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Contre les frontières et leurs prisons

[Turin] À propos de la lutte contre le centre

À propos de la lutte contre le centre

Au cours de la lutte contre les Centri di internamento ed espulsione (CIE), un rendez-vous fixe s’est tenu pendant longtemps à Turin. Pendant un peu moins de deux ans, de l’été 2009 au printemps 2011, chaque troisième dimanche du mois, les solidaires se retrouvaient dans le jardin de Corso Brunelleschi, juste devant les murs du centre, pour donner vie à un rassemblement long et bruyant. Née des cendres d’autres expériences de lutte, qui ont échoué à cause  de l’incompatibilité des méthodes et des perspectives entre camarades qui y participaient, l’idée d’un rassemblement régulier avait quatre objectifs :

  1.  maintenir vivant le rapport avec l’intérieur, grâce à un rendez-vous de lutte connu à l’avance des solidaires et des retenus.
  2.  maintenir vive l’attention des compagnons ainsi plus assidûment impliqués dans la lutte.
  3.  construire et intensifier les rapports avec tous les solidaires (ou potentiels solidaires) intéressés pour lutter contre les CIE.
  4. impliquer dans la participation et possiblement dans l’organisation du rassemblement des amis et parents des retenus, pour essayer de stimuler des mécanismes de solidarité non militants.

Après le long été 2011 au Val di Susa (lutte contre le TAV, ndlt), qui avait de fait ralenti quasiment toute activité en ville, les rassemblements réguliers n’ont pas repris. Il y a eu plusieurs occasions au cours desquelles on s’est retrouvés devant les murs, mais l’idée d’un rendez-vous mensuel a été depuis ce moment négligée dans les faits. À la même période, les tâches quotidiennes, dans l’élaboration et dans la pratique, pour développer un parcours de lutte contre les sfratti (expulsions locatives, ndlt) et lancer des occupations, ont évidemment réduit les énergies disponibles pour s’engager dans d’autres luttes.

Cependant, une des conséquences les plus importantes de cette lutte contre les sfratti a été liée au fait qu’il y a, dans ces quartiers, beaucoup de familles immigrées, souvent sans-papiers, dont beaucoup passent leurs journées dans la rue. Concrètement  les compagnons rencontraient quotidiennement l’ensemble du spectre du centre de rétention en bas de chez eux. Il est inévitable que les rafles quotidiennes nous renvoient en permanence à la gueule l’urgence d’une intervention qui sorte du coup par coup et de l’aléatoire, et devienne une partie non négligeable de la lutte contre les déportations. Une partie des énergies, et surtout des réflexions, a été logiquement dirigés dans ce sens.

Le moment central dans l’évolution de ce parcours a été le choix clair et raisonné de développer les relations directes, non seulement avec ceux qui sont dedans (en téléphonant dans le centre) mais aussi avec ceux qui en sortaient. La possibilité de les héberger ou d’occuper une maison ensemble s’est révélée être un instrument fondamental. Ici, il est clair que si d’un côté les luttes vécues principalement dans le quartier absorbent une grande partie des forces, de l’autre elles créent des possibilités et des liens non accessoires, dont les effets se dessinent avec le temps. Le choix et l’opportunité de créer des rapports stables et complices avec les ex-retenus ont permis en effet de tisser des relations dans le quartier dans un milieu différent de celui des familles sous sfratto (avis d’expulsion locative), avec pour conséquence non négligeable une présence conflictuelle toujours plus efficace dans les rues. De plus on a eu la possibilité et le temps d’apprendre à regarder le CIE aussi à travers les yeux des retenus, et d’en connaître les histoires et les dynamiques internes de manière non superficielle.

La confiance en ces nouvelles possibilités et l’enthousiasme pour le niveau de complicité atteint lors de la période automne-hiver 2011, durant laquelle se sont déroulées plusieurs révoltes et évasions (surtout entre septembre et le nouvel an), ont en partie contribué à créer la sensation d’avoir dépassé la nécessité de maintenir une présence constante devant les murs du CIE. C’est donc suite à  un entrelacement de causes « naturelles » et de choix, que les rassemblements ont été complètement arrêtés au cours de l’été 2012.

À partir de cette période, et pendant plusieurs mois, au delà de quelques rares épisodes de rebellions individuelles, on ne percevait que dépression et découragement à travers les contacts téléphoniques.  Les « retours volontaires » semblaient l’unique solution pour mettre fin à l’enfermement, et les terribles actes d’automutilations l’unique forme de résistance contre l’expulsion. Indépendamment de la présence ou de l’absence d’initiatives de solidarité avec les retenus, les compagnons qui suivent cette lutte depuis de nombreuses années savent que, par moment, il est possible de devoir affronter une telle situation.

Tout cela s’est terminé à l’improviste, le 1er décembre 2012 alors que la Samba Band, un groupe qui depuis des années accompagne avec ses tambours les rassemblements et manifestations à Turin, « fêtait » son dixième anniversaire sur le terre-plein de Corso Brunelleschi. Les mois d’apathie semblèrent s’effacer en un instant. Les retenus ont cherché à défoncer les portes des cellules et au final tout le centre  bouillonna. La police réprimait avec matraque et canons à eau, tandis que dehors le rassemblement se transformait en manifestation. Cette journée mit en évidence que les difficultés objectives et les réussites d’autres aspects de la lutte n’auraient pas du conduire à abandonner l’instrument du rassemblement, et que les saluts sporadiques et rapides liés à quelque urgence ne peuvent être suffisants. Quiconque lutte devrait au minimum se donner des échéances : les objectifs qui étaient préfixés avec le choix d’un rassemblement régulier restent toujours valides et la possibilité de rester quelques heures, raconter à tous, en arabe et dans d’autres langues, les révoltes et les évasions survenues dans d’autres centres n’est pas une occasion à négliger.

En janvier, les personnes dans le CIE se révoltent plus d’une fois, protestant contre le froid et le chauffage éteint, mettant le feu à tous les matelas. Et à la fin du mois, est survenu un autre épisode qui réchauffe le cœur : la résistance de Jamal.

Jamal attendait l’audience du recours à l’expulsion. Il a une compagne qui était alors enceinte de 8 mois, et son histoire devait se régler rapidement. Un jour au hasard, il a été attiré par ruse hors de sa chambre et ceinturé  en vue d’être expulsé. Comprenant la situation et se trouvant seul face à une dizaine d’agents des forces de l’ordre, il décida de résister. N’ayant d’autre possibilité, il s’entailla les bras et le corps. La nouvelle circula parmi les solidaires et, peu de temps après, un rassemblement se forma en face de l’entrée principale, des slogans et du bruit attirèrent l’attention des passants et des retenus, dont certains montèrent sur le toit. La ténacité de Jamal et la solidarité de ceux qui sont arrivés devant le centre et qui, pendant quatre heures, ont bloqué le portail, ont permis d’empêcher l’expulsion.  Malheureusement, un fourgon emmenant deux autres retenus, qui n’avaient pas opposé de résistance et dont nous avions des nouvelles confuses, est sorti par la porte secondaire. Ce jour là, nous n’étions pas assez nombreux pour bloquer simultanément les deux entrées. Pourtant à Turin, les solidaires qui s’approchent des murs du CIE sont en nombre suffisant pour avoir une présence efficace. Une meilleure détermination de tous pourrait rendre possible la tentative d’intervenir adéquatement aux expulsions de ceux qui opposent de la résistance, surtout lorqu’ils sont isolés et dans des situations particulièrement défavorables. Aussi, la solidarité durant les révoltes gagnerait en qualité si les solidaires étaient plus disponibles. De combien diminuerait la pression interne au centre si, dehors, on pouvait opposer des pratiques contraignant les forces de l’ordre à être distraits ?

Sans pour autant élaborer forcément un parcours de lutte commun  nécessairement plus complexe, que chacun devrait continuer de manière autonome avec ses propres moyens et sa propre sensibilité, à Turin il y aurait besoin au minimum de tenter de créer des conditions permettant d’affronter ensemble les moments critiques. Les grosses révoltes de fin février à Turin ont montré une fois de plus le caractère urgent de cette proposition.

Un prémisse est nécessaire au récit de ces révoltes. Peu de jours avant, dans le CIE de Ponte Galeria aux portes de Rome, la réaction des retenus à la tentative d’expulsion d’une personne nigériane s’est transformée en émeute. Les connaissances du retenu d’abord , puis tous les autres, se sont retrouvés dans l’espace commun et ont incendié les matelas contre les barrières de Plexiglas, qui sont installées pour empêcher les évasions. C’est derrière ces panneaux que se trouvent les caméras et les câbles de vidéo surveillance, le feu a donc endommagé tout le système de contrôle du centre . En conséquence le centre, désormais impossible à contrôler, a été vidé. Expulsions, transferts, interdictions du territoire pour les personnes sorties. L’effectif du centre est passé de 150 retenus à une cinquantaine. Le récit de la révolte de Rome a circulé rapidement de CIE à CIE, avec un message clair pour tous : si une prison est détruite alors il n’est plus possible d’y ré-enfermer quelqu’un. Cela, ajouté à la rage refoulée depuis des mois, va être le détonateur pour les révoltes de Turin. À deux reprises, vendredi 22 et dimanche 24 février les retenus ont choisi consciencieusement de rendre inutilisable une grande partie des cellules. Le 22 février certains ont tenté de s’évader en escaladant les grilles, mais ont été repris avant le dernier mur. S’échappa alors la rage et immédiatement la suggestion de Ponte Galeria prend corps. Dans la section bleue et la section rouge quasiment toutes les chambres ont été ravagées par les flammes et il ne resta plus pour dormir qu’une seule salle par section : 20 retenus dans l’une et 15 dans l’autre. La répression fut extrêmement dure. Dans le jardin de Corso Brunelleschi l’air était tellement suffocant à cause des lacrymogènes que les solidaires sur place ont eu du mal à respirer. Les récits de passages à tabac sont nombreux, et au terme de la révolte quatre personnes ont été arrêtées.

Le jour suivant un rassemblement, appelé depuis une dizaine de jours, a mobilisé de nombreux solidaires, et le soutien aux personnes qui se sont rebellées a été affirmé avec force. La révolte de Rome a une fois de plus été racontée ainsi que l’évasion de groupe survenue quelques jours plus tôt au CIE de Gradisca, soulignant que les retenus avaient conquis la liberté en s’affrontant avec la police. Une manifestation improvisée a fait le tour du centre. Le lendemain, la section jaune a suivi l’exemple des sections bleue et rouge. Tout le centre a soutenu la révolte. Les solidaires rapidement rassemblés devant ont entendu un unique et imposant cri venant de l’intérieur : « Liberta ! Liberta! ». Au total trois chambres sur cinq furent incendiées, de sorte que plus de trente retenus se sont retrouvés avec seulement deux chambres à disposition et nombre d’entre eux ont été envoyés dormir dans la cantine. Les solutions apportées à l’état inexploitable du centre sont d’une part une augmentation des expulsions et quelque libérations, d’autre part la fausse célébration de la totale remise en fonction du centre par les journalistes. Ces derniers jours à Turin il est impossible pour les flics d’enfermer des sans-papiers et tout ceci grâce à ces personnes qui, courant le risque d’être arrêtées ou expulsées immédiatement, ont annulé dans la pratique la possibilité d’accueil du centre de Turin.

Encore une fois, il est nécessaire de s’interroger sur la façon d’être plus déterminés et efficaces. La voie ouverte par les retenus de Rome et de Turin est évidemment celle juste, et toute relation avec eux devrait pousser dans cette direction en les soutenant, les encourageant, faisant circuler les nouvelles d’un centre à l’autre. Assumant aussi la responsabilité des conséquences qu’ils peuvent subir, les soutenant si arrêtés et exécutant des pratiques toujours plus résolues si ils tentent de les expulser, surtout à la suite d’une révolte.

Cependant la présence devant les murs n’épuise pas le champ de la solidarité. Les CIE survivent grâce aux décisions d’individus et d’associations qui, accomplissant leur propre tâche, en perpétuent l’existence. Et il est bon de leur rappeler que jusqu’à ce que les CIE n’existent plus, ils ne dormiront pas tranquilles. La nuit du 24 février quelqu’un s’est souvenu des gestionnaires du CIE de Turin et a pensé bon de rendre la monnaie de leur pièce aux exploiteurs, en l’espèce les revendications des retenus à propos du chauffage : le gaz du siège de la croix rouge a été éteint et l’accès cimenté.

 Quelques jours après Corso Brunelleschi a connu une autre journée de lutte. Dans l’après midi une tentative d’expulsion a rassemblé plusieurs solidaires qui se sont retrouvés devant les murs pour soutenir une personne montée sur le toit pour résister. Slogans et gros pétards ont secoué l’indifférence du quartier. Non loin un photo-reporter collaborateur de l’un des pires journaux locaux a été encerclé et tabassé : il a sauvé son appareil mais a perdu ses lunettes. Lorsque le report de l’expulsion fut assuré les manifestants s’éloignèrent mais certains furent bloqués par la police et détenus plusieurs heures dans le commissariat voisin. Certains journaux écriront que pendant les arrestations, à l’autre bout de la ville , un groupe d’anarchiste a renversé les poubelles Corso Regina Margherita, Via Fiocchetto, via Cigna  et ont vidé des extincteurs sur l’asphalte. Au final les solidaires seront relâchés dans la soirée, sauf une compagnonne française qui sera raccompagnée à la frontière avec un décret d’expulsion. La nuit suivante une cabine électrique du Bureau de l’immigration de la préfecture de Turin part en feu. L’hypothèse des journaux rejette le hasard, et lie l’action aux récentes révoltes dans le CIE et à l’expulsion de la compagnonne française. Quoi qu’il en soit, l’incendie provoque 70 milles euros de dégâts et les bureaux sont connecté a un générateur de secours pour pouvoir fonctionner.

Depuis longtemps déjà, plusieurs quotidiens nationaux et locaux crient au scandale à propos des conditions de vie auxquelles sont soumis les retenus des CIE. À moins de vivre dans une bulle, tous sont informés de l’infâme réalité de ces lieux. Mais pas seulement. Les voix qui se lèvent ne se réduisent pas à la dénonciation de l’invivabilité, à la demande  d’une amélioration des conditions hygienico-sanitaires, aux accusations de violences auxquelles sont soumis les détenus. De plusieurs côtés parvient l’évocation de la fermeture des CIE, pas seulement la campagne LasciateCIEntrare (laisser nous rentrer) lancée par quelques journalistes de gauche, mais dans quelle direction vont ces propositions abolitionnistes ? Certainement pas vers un monde sans frontières. En outre, même si ces propositions légalistes de fermer les CIE passaient d’absurdes à écoutées, pensons-nous qu’il soit opportun d’attendre que cela arrive ? Si l’État décide de fermer les CIE, il ne le ferait qu’après s’être donné de nouveaux et plus fidèles instruments pour le contrôle et la répression des flux migratoires. L’unique manière de créer une faille irréparable dans le système d’oppression qui génére les CIE est celui de brûler définitivement et d’un coup la possibilité de l’existence même de ces lieux, et de multiplier les rapports subversifs qui se créent dans les fissures de la forteresse sociale.

 

 source : traduit de Invece – mensile anarchico – n°22 mars 2013 – italie

 

 

[Rome] Entretien avec un retenu de ponte galeria

Feu à Ponte Galeria

D. Salut. Lundi 18 février au CIE de Ponte Galeria à Rome est survenue une révolte. Tu peux nous raconter ce qui s’est passé et comment tu as été libéré ?

R. La révolte a éclaté parce qu’ils ont commencé à taper un mec nigérian qui cherchait à résister à son expulsion. Ils l’ont tapé de manière inhumaine. Pour eux nous ne sommes que des numéros. D’autres mecs nigérians ont alors commencé à foutre le bordel pour essayer de le défendre… et de là a éclaté la révolte.

D. D’après beaucoup de journaux, ce ne sont que des nigérians qui se sont révoltés, c’est vrai ?

R. Au départ, comme je disais, c’était les nigérians, mais après les autres aussi ont foutu le bordel, géorgiens, moldaves, marocains, albanais… Nous étions tous ensemble parce que nous vivions tous les mêmes conditions, nous avions tous le même problème : vivre. Ils ont arrêté des mecs nigérians parce qu’ils ont vu sur les vidéos que c’étaient eux les premiers… Après nous nous sommes tous unis et nous avons commencé à allumer le feu, qui s’est diffusé dans tout le centre. Les personnes se sont révoltées parce que de toute façon la situation est difficile ; qui n’est pas passé par Ponte Galeria ne peux pas s’imaginer ce que signifie y vivre. C’est insupportable, une vie qu’il n’est pas possible non plus de raconter.

D. Il y a donc eu cette révolte avec le feu. C’est la première que tu as vécue ? Depuis combien de temps es-tu à Ponte Galeria ?

R. j’y suis resté un mois. Les choses de ce genre ont déjà eu lieu deux ou trois fois, toujours avec le feu, car l’unique chose que peuvent faire les détenus pour exprimer leur rage est d’allumer des feux. Cette fois le feu s’est diffusé partout, il a pris le plastique (les vitres de plexiglas qui protègent les barreaux, pour empêcher les retenus de s’en approcher). Les flics n’ont pas réussi à intervenir avec la rapidité et la violence habituelles parce qu’il y avait des journalistes présents ce jour-là… Ils devaient être trop pris à se faire interviewer, qui sait. En plus ils ont dû attendre les docteurs pour soigner le mec nigérian qui devait être expulsé, ils l’avaient tapé fort…

D. Qu’est-ce qui a brûlé à part les panneaux de plexiglas ?

R. Les fils qui connectent les caméras de vidéo-surveillance… La structure n’a pas été rendue inutilisable, mais le système de contrôle ne fonctionne plus.

D. Tu me racontais que cette fois, à la différence d’autres, quelques heures après la révolte la police, la nuit, s’est trouvée en difficulté…

R. La police s’est mise en poste en pleine nuit, et nous a contraints à dormir lumière allumée pour pouvoir mieux contrôler si nous nous levions ou si nous tentions de nous échapper. Ils ont été contraints à rester tout le long du périmètre du centre, comme ils ne le font jamais de nuit.

D. A cause des dommages causés au système de surveillance ils ont vidé le CIE.

R. Oui, ils le vident entre transferts dans d’autres centres, expulsions, et personnes qui ont été libérées parce qu’elles n’ont pas été identifiées. Cependant, neuf mecs ont été arrêtés et quatre ou cinq mis à l’isolement. C’est difficile de comprendre précisément combien ont été transférés, combien expulsés et combien libérés. Au moment de la révolte à l’intérieur nous étions 150, maintenant il n’en reste que 30 ou 40… Je répète, je ne sais pas combien sont sortis au total. Avec moi sont sortis quatre ou cinq personnes.

D. A la différence d’autres révoltes, cette fois ils ne vident pas le CIE parce qu’il est inutilisable…

R. Avec cette révolte nous n’avons pas rendu le CIE moins utilisable qu’avant parce que avant aussi cet endroit était dégueulasse pour y vivre. Avec la crasse qu’il y a, nous étions enfermés dans cet endroit comme dans une cage à poule. Ils nous enfermaient dans les chambres à 21 heures et les ré-ouvraient à 9 heures du matin.

D. T’as raison, ce qui les intéresse c’est seulement les dispositifs de sécurité, les panneaux pour empêcher de s’échapper…

R. Oui c’est vrai, par exemple ce que je te disais qui est arrivé la nuit de la révolte, la lumière allumée pour nous surveiller, est arrivé d’autres fois, est une forme de punition. Quand il y a du bordel, des protestations, des révoltes, ils laissent les lumières allumées jusqu’à deux heures, trois heures du matin. C’est des lumières très fortes que nous ne pouvons pas éteindre et qui nous empêchent de dormir.

D. Ceci, plus qu’une punition est une torture. Les tortures du genre sont diffuses dans certaines prisons… Tu sais si des fois ils utilisent des psychotropes dans la bouffe ? A Turin, beaucoup des prisonniers dans le centre se sentent fatigués et confus après avoir mangé…

R. Non, ici à Rome non, ici ils laissent la lumière allumée et ils essayent de te fatiguer psychologiquement.

D. Évidemment, vu que le CIE de Turin est géré par la Croix-Rouge, ils ont des compétences médicales spécifiques, ils savent utiliser les psychotropes. A Rome je ne sais pas en quoi est spécialisée la coopérative Auxilium qui gère le centre…

R. Eux sont spécialisés dans le tour de clés.

 source : traduit de Invece – mensile anarchico – n°22 mars 2013 – italie

[Sri Lanka] 10 retenus s’évadent du centre de rétention de Mirihana – 15 avril 2013

Les évasions se sont succédées pendant quelques jours au centre de rétention de l’île de Mirihana dans la banlieue de Colombo, la capitale sri lankaise.  Au total, ce sont dix personnes qui se sont fait la belle. Une chasse à l’homme a été lancée par la police.

Le centre compte 70 places, mais plus de 100 étrangers y sont enfermés actuellement. Le ministère de l’Immigration et de l’Emigration sri lankais aurait donc décidé de libérer les étrangers arrêtés en échange de leur passeport,  jusqu’à ce que le problème de surpopulation soit résolu.

 

Traduction libre depuis la presse

[Mellila] 70 migrants parviennent à franchir la frontière lors d’un assaut collectif – 25 avril 2013

Entre 150 et 200 migrants ont organisé un assaut massif pour franchir la barrière grillagée séparant le Maroc de l’enclave espagnole de Melilla. 70 personnes sont parvenues à passer la frontière ce qui a donné lieu à un affrontement avec la police.
Six immigrants auraient reçu des soins pour « contusions légères » et un policier ainsi que deux gardes civils pour « contusions légères et morsures ».
La préfecture a annoncé le renforcement des effectifs de la garde civile…

Quatre jours plus tôt, dix migrants armés de couteaux et de bâtons avaient, eux aussi, réussi à entrer dans l’enclave.

Repris librement de la presse

[Turin] Paolo « libre », Greg et Marta aux arrestations domiciliaires – 25 avril 2013

Paolo est sorti de la prison de la Vallette  le 17 avril et a été « libéré » le 24 , Greg et Marta sont hors les murs depuis le 22. Ces deux derniers sont aux arrestations domiciliaires, avec toutes les restrictions (ce qui signifie interdiction de sortir, de visite, de tout contact avec l’extérieur par téléphone ou internet, possibilité d’une visite des flics à tout moment du jour et de la nuit). Une prochaine audience aura lieu lundi 29.

–> pour rappel : arrestation de compagnon-e-s à Turin et Lettre de Greg

[Modène] Rassemblement solidaire devant le CIE – 20 avril 2013

Samedi, à partir de 15 heures, s’est tenu un rassemblement devant les murs du centre de Modène. Une soixantaine d’anti-racistes ont crié des slogans et salué au mégaphone les internés, qui ont répondu avec du bruit et des cris. Le rassemblement a duré une heure et demi, puis un petit cortège a traversé le centre de la ville, une banderole en tête : Solidarité avec celles et ceux qui se rebellent dans les CIE, Fin des lagers d’État. Des interventions et des slogans ont suivit toute la via Emilia, interrompant le placide après-midi de shopping

La lutte contre ces lagers ne s’arrête pas là, un appel pour une autre journée de lutte et de solidarité devant les murs du CIE de via la Marmora a Modene suivra prochainement.

Des CIE et des prisons, on ne veut en voir que des ruines. Liberté pour tous et toutes !

traduit de nociemodena

[Melilla] Une quinzaine de migrants affrontent les flics pour passer la frontière – 21 avril 2013

Six policiers espagnols ont été blessés dimanche en voulant empêcher une quinzaine de migrants d’Afrique subsaharienne armés de bâtons et de couteaux d’entrer à Melilla depuis le Maroc par la voie maritime, ont annoncé les autorités de cette enclave espagnole.

Les policiers ont dû recevoir des soins pour des hématomes et des égratignures, ont précisé les autorités espagnoles dans un communiqué.

Cinq migrants ont été arrêtés à leur arrivée à la plage de San Lorenzo à bord d’une barque, mais dix autres ont pu échapper aux policiers et entrer à Melilla.

Les autorités de Melilla ont souligné « l’attitude ouvertement violente des migrants ». Ceux-ci, « qui portaient des bâtons et des couteaux, ont empêché les gardes-côtes de les intercepter en mer », et ont affronté les policiers qui les attendaient à terre lorsqu’ils ont abordé.

En mars, environ 150 migrants ont forcé la clôture qui sépare Melilla du territoire marocain et une cinquantaine d’entre eux sont parvenus à pénétrer dans l’enclave.

Une vingtaine de personnes, dont deux policiers espagnols avaient été blessés lors de cet incident, selon les autorités espagnoles de Melilla.

Selon l’Association marocaine de défense des droits de l’homme, 25 personnes avaient été blessées, dont un Camerounais âgé de 30 ans, décédé de ses blessures le 18 mars à l’hôpital de Nador au Maroc.

 

Repris de la presse

 

[Grèce] Répression sanglante d’une rébellion d’ouvriers agricoles à Manolada – 17avril2013

Répression sanglante d’une rébellion d’ouvriers agricoles à Manolada – 17avril2013

Mandatés par le propriétaire d’un champs de fraises du Péloponnèse, trois superviseurs du travail des travailleurs immigrés, ont ouvert le feu sur ces derniers. Vingt-sept personnes ont été blessées, dont quatre grièvement. Ceux-ci faisaient partie d’un groupe de 200 immigrés originaires du Bangladesh qui s’en sont pris à leurs employeurs en réclamant des salaires impayés depuis six mois

Le jour suivant, certains des migrants hospitalisés à Patras ont été arrêtés pour défaut de permis de séjour valable et transférés en centre de rétention pour être expulsés.

D’importantes forces de police ont été dépêchées sur les lieux pour empêcher tout nouvel incident tandis qu’une manifestation antiraciste devrait avoir lieu jeudi près du village de Manolada.

Plusieurs milliers de travailleurs migrants (dont beaucoup seraient sans papiers) sont employés comme cueilleurs de fraises dans la région. Ce n’est pas la première fois que les immigrés de Nea Manolada protestent contre leurs conditions de travail. En effet ce village avait déjà été au printemps 2008 le théâtre d’importantes manifestations et de grèves de migrants qui protestaient contre leurs conditions de travail, dans des serres où la température atteint 40 degrés, et leurs salaires d’esclaves.

En 2009, deux éleveurs grecs avaient été arrêtés pour avoir attaché à leur moto et traîné sur une route du village deux immigrés bangladais. Ils les soupçonnaient d’avoir volé leurs moutons.

repris librement de la presse (source juralib)

Version arabe de la brochure Sans papiers S’organiser contre l’expulsion – Que faire en cas d’arrestation ?

 

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http://sanspapiers.internetdown.org

[Turin] Lettre de Greg depuis la prison de la Valette

Le jeudi 11 avril au matin, à Turin, la Digos (police politique) arrête six personnes : une dans son appartement vers 7h, puis quatre autres dans les rues autour de l’Asilo occupato. Une septième arrestation a lieu le lendemain. Trois personnes sont incarcérées dès jeudi à la prison des « Valette » : Marta, Greg et Paolo. Deux autres se sont vues signifier une mesure leur interdisant de rester à Turin et dans sa province. Les deux dernières sont relâchées. Les trois incarcéréEs, sont inculpéEs dans la même enquête : le 28 février, lors d’une initiative solidaire devant le CIE (centre de rétention) de Turin, elles sont accusées d’avoir pris à partie un journaliste de Torino Cronaca. Il s’agit d’accusations de violences, menaces et vol aggravé des lunettes de celui-ci. Ces derniers mois, les retenus du CIE se sont révoltés à plusieurs reprises, et ont détruit près des trois quarts de la structure (essentiellement les cellules). Au total, cet enquête concerne six personnes : une d’entre elles est encore recherchée par la Digos avec une mesure d’incarcération pour les mêmes chefs d’inculpation. Avec cette répression, la police souhaite faire payer le soutien de dehors aux dernières révoltes de dedans. Diverses actions se sont succédées les jours suivants (manifestations, sabotages,etc) en solidarité avec les personnes arrêtées et contre les CIE.

Greg a écrit une lettre qu’il nous a demandé de publier dont voici la traduction :

« Salut à tous et à toutes, amis et amies, compagnons et compagnonnes.

Tout d’abord un clin d’oeil à celles et ceux qui pensent à moi. Ce n’est pas parce que je suis dans ces geôles que je n’ai pas donné de nouvelles. Comme disait un des deux de Foggia en cavale, « pour envoyer une lettre il faut avoir quelque chose à dire. » Alors c’est parti.

Je suis bien en cellule avec Paolo (ndt : Paolo est sorti de prison le 17 avril et placé sous assignation stricte à résidence -arresti domiciliari-). Quand la DIGOS m’a arrêté, à deux pas de l’Asilo Occupé, j’ai essayé de me sortir de leurs griffes. Je n’ai pas réussi vu que j’étais à peine réveillé et qu’on était mal organisés avec les amis (trop peu compacts). Bordel, ce qu’ils courraient vite ces cinq digos de merde.

Après un passage à l’hôpital, plus pour leur casser les couilles que pour les petites blessures que j’avais, et les contraindre à me trimballer ici et là au lieu de les laisser retourner dans la rue faire leur travail infâme, ils m’ont emmené à la prison des Valette. Dans la section des nouveaux arrivants, il y a eu un peu de complicité, née à travers des récits de choses qui se sont passées dans nos quartiers, des techniques de la police pour nous arrêter, du partage du peu que nous avions en arrivant (je suis devenu un super champion de la chasse au mégot) et des parties de foot sous le soleil du printemps.

Le premier saluto (ndt : rassemblement devant la taule en solidarité) nous l’avons bien entendu mais pas vu, ils ont bien choisi le côté du couloir où nous enfermer. Les gars de la section remercient les gens venus nous saluer, ça casse un peu la routine d’ici. Il semble que les inculpations pour rapina (ndt : vol avec violence) et association de malfaiteurs sont à la mode ici et servent pour tout et n’importe quoi. Les peines encourues par nos compagnons sont lourdes. Mais dans notre cas, il s’agit de toute façon d’un vol de merde.

Bon, je vais m’arrêter là. Patience, force et vengeance, dedans comme dehors, avec rage et amour.

Greg, qui a hâte de vous retrouver avec un tiramisu ou une pierre à la main. Le 12 avril 2013

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Mise à jour, le 14 avril 2013.

Il y a des gens dans les bureaux de la gendarmerie à Paris, section anti-terroriste (ndt : il s’agit du BLAT – Bureau de Lutte Anti-Terroriste), qui ont exprimé à leur façon une certaine attention à mon égard. En date du 13 avril, il m’a été notifié par le procureur de la république de Turin M. Pio une commission rogatoire (CR) émanant du juge d’instruction Didier Suc qui exerce à Toulouse, en France.

Cette requête de CR datant de juin 2012 concerne une enquête (ndt : encore et toujours cette maudite affaire de Labège)dans laquelle, en novembre 2011, quatre compagnons et compagnonnes françaises ont été incarcéréEs, une compagnonne soumise à un contrôle judiciaire (obligation de signer) et un compagnon coincé par le statut de témoin assisté (obligation de témoigner s’il ne veut pas d’embrouilles avec la justice). L’instruction n’est pas encore close, les chefs d’accusation concernent une action commise en juillet 2011 avec dégradations et violences contre des bureaux et le personnel qui y travaille, liés aux prisons pour mineurs (pour plus d’informations, vous pouvez chercher sur internet – en italien sur informa-azione.info et en français sur pourlaliberte.noblogs.org).

En pratique, la commission rogatoire du juge d’instruction français à la justice italienne permet à la police italienne (DIGOS) de « m’interroger dans le but d’établir ma possible participation aux faits et mes liens avec les misES en examen » et de, « si j’y consent, effectuer un prélèvement salivaire (ADN) sur kit FTA » pour le remettre immédiatement à la police française. Enfin, la CR demande également que la police française puisse assister à l’interrogatoire. Pour être clair : il ne s’agit pas d’un mandat d’arrêt européen. Avec cette lettre, je voulais préciser que je me contrefous de ce mouvement de la police française, que je ne collaborerai pas à leur commission rogatoire, que j’insiste sur ma solidarité avec les inculpés et les inculpées, que les catégories de « mouvance ultra-gauche toulousaine » ou « mouvance anarchiste » seront toujours à mes yeux des termes qui démontrent que le pouvoir ne comprendra jamais combien mon individualité est plus riche et belle que leur sale monde de catégories/cages.

Feu à toutes les prisons, liberté pour tous et toutes, il faut détruire les frontières physiquement et mentalement.

A mes compagnons et compagnonnes : faites attention à vous.

Et mes ennemis, je veux qu’ils sachent : je les emmerde sincèrement. »