a une tentative de suicide comme ça, la police, les agents de la police ils viennent en masse, ils sont arrivés à le décrocher. Il va s’en tirer. Y’en a qui avalent des lames. Ils demandent des rasoirs pour se raser, ils cassent les lames, ils les avalent. Moi je suis arrivé y’a une semaine, j’ai déjà vu deux personnes se mutiler, se couper les veines. Du point de vue des conditions s’est exactement comme… Je sais pas si vous avez vu le film Le couloir de la mort… Les gens ne dorment pas, y’en a qu’on vient chercher de force la nuit pour les expulser. Vous entendez ? Y’en a qui tapent sur les portes là. Ils passent la nuit éveillés parce qu’ils sont angoissés, du fait qu’on puisse les expulser. Dans la journée on est là, on tourne en rond. Y’a rien à faire. Ils ont installé des jeux à manettes Nintendo, ils arrêtent ça à 22h. Et ils arrêtent à minuit la télé, donc pour les gens qui sont éveillés ils n’ont rien à faire. Donc y’a des bagarres, y’a des tentatives de suicide. Y’en a tous les jours, au moins une tentative par jour, sinon plus. Les flics honnêtement ils me font pitié parce qu’ils peuvent rien faire, on n’est considéré comme des gens … On n’est pas en prison quoi. Ce qu’ils peuvent faire c’est obliger quelqu’un à aller à l’aéroport, ou descendre quelqu’un qui essaye de se pendre, ou évacuer quelqu’un qu’a avalé des lames, qui s’est mutilé. C’est tout ce qu’ils font, hein.

On fait des choses pour empêcher les expulsions, mais c’est plutôt par groupes quoi. Par exemple, y’a un grand nombre de maghrébins, surtout des Tunisiens, qui sont venus après les événements en Tunisie. Ils sont là, ils sont solidaires quoi, parce que chaque jour y’en a plein plein plein qui ont leurs noms sur les vols. La rétention ça dure 45 jours. Y’en a un c’était son 43e jour de rétention, c’est là qu’ils sont venus le chercher pour l’amener à l’aéroport. Il s’est coupé les veines, donc ils ont dû l’évacuer à l’hôpital et le temps qu’il revienne les 45 jours étaient passés. Donc y’a ça, eux ils sont très solidaires quand quelqu’un veut se suicider ils essayent de le raisonner. Mais on sait pas ce qui se passe dans la tête de quelqu’un qui veut se suicider. Les gens se révoltent contre le matériel, ils cassent tout ce qu’ils peuvent casser, les machines, … Mais c’est tout sinon. La plupart des flics qui travaillent ici, si vous voyiez leurs gueules… Vous verriez que c’est des gens qui n’ont vraiment pas envie d’être ici. Les agents de police qu’on met ici c’est pour les punir. Y’en a qu’en ont rien à foutre, y’en qui font leur travail, ils te disent de pas fumer dans la chambre. Ce qui est très important c’est que la majorité est d’origine étrangère, des noirs ou des arabes. Ils souffrent plus, parce qu’on leur ressemble.
Ils osent même pas nous regarder dans les yeux.

On voit le médecin à l’arrivée pour voir si on n’a pas de problèmes avec des substances illicites, ou d’alcoolisme. Le soir les infirmières passent distribuer des somnifères, l’infirmerie c’est essentiellement ça. Moi j’ai vu une infirmière mais pas de médecin. Ceux qui tentent de se suicider sérieusement on les conduit, je crois, à l’Hôtel Dieu voir un psychiatre. C’est l’infirmière qui évalue la gravité. Ici y’a trois centres complètement distincts. Ici y’a 59 chambres de deux personnes, donc avec 3 blocs, vous imaginez un peu le nombre de personnes qu’il y a. C’est plein à peu près à 80%. On se parle entre les blocs 2 et 3 à travers le grillage. On est séparé par une cour de sécurité d’à peu près 50 mètres, mais en parlant fort on peut s’entendre. Mais du 2 et du 3 on ne voit pas du tout le 1. Quand on va récupérer des affaires on passe par le centre 2, du coup on croise d’autres gens. Mais les conditions sont les mêmes partout. Les douches et les toilettes sont lavées deux fois par jour, c’est relativement propre. Elles sont ouvertes la journée et la nuit. Le vrai problème c’est la nourriture, par rapport aux religions. La majorité des gens ici sont de confession musulmane, ils ne mangent pas la viande. En une semaine, y’a eu qu’une fois du poisson, le reste du temps c’est de la viande. Dans les pots de dessert y’a une sorte de gélatine. Ils disent que ça vient du porc, du coup ils n’en mangent pas non plus. Ils se sont plaints mais ça change rien. Tout ça concourt à créer des conditions d’incarcération qui ne sont pas dites. On est enfermés, à leur merci, vous êtes en prison mais on vous dit que vous n’êtes pas en prison. Moi j’ai été arrêté sur un simple contrôle, j’avais une obligation de quitter le territoire. J’ai pas pu renouveler ma carte de séjour, car l’ambassade n’a pas fourni un papier à temps. Du coup je me suis retrouvé avec une OQTF. C’est au moment où je faisais les démarches que j’ai été contrôlé. J’ai pas d’argent, je suis passé devant le juge avec un avocat commis d’office. Tu le vois 5 minutes avant, ça c’est une parodie de justice, les dés sont jetés quoi, le tribunal administratif aussi, je suis même pas passé 3 minutes devant le juge.

Je suis entré légalement en France, j’ai vécu et travaillé ici pendant 26 ans. Y’a eu des retards dans le renouvellement de mon passeport par mon ambassade, ils me mettent là et ils veulent m’embarquer, moi je n’irai pas, s’il le faut j’irai jusqu’au bout, s’il le faut je me tue. J’ai tout en France, qu’est-ce que j’irai faire là-bas après 26 ans. C’est difficile de s’organiser, on a rien en commun à part d’être enfermés. Y’en a qui sont là parce qu’ils sont venus y’a pas longtemps, ils viennent de pays où ça va pas, d’autres qui sont là suite à des délits, les cas sont vraiment différents. Y’en a qui sont arrivés en France mineurs, aujourd’hui qui sont majeurs mais ont toujours pas de papiers, donc on veut les renvoyer, ce qui fait que pour que les gens se mettent ensemble il faut qu’ils aient les mêmes problèmes. Par exemple les Tunisiens, ils sont venus en bateau, ils ont traversé l’Italie, eux ils sont vraiment ensemble, ils sont solidaires, ils vivent les mêmes problèmes. Mais par exemple, y’a des Sri Lankais qui sont déboutés du droit d’asile, y’en a qui sont sortis de prison, y’en a qu’on arrêtent mais qu’ont aucun papier. On les met là le temps d’enquêter sur leur pays d’origine. En général ils baladent les flics, s’ils sont originaires d’un pays A ils disent qu’ils sont d’un pays B, on les amène à l’ambassade pour qu’elle établisse un sauf-conduit, l’ambassadeur dit au flics qu’il n’est pas de ce pays là et en général on les ramène au centre, ils sortent après les 45 jours. Ces derniers temps, y’a beaucoup beaucoup d’expulsions de Tunisiens, y’a eu comme un deal avec l’ambassade de Tunisie. Elle délivre des sauf-conduits, du coup on les oblige à partir. Ici quand vous devez partir, on affiche d’abord l’heure du vol le soir, avec le nom, le prénom. Généralement les gars n’opposent pas de résistance quand on vient les chercher, après une deuxième équipe de police les prend en charge et les amène à l’aéroport. Arrivés à l’aéroport, la première fois vous pouvez refuser le vol en demandant à voir le commandant de bord. Vous lui dites que vous ne souhaitez pas prendre le vol. Mais quand ça se répète, au bout de la deuxième ou troisième fois ils vous attachent avec du scotch. Y’en a qui réussissent à refuser plusieurs fois, ils sont jugés au pénal et vont en prison, entre 3 et 6 mois en général pour refus d’embarquement. Ils font un détour en prison puis ils reviennent ici au centre pour être expulsés…Selon les programmations des vols, y’en a qui passent 45 jours et puis après qui sont libérés, soit parce que ils sont pas arrivés à déterminer de quelle nationalité est la personne et donc elle a pas de sauf-conduit, soit parce que la personne se mutile, donc on l’amène à l’hôpital et ensuite on la ramène ici et on lui trouve un autre vol, et ça se répète comme ça jusqu’à ce que les 45 jours soient terminés… »

Témoignage du 10/02/12 depuis la prison pour étrangers de Vincennes

Vincennes – Centre 1

« L’hygiène ça va, le manger c’est pas trop bien, c’est comme la gamelle en prison. Y’en a qui se coupent les bras, y’a la bagarre, c’est pas trop… c’est le bordel, voilà, c’est pas trop bien. Ils viennent… y’a toujours la police. On peut pas fumer, on a rien, ils t’aident pas, y’a rien. On peut rien avoir, on peut pas avoir d’argent pour aide, y’a pas d’aide, y’a rien. Moi là j’suis arrivé, j’suis sorti de prison avant hier, ils m’ont ramené directement ici, j’ai tapé 5 mois à Fresnes, et après ils m’ont ramené ici. Ils m’ont dit que j’allais sortir et ils m’ont embarqué pour me ramener.

Par rapport aux chambres ça va, on est deux par chambre ou quatre par chambre, ça va ça se passe bien, à part au niveau accueil pas trop, y’a la police, y’a toujours la police qui tourne, y’en a marre. Mais avec eux franchement ça se passe bien.

En ce moment niveau expulsion j’saurais pas vous dire, y’en a pas beaucoup, y’en a beaucoup qui sont libérés aussi. La solidarité ça dépend des CRA. Par exemple le CRA 1 était moyen, y’a des petits et des moyens. Ca se passe bien, mais par exemple au CRA 2 et au CRA 3 y’a des grosses têtes et c’est un peu la guerre entre eux. Dans le CRA 1 ça va y’a ceux qui viennent de banlieue, y’a des jeunes-jeunes et tout, y’a pas des grosses têtes, mais y’a des CRA ou y’a des grosses têtes et tout. Des fois … ça dépend, ça dépend. Moi c’est la 3ème fois que je suis en CRA.

Vous pouvez pas m’aider ? Parce que y’a pas d’aide, y’a rien du tout à manger. Y’a l’ASSFAM ici à place de la Cimade, ils font des recours pour les juges et tout ça, ils t’aident pour le dossier pour le juge, mais ils font pas grand chose, à part ça c’est tout.

Moi deux fois j’ai été libéré par le médecin pour cause médicale, j’ai une broche au pied. Ca arrive souvent qu’il libère des gens sur avis médical. Moi ça fait 21 ans que j’suis arrivé en France.

Franchement y’en a trop marre y’a des caméras partout, et on est surveillé de partout, c’est trop surveillé. Sinon ici c’est calme. Ca se passe entre nous.

J’avais une carte de 10 ans, elle a expiré et puis ils m’ont arrêté pour contrôle de papiers, puis vu que j’avais pas de carte… j’étais en prison, j’étais emprisonné, j’ai demandé à la faire renouveler, ils ont pas voulu me la faire renouveler, comme t’as pas d’accès au droit et tout ça, ils ont pas voulu me donner de permission…  »

Vincennes – Centre 2

 » J’suis retenu ça fait longtemps que je suis là, vraiment, si tu rentres à l’intérieur tu vas voir des trucs bizarres, et c’est insupportable, y’a des trucs que tu peux pas imaginer, ici y’a des gens qui se coupent, y’a des gens qui se suicident et qui font des tentatives de suicides, y’a plein de trucs. D’ailleurs ils te donnent à manger… comme le petit déjeuner c’est des trucs périmés, c’est comme la douche c’est de l’eau froide. On souffre ici franchement. C’est très dur au niveau de l’hygiène.

Chaque jour y’a des tentatives de suicide. C’est des trucs réels, c’est des trucs véridiques, c’est pas comme ça… c’est des gens sérieux qui veulent se suicider. Y’a des gens qui prennent des lames et ils se coupent. Ils se coupent leurs mains, même ils se coupent les veines, de leurs mains, de leurs jambes avec les lames. Le couloir où il y a les chambres, y’a plein de sang dans le couloir, on dirait que c’est du béton, tu peux pas marcher dans le sang. En plus comme les flics y font ici…Quand quelqu’un est expulsé ils utilisent le scotch, normalement c’est interdit dans la loi, c’est interdit. Ils attachent les gens avec du scotch, c’est un grand rouleau de scotch. C’est des trucs que tu peux pas savoir avec tes yeux, c’est insupportable.

Hier on a vu un mec qui s’est cassé la jambe à cause d’un vol. Il a cassé la jambe avec la porte. T’imagines la cheville ? Il a cassé sa cheville avec la porte à cause d’un vol. Mais les flics ici ils sont fous. On dirait on est dans un coin perdu. Y’a toujours des violences avec la police. Les flics à chaque fois ils frappent des retenus normalement c’est interdit ça. Même chez nous on a pas ça. Comment ça tu frappes quelqu’un, tu frappes un retenu ? C’est pas évident, d’ailleurs tu trouves des taches. Ici les policiers ils sont solidaires ensemble, a chaque fois ils font des trucs contre…voilà ils sont solidaires ensemble.

Moi je me suis fais arrêter, contrôle de papiers. Ca fait longtemps que j’suis en France et pour la première fois ils m’ont saisi les empreintes, j’ai fait aucune connerie, pour la première fois ils m’ont fait les empreintes, et ils me ramènent directement ici en centre de rétention. C’est bizarre pourtant j’ai rien fait. Aucune connerie, j’suis quelqu’un de sérieux. Les gens qui étaient avec moi en garde à vue avant qu’ils me ramènent ici, ceux qui faisaient des vols qui se sont fait attraper avec des iphone et tout, ils sont libérés et moi ils me ramènent ici. J’ai été jugé devant le tribunal administratif mais j’ai pas été libéré, j’ai un avocat mais il m’a dit c’est les ordres qui viennent de là haut.Y’a des gens…On est tous dans le même cas, mais y’en a qui sont libérés et d’autres non. On est tous le même cas, c’est un contrôle de papiers, c’est un problème de papiers. C’est pas question chacun son cas, on est tous en centre de rétention. Comment ça moi j’y suis depuis 26 jours, y’a quelqu’un moi j’suis rentré avant lui et il est sorti avant moi. Pourtant tous on est le même cas. C’est pas grand chose les gens expulsés, parce qu’ici quand quelqu’un il voit son vol, il doit se couper et…Donc voilà ils le ramènent forcément avec du scotch, à 5h du matin quand il est endormi, et hop ils le ramènent avec le scotch et tout, donc forcément comme ça c’est bizarre. On dirait qu’y a pas de droits, on dirait que liberté, égalité, fraternité, c’est juste un décor, voilà, c’est juste un tableau, sinon y’a rien y’a rien y’a rien…

J’ai vu le médecin car moi j’ai une maladie, j’ai une hépatite B. Normalement il faut que je me soigne dehors, parce que j’ai mon docteur dehors, mais non ils veulent pas me libérer, c’est comme ça. En plus j’ai un régime alimentaire, parce que cette maladie elle attaque le foie, il me faut un régime alimentaire mais ils en ont rien à foutre de moi, ils me laissent ici crever, voilà. J’ai les preuves, j’ai les ordonnances, les prises de sang, j’ai toutes les preuves. Ils me donnent pas les médicaments, ils m’ont dit « on a pas ton traitement ». Alors Je lui ai dis « tu peux me libérer pour que je me soigne, pourquoi je reste ici ? » il m’a rien répondu. Ici y’a que des cachets, que des calmants, c’est tout. Si t’as besoin de calmants, de drogues, des anti-stress et tout, d’accord, si t’as besoin de ça, sinon à part ça y’a rien. C’est fait exprès. Beaucoup de gens qui n’ont jamais mangé de calmants avant, ici ils les mangent. Y’a des bagarres, c’est le stress, tout le monde il stresse ici c’est normal, tout le monde est énervé, c’est normal, tant qu’on est dans un coin limité. Ils en ont rien à foutre de ça, ils voient des bagarres comme ça mais ils regardent comme ça de l’extérieur et c’est tout. Dans mon cas, j’ai une maladie vraiment très grave, c’est bizarre j’ai toutes les preuves, j’ai tout, j’ai mon docteur dehors qui me suit, il faut qu’il me soigne, il me faut un traitement, il me faut ça, il me faut ça, mais ils me laissent ici, ils veulent pas me libérer, c’est comme ça.

Hier y’a eu une tentative de suicide ici, les policiers ils regardent, normalement ils l’engueulent les policiers, ils le laissent pas faire sa tentative de suicide. Heureusement y’a quelqu’un, c’était un retenu, il l’a descendu il a pu le sauver. Lui même il est tombé parterre, il s’est cassé le pied, ils l’ont amené à l’hôpital, il est revenu ici avec le plâtre il est là.

Pour résister aux expulsions, faut perdre le demi de ton corps, faut se couper, faut faire ça avec une lame. Tout simplement, vraiment, j’ai pas imaginé que je trouve ça dans ce pays. J’ai pas imaginé ça du tout. J’ai été en Italie, j’ai été un peu partout, j’ai pas vu ça. Ici c’est bizarre. On est pas en temps de guerre, mais ici c’est la guerre, c’est des trucs qui se passent à l’intérieur dans des coins perdus, fermés. C’est pas l’Irak, en Irak c’est la guerre, c’est normal, y’a des blessés, y’a des morts mais ici c’est pas la guerre, mais c’est en silence. J’ai été en centre de rétention en Italie, on était vraiment super. Au contraire, quand on sort, les flics italiens ils sont généreux. On dirait que je suis chez moi, je suis pas en centre. Si je sors je dois quitter la France une fois pour toutes. Pour la première fois j’ai vu des cas que j’ai jamais vu dans ma vie, pourtant je voyage beaucoup, j’ai beaucoup aventuré, ici c’est une autre façon, c’est avec un autre système. On est là, pays des droits de l’homme et tout, voilà la réalité. C’est insupportable, insupportable. »

Témoignage du 17/02/12 depuis la prison pour étrangers de Vincennes

Vincennes – Centre 3

 » J’parle ici de Vincennes, ça fait 5-6 jours les douches, les toilettes, le soir bah y’a pas de lumière… Tout le monde il se coupe les veines tout ça… La bouffe, j’parle même pas, c’est dégueulasse, c’est immangeable, et ils pensent même pas à la viande hallal tout ça, parce que nous on mange que du hallal. Et y’a une panne d’électricité le soir, l’aile gauche du CRA 3 toutes les chambres y’a pas de lumière.

Le plus dur c’est les policiers, c’est le comportement des policiers. Les policiers ils viennent le matin à 4h du mat’ et ils rentrent sans taper à la porte et tout, ils demandent les cartes, tout le monde il dort, ils passent tard un soir… tout le monde il se coupe les veines, y’a des tentatives de suicides. Y’a un mec qui s’est coupé, il a six points de sutures le mec ils l’ont ramené à l’aéroport, il lui restait un jour et ils l’ont ramené au bled. Il est blessé, ils lui ont mis un pansement ils l’ont ramené en Tunisie.

Voilà on parle avec tout le monde, l’ASSFAM tout ça, j’ai fait un courrier pour qu’on parle avec le commandant du centre, et jusqu’à maintenant on n’a pas de résultats. Aujourd’hui, là tout de suite, ils ont mis un papier comme quoi l’eau elle va couper vers 18h jusqu’à demain matin à 10h. Et nous on fait la prière, ça veut dire on sait pas comment faire les ablutions, les douches tout ça, c’est inadmissible. On sait pas trop comment faire. Je vais parler avec les gens pour faire une grève de la faim…

J’vous dis, les policiers c’est des cow-boys. Le soir les gens ils rentrent, hier, ils sont rentrés dans une chambre, y’a un mec il a demandé le feu pendant une heure, qu’est-ce qu’il a fait, il a pris du papier et il l’a collé sur les caméras. Trois policiers ils rentrent le soir dans une chambre, ils appellent le mec… dans la chambre, dans la chambre hein, ils ont fermé la chambre ils ont mis un policier dehors, ils sont rentrés, ils ont dit quoi ?! « Maintenant c’est qui qui vient faire un combat avec nous ? » C’est comme ça hein ! C’est comme ça. Le mec il a dit « Maintenant parce que je suis pas un policier, viens dans la chambre tout seul, on va faire un combat, c’est qui qui va gagner…  » Imaginez-vous comment ça se passe le soir…

Les distributeurs normalement ils ouvrent à 15h, à 15h30 on demande quelqu’un, y’a personne. L’allume-cigare, y’a une semaine, chaque jour j’parle avec eux, y’a personne. Monsieur s’il vous plaît réglez votre problème, parce que moi j’suis en rétention, j’suis pas un détenu j’suis un retenu. J’ai pas commis un délit ni une effraction. Mais voilà chaque jour c’est comme ça, c’est la même chose, on parle avec tout le monde, même l’ASSFAM… ils ont fait le maximum, même pour eux c’est galère. La femme de l’ASSFAM elle m’a dit « j’rentre aux toilettes, et les policiers ils viennent aux toilettes, au lieu de taper la porte ils rentrent directement.  » C’est la femme de l’ASSFAM. Imaginez-vous nous, les gens qu’ont pas de papiers. Voilà, c’est le bordel.

Avec le médecin ça va, c’est tous les gens qui travaillent, ce sont pas les policiers, ça va. Le problème c’est les policiers, et chaque jour c’est que des paroles. On parle de pannes de l’eau et de l’électricité, mais il me dit « on est en train de faire un devis » Mais le devis il reste pas une semaine !

Moi j’suis là pour rien, juste j’ai pas de papiers. Ca veut dire j’ai besoin de manger, de fumer quand je veux. J’suis libre, mais en rétention. Et le matin… j’vous dis pour le distributeur c’est à chaque fois 15h30, normalement ils ouvrent à 15h. Il faut que monsieur le policier il vient, à chaque fois on dit « ils sont où les policiers ? » Dernièrement là, avant hier, à 15h30 y’a pas de policier pour ouvrir le distributeur. Dès que j’ai commencé à faire le bordel, jeter des poubelles et tout ça, y’a 16 policiers qui sont là. J’ai dit « pourquoi vous faites ça ? Depuis tout-à-l’heure j’ai demandé un policier pour ouvrir le distributeur, y’a personne. Dès que j’ai commencé à faire le bordel tout le monde ils sont là.  » Ca veut dire quoi, ça veut dire ils sont en train de provoquer les gens pour faire des problèmes.

Moi j’viens de prison. Ca fait 13 mois j’suis en prison là j’suis au centre. J’suis rentré ici le 8 Février. Y’a des gens qui parlent pas Français mais aujourd’hui j’ai fait une pétition, on est au centre 49 personnes, j’ai fais une pétition : 34 personnes, et les autres y’a des gens qui dorment, y’a des gens qui sont au tribunal, tout ça…Jusqu’à maintenant y’a rien qui change ! Mais j’vous dis hein , quelqu’un il se coupe les veines ici, ils le ramènent quand même à l’aéroport…Normalement quelqu’un il est blessé, ils ont pas l’droit, le mec il a 6 points de suture ils le ramènent à l’avion ! Le sang est partout, j’vous dis chaque soir y’a quelqu’un qui se coupe les veines, chaque soir. Y’a personne qui parle de ça à la télé, y’a rien du tout à la télé, que les élections ! Tous les jours y’a quelqu’un qui se coupe les veines, après eux ils notent que les chiffres d’une personne, ça veut dire ils nous prennent pour des chiffres, pas des êtres humains qui ont des problèmes chez eux…

J’dors pas, ça fait une semaine j’dors pas, ni le soir ni le matin, parce que les gens pour demander à allumer une cigarette il faut qu’ils tapent à la porte, y’a personne à l’accueil le matin. A 1h du mat’ y’a des gens qui dorment pas parce que le lendemain ils ont un vol. Ils demandent d’allumer une cigarette, ils vont à l’accueil y’a personne. Ca veut dire on est laissé tous seuls, avec des policiers enragés, à chaque soir chacun rentre avec son pote, à 2-3, il rentre dans la chambre, il fait son film et il repart. Y’a personne qui parle. Moi j’étais là avant, j’ai fais une bagarre avec un policier il m’a frappé, j’suis parti au commissariat du 12ème déposer une plainte : ils vont croire à qui ? Un ancien taulard ou un policier ? A cause de ça j’ai pris un mois de prison ferme. Ca veut dire on parle, on va en prison, on parle pas on est des esclaves, exactement on est des esclaves. Ils font qu’est-ce qu’ils veulent parce qu’on n’a pas de papiers, on n’a pas de droits. J’veux quoi, j’veux tout le monde y sache c’est quoi l’enfer ici , parce qu’on est dans un couloir de la mort. , J’vous jure, chaque jour y’a quelqu’un qui se coupe les veines. Hier y’a un Africain, un Gabonais, aujourd’hui même y’a quelqu’un ils l’ont pris en vol en Tunisie, toute sa famille ils sont là, y’a personne au bled, pour lui y’a personne. Son père il est là, lui il est là, son frère il est là, et lui tout seul ils vont le renvoyer en Tunisie, il connaît personne, ça fait 15 ans qu’il est là en France, à chaque fois il veut faire un regroupement familial ils lui donnent pas le papier. Il a pas de casier judiciaire, rien du tout, maintenant là tout de suite ils l’ont pris, le mec il va refuser la première fois il m’a dit, parce que maintenant ils préparent, ils doivent mettre pour le premier vol, donc maintenant ils préparent le deuxième parce qu’ils savent que tout le monde peut refuser le premier. Le premier ça se passe bien, il demande au pilote, nanani nanana, le pilote lui demande si il veut monter, lui il dit non, il le laisse partir. Il revient ici, le soir même il a un vol il sait pas parce qu’ils ont pas mis sur la liste, ils mettent pas le vol la deuxième fois, la deuxième fois ils le mettent pas sur la liste. Quand tu refuses le premier, le deuxième ils le mettent pas. Ils viennent directement à 4h du mat’, 2-3-4 personnes policiers, ils viennent ils rentrent dans la chambre : « Monsieur prépare toi. » Le mec qu’est-ce qui fait ? Il a déjà préparé une lame, et il va faire couper ce soir, ce soir même il y a une victime, il y a encore une victime.

Y’a personne qui parle, ni radio… je regarde la télé du matin jusqu’au soir, y’a rien, y’a rien qui parle du centre de Vincennes. Ils attendent quoi, qu’ils crament le centre ? Après tout le monde ils vont parler, ils vont dire l’immigration c’est des mauvais, c’est des méchants.

Moi j’vous assure, si vous passez juste une soirée ici, franchement c’est incroyable, incroyable ! Incroyable… J’sais pas comment ça se passe après, parce qu’à chaque fois j’parle avec l’ASSFAM… tout le monde il me parle mais l’action y’a pas. Moi j’aimerais voir l’action parce que les paroles c’est… c’est gratuit mais l’action c’est cher. C’est trop c’est trop c’est trop. Imaginez vous, chaque soir y’a quelqu’un qui se coupe, du sang… comment les gens ils vont dormir ici ? Y’a personne qui dort… Y’a personne qui dort.  »

Témoignage du 16/04/12 depuis la prison pour étrangers de Vincennes

Centre 1

‘’ C’est la merde, ça pue. Y’a rien c’est la merde. Les toilettes elles puent, les policiers ils nous respectent pas, c’est la merde quoi. Même ce matin ils ont frappé quelqu’un, un petit. Je sais pas pourquoi. Il a fait une plainte là il va passer demain, j’sais pas là il va aller à l’hôpital. Il est là, il a vu l’infirmière, elle a fait une feuille et tout, bah ils l’ont faxé au tribunal, après le procureur il a dit « faudrait l’amener à l’hôpital. » Ils l’amènent demain, demain matin.

La nourriture c’est la merde, ça pue, par exemple moi ça fait 5 jours j’ai pas mangé. Je peux pas, si je la mange je la vomis. Les toilettes elles sont bouchées, ça pue, les douches elles sont sales.

Dans le centre, ils ramènent, ils renvoient, des fois ils libèrent mais toujours il est plein.

Ce matin ils en ont expulsé un qui a les papiers espagnols, ils l’ont ramené à Perpignan, il a une résidence espagnole ils l’ont expulsé quoi, il avait un petit problème, je sais pas… Ce matin à 5h j’ai assisté ils lui ont dit « on va te ramener à Perpignan », il a un vol à Perpignan. Y’a deux roumains aussi là ils ont le vol mercredi.

Y’a 4 jours là ils ont expulsé un Algérien, il a avalé des lames ils l’ont emmené, je sais pas ils ont dû l’expulser parce qu’il est pas revenu. Les mecs ils ont dû l’expulser avec les lames dans le ventre. Il avait avalé des lames, bah il souffre quoi, moi je l’ai vu, il tremble et tout, mais quand même ils l’ont emmené à 4h du matin. Même pas il est allé à l’hôpital avant, j’étais là, je l’ai vu, il était en train de trembler et tout, après moi je veux pas voir ça je suis parti, mais après ils m’ont dit comme quoi ils l’ont expulsé. C’est un truc qui est incroyable mais vrai, là ils ramènent des gens, on souffre, on est là on voit des choses incroyables, mais vraies.

Les toilettes ça pue, tu peux pas rentrer, les mecs ils chient là ils tirent même pas la chasse…C’est incroyable le matin. Ils nettoient que l’après-midi, vers 17 ou 18h, le soir quoi. Ils nettoient ils partent et après le lendemain tu te réveilles tu trouves tout sale.

Le médecin il arrive, il appelle deux fois trois fois et il part, il dit comme quoi il y a trop de monde. Comme moi, ça fait deux jours que j’réclame. Comme ce matin, j’me suis inscris hier, ils m’ont dit « il t’a appelé, t’étais pas là et après il est parti, y’a trop de monde ». L’infirmière… bah franchement les infirmières elles donnent des cachetons, les mecs ils sont comme des fous. Tout le monde réclame des cachetons, ils prennent des cachetons pour dormir, pour ça, pour ça, pour ça…Ils sont fous ils sont accros à des…On dirait on est à la Colombie ou j’sais pas. Tous les jours les mecs ils avalent n’importe quoi, des cachetons rouge, des cachetons bleus, des cachetons jaunes… J’sais pas.

Moi ils m’ont arrêté dans la rue, contrôle voilà, moi je comprends pas. Par exemple le procureur il m’a libéré, mais le commissariat il voulait pas me libérer et ils m’ont ramené ici. J’suis passé en jugement, l’avocat il a dit « voilà normalement lui il était libéré » mais la police ils m’ont ramené au commissariat, ils voulaient pas me libérer… ‘’

Témoignage du 17/04/12 depuis la prison pour étrangers de Vincennes

Centre 2

« Ca va pas du tout. Les douches y’a pas de porte, l’eau chaude y’en a pas, ça fait deux jours. Voilà. Au niveau de la nourriture, on est beaucoup de musulmans ici, la plupart du temps on mange pas assez parce que c’est de la viande, on mange pas. En plus y’a des yogourts avec de la gélatine dedans. Quand y’a du poisson on mange, quand y’en a pas y’en a pas, on mange pas. On mange que les desserts et le pain. Comme musulmans ici on est presque 40 personnes, on mange pas la viande. Au dessert aussi ça dépend, quand y’a du yogourt on regarde dedans, si y’a de la gélatine on mange pas. Moi même j’ai fait avec l’ASSFAM une lettre, j’ai donné en main direct, le commandant il me connaît très bien aussi, j’ai parlé avec lui aussi. Ca a rien donné, aucune réponse, il s’en fout. Ca fait maintenant plus que 10 jours.

Ici y’a de la solidarité, heureusement, surtout entre nous les Arabes… des Algériens, des Tunisiens, des Marocains, des Egyptiens, même y’a des Hindous on s’entend bien avec eux. Tous, on est dans le merde, pourquoi on fait de… Y’a pas de problème.

Avant hier y’en a un avec le rasoir qui a déchiré son corps, je pense un Marocain ou un Algérien, je sais pas… Y’a des gens qui le font…

Déjà on a fait une grève, ça fait dix jours, on est sorti tous dehors, devant le… On réclame que pour les quarante jours c’est beaucoup, la nourriture on mange pas assez, les douches… bon ils ont réparé une douche, une seule, mais y’en a dix y’en a que quatre qui marchent des douches, l’autre côté il est fermé définitif, j’sais pas pourquoi. Ils s’en foutent, on est resté mais on a décidé on fait pas de problèmes, on touche personne, on est resté dehors toute la nuit, voilà, on est rentré vers 6 heures du matin. Voilà. Ils s’en foutent, on est ici de toute façon ils s’en foutent de nous, y’a pas de gens qui nous suivent ici qui viennent, regardent… J’sais pas, on est tous seuls ici. En plus on entend « droits de l’homme, machin, machin », j’sais pas ils sont où les droits de l’homme, y’a plein de trucs en dessous. Tac tac, même sans passeport ils font rentrer les gens.

Ici y’a deux infirmiers ils sont franchement racistes. Ce sont des racistes. Tous ici, des blacks, des hindous, des arabes, ils se plaignent d’eux. Ils s’en foutent, « si tu n’es pas content, dégage chez toi » elle m’a dit, moi personnellement. Y’a un black pareil elle lui a dit « vous faites quoi ici ? ». Moi je lui dis « excusez-moi madame si vous dites ça, vous vous restez chez moi, comme je suis Tunisien, vous restez chez moi 89 ans, même vous êtes venus avec des chars armés, des avions de chasse, en plus vous étiez plus que 300 000 personnes, et là maintenant tu me dis qu’est-ce que je fais ici ? Je viens ici, j’suis pas voleur, j’suis pas machin, je viens ici pour travailler ». Ils parlent très très très mal, franchement. On les sent agressif, grave. Ils donnent des médicaments, mais il manque. Il manque du sirop, y’a des gens qui toussent. En plus y’a des portes qui ferment pas, des grandes portes qui font des courants d’air. On est tout le temps grippé ici, tout le temps. J’ai dit ça au commandant. Y’a cinq ou six personnes qui prennent des calmants. Parce qu’ils sont pas biens, déjà depuis dehors ils sont pas biens eux. Y’en a un il était bien, là maintenant comme un drogué, c’est eux qui font ça exprès. Ils donnent les médicaments, boire ça, pour calmer les…

J’me suis fait arrêté après un contrôle. Il m’a ramené moi comme quoi y’a quelqu’un qui me poursuit. Il m’a ramené au commissariat. J’suis resté là-bas, il m’a dit « t’inquiète tu vas sortir » parce que c’est pas moi dans l’histoire, je suis pas le monsieur qu’il cherche. Il m’a dit « ok, toi t’as rien, on vous enferme là mais vous avez pas de papiers, obligé qu’on te ramène au centre. » J’suis passé devant le juge, en plus je suis malade, j’ai un dossier ici, voilà… Il m’a donné 96h pour que je regarde le médecin ici, là j’attends jusqu’à aujourd’hui, depuis le 31. J’avais un avocat gratuit là.

Y’a toujours des expulsions ici. Mais y’en a trois aussi aujourd’hui ils sont libérés. Chaque soir y’a une douzaine ou quatorze vols. ’’

Liberté pour tous et toutes !

Pour appeler aux CRA de Vincennes :

Vincennes 1

01 45 18 59 70 – 01 45 18 12 40 – 01 45 18 02 50

Vincennes 2

01 48 93 69 47 – 01 48 93 69 62 – 01 48 93 90 42

Vincennes 3

01 48 93 99 80 – 01 43 76 50 87 – 01 48 93 91 12