Sans Papiers Ni Frontières

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Contre les frontières et leurs prisons

[Belgique] De l’air, de l’air ! – rassemblement à Anderlecht et à Molenbeek – 21 décembre 2013

Voici le tract distribué lors d’un rassemblement « itinérante » à Anderlecht et à Molenbeek, ce samedi dernier (21 décembre). Quelques feux d’artifice ont été tirés afin d’attirer un peu l’attention, une banderole disant clairement contre quoi on lutte, un haut parleur accompagnait le tout.

Réactions motivées, intéressées et solidaires. Continuons à nous battre dans la rue.

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DE L’AIR, DE l’AIR !

Ce monde carcéral qui nous empêche de respirer

Il y a deux semaines, un homme est retrouvé mort dans des circonstances suspectes, dans son lit, dans une cellule, enfermé dans la prison pou étrangers à Bruges. Vivre derrière des barreaux, mourir derrière des barreaux, il nous faut détruire le monde qui crée de tels possibles.

L’air qu’on respire est pollué… Cette pollution, c’est l’odeur de l’économie, des uniformes, la puanteur de l’enfermement, de l’oppression quotidienne, de l’acceptation et de la dépression. Et cette ambiance provoque des troubles respiratoires : une agression pulmonaire, une bronchite chronique, une espèce d’allergie au monde qui nous écrase : du stress.

Détruire ce qui nous détruit pour prendre l’air

On nous dit que si on est malade il faut aller voir le docteur, avaler des médicaments pour calmer la douleur, et se résigner à vivre avec la maladie. Mais quoi qu’il en soit, si les causes restent intactes, les symptômes reviendront à chaque fois.

Il y a certains remèdes qu’aucun docteur ne prescrira. Démolir les cages, scier les barreaux, voilà des médications qui font du bien ! Comme ces cinq hommes qui s’envolent des centres fermés de Merksplaset de Steenokkerzeel. À Vottem, une personne tente de mettre le feu à sa cellule. Et tout dernièrement, un prisonnier réussit à s’échapper de la prison de Lantin, avec la complicité de codétenus solidaires.

À Bruges, suite à la mort suspecte de l’homme, tous les prisonniers se mettent en grève de la faim, et seront suivis par d’autres dans les centres fermés de Vottem et Steenokkerzeel. Des manifestations de solidarité ont lieu devant ces deux prisons pour étrangers et les matons se font insulter par les manifestants pendant le tour de garde.

Le feu qui donne de l’oxygène

Pendant des années, les prisons et les centres fermés belges ont connu la rébellion et la révolte : des ailes entières ont été mises hors services par le feu. Dehors aussi, des émeutes et des attaques solidaires ont donné de l’oxygène à tous ceux qui ne veulent pas accepter cette prise en otage permanente.

L’État réagit et construit des zones d’isolement dans les prisons, comme les QHS de Bruges et Lantin. Ces deux lieux indescriptiblement cruels ont été dévastés à plusieurs reprises, mais rénovés à chaque fois. Dans les camps de déportation aussi, les révoltés sont mis en isolement, transférés ou expulsés au plus vite, pour empêcher la contagion de l’agitation. Ce sont toutes des armes dans les mains du système pénitentiaire qui visent à rendre dociles les prisonniers récalcitrants à coups de bâtonet à faire peur à tous. C’est dans la même logique que l’État prévoit 9 nouvelles prisons en Belgique.

L’État cherche donc à nous couper le souffle pour de bon. Certains ne se laissent pas faire, et passent à l’offensive. Si on pense à la nouvelle prison de Marche-en-Famenne, ultra-sécurisée, n’oublions surtout pas la tentative de sabotage du chantier en 2012 quand six bombes incendiaires sont placées dans les grues. Et encore, quelque peu après l’ouverture de cette nouvelle prison en novembre 2013, les vitres du bureau des architectes morbides (CERAU) qui ont dessiné cette taule volent en éclat. C’est comme prendre un bol d’air frais.

Respiration contre résignation

Si le pouvoir nous veut dociles, expulsés ou enfermés, c’est à nous de nous mettre en forme et de nous préparer à la bataille. S’il veut que Bruxelles soit bien nettoyée et sécurisée pour qu’elle soit agréable aux eurocrates, diplomates, riches et businessmen, c’est à nous de rester dignes, de garder la tête haute, et de ne pas les laisser avancer sans qu’ils se heurtent à nous. Entraînons nos poumons à respirer librement.

Saboter les rafles, se battre contre la construction de la plus grande prison de l’histoire belge, à Bruxelles, aller à l’offensive…Tout ça est possible, en s’organisant en petits groupes de confiance, avec un peu d’agilité, de détermination et d’inventivité. En se reconnaissant aussi entre révoltés assoiffés de liberté. Respirons un grand coup et faisons un maximum de bruit, foutons un beau bordel !

Des cibles, on peut en trouver partout. Les entreprises qui gagnent du fric avec l’enfermement (Sodexo, Fabricom …) ou celles qui construisent des nouvelles prisons (BAM, Valens, BESIX, Willemen, DENYS …), mais aussi les chantier destinés au profit et confort des riches, et les bureaux où travaillent les gentils monsieur-dames qui prennent les décisions et conçoivent des plans pour affiner l’exploitation, l’écrasement et l’expulsion des indésirables (l’Office des étrangers, la Régie des bâtiments, l’UE, le ministère de la Justice, l’ONEM et tant d’autres).

N’oublions jamais : chaque acte inspiré par le désir de liberté parle au cœur de celui qui cherche la même chose. Soyons solidaires, jusqu’à leur couper la respiration, jusqu’à ce qu’on soit libres, libres comme l’air.

repris sur la cavale

[Madrid] Rassemblement devant le CIE de Aluche – 30 décembre 2013

Comme chaque année et cherchant à maintenir l’habitude de se rejoindre le 30 du mois face au CIE de Aluche, nous nous rassemblerons devant les portes de la prison pour  apporter une nouvelle fois notre soutien aux personnes qui sont enfermées dans les centres d’internement pour étrangers et dans les prisons du monde entier.

Nous espérerons que les prisonnier-e-s nous entendront, ainsi que les assassins qui les enferment, pour leur montrer qu’il y a dehors des gens qui se solidarisent avec les prisonnier-e-s et que ceux qui font qu’ils/elles sont enfermé-e-s ici le garde à l’esprit.

30 décembre 2013, à 18h, avenue de los Poblados, près de la station métro et renfe de Aluche.

NI C.I.E.’s, NI GRILLES, NI PRISONNIERS, NI PRISONNIÈRES.

Mort à l’État et vive l’anarchie

Traduit depuis CSO La Gatonera

[Hambourg]Solidarité avec les réfugiés ! Solidarité avec la grève lycéenne ! – 12 décembre 2013

Sans frontières ! Solidarité avec les réfugiés ! Solidarité avec la grève lycéenne à Hambourg !

Voici un tract qui a été distribué à Hambourg lors de la grève des lycéen.ne.s en solidarité avec les réfugiés. Plus de 3000 lycéen.ne.s se sont impliqué.e.s contre les menaces provenant des établissements, du gouvernement et des parents.

schuleblack

Le 12 décembre 2013, des lycéen.ne.s se sont mis en grève à Hambourg. Ils luttent contre l’expulsion imminente de réfugiés du groupe ‘Lampedusa’. Le jour de la grève les lycéen.nes ont lancé un appel à ne pas se rendre en cours et à se joindre à la manif contre la politique du gouvernement de ségrégation et de contrôle raciste.

Même si nous ne sommes plus lycéen.nes, nous nous sentons lié.e.s à l’action. Nous pouvons clairement nous rappeler combien il est difficile, dans le cadre d’une journée au bahut, de mettre en œuvre vos idées en action et nous trouvons que le moment d’auto-organisation entre lycéen.nes méritent déjà notre solidarité et notre soutien. Nous trouvons important de lutter pour les ami.e.s, les camarades de classe et tou.te.s les participant.es persécuté.e.s, sans que ce sujet soit inclus dans le programme d’études.

Lorsqu’il s’agit d’une grève sur les expulsions de personnes, c’est qu’il existe donc des frontières dans ce monde. Le « droit » existant de dire qui a le droit de faire partie de la société et qui doit quitter de nouveau le pays, nous ne voulons pas accepter le « droit » de nous punir et de nous éduquer quand nous faisons ce que nous pensons être juste. Nous voulons l’auto-détermination et vivre librement et cela est possible uniquement dans un monde sans frontières, sans lois, sans papiers et tout ce que les autorités mettent en place pour garder le contrôle sur nos vies.

Le fait que les lycéen.ne.s soient menacé.e.s d’absentéisme et des conséquences nous montre seulement quel rôle joue l’école comme institution d’Etat dans le conflit. Dans ce système, sera uniquement accepté si tout fonctionne bien, ce qui signifie refuser la grève sauvage. Pendant un moment, et sans demander la permission, il est prévu que nous partions et ce qui signifie par conséquent d’interrompre le bon fonctionnement de la normalité, du racisme et de l’oppression des gens au quotidien.

Nous laissez pas intimider ! Vous êtes fort.e.s lorsque vous bloquez ensemble avec vos ami.e.s. Pour ce faire, vous n’avez pas besoin de parti ou d’organisation, qui parlent à votre place quand vous voulez élever votre voix.

Pour une résistance auto-organisée ! Pour le refus de la normalité raciste !

Contre toute autorité et toute oppression !

Traduit de l’allemand par le chat noir émeutier de no prison no state, 17 décembre 2013

[Belgique] Feu aux centres fermés et aux prisons ! – 5 décembre 2013

Feu aux centres fermés et aux prisons !

Ce 5 décembre, un prisonnier du centre fermé pour sans-papiers de Bruges est retrouvé mort dans sa cellule. S’il n’y a pas encore d’éclairage sur les circonstances de sa mort, le constat est là, une nouvelle personne a succombé à l’enfermement.

Suite à cet événement, tou-te-s les incarcéré-e-s du centre ont entamé un grève de la faim, dernier recours des sans-voix. C’est le moyen de lutte de celles et ceux qui n’ont plus rien à perdre. Le mouvement de grève s’est rapidement propagé vers d’autres centres, au 127Bis et à Vottem.

Morts, grèves de la faim, rapatriements forcés, contrôles incessants, la vie est, pour de nombreuses personnes, insupportable et le climat devient explosif.

Que faire ? La réponse est tellement évidente qu’il paraît absurde de la répéter une énième fois. Mais bon, allons-y. Il faut dès aujourd’hui abolir les frontières et cesser le flicage et les humiliations, en finir avec la complaisance à l’égard de l’Etat raciste et assassin, de l’Europe repliée sur elle-même et responsable d’hécatombes au nom de la préservation d’un soi-disant bien-être économique et sécuritaire.

L’émeute généralisée n’est donc pas loin, et tant mieux si, enfin, elle fout aux ordures toute cette merde et dissipe cette puanteur rance et toxique qu’exhalent la placidité et l’aveuglement des bien-lotis !

Pour plus d’infos sur la lutte contre les centres fermés, retrouvez d’autres textes et nouvelles sur www.gettingthevoiceout.org

Trouvé sur La Cavale

D’une prison à l’autre, Solidarité avec Ibrahim El Louar

RDV pour l’audience devant le JLD, lundi 9 décembre 2013 à 14h au tribunal annexe de Meaux, qui jouxte le centre de rétention du Mesnil Amelot

 

D’UNE PRISON À L’AUTRE    

Solidarité avec Ibrahim El Louar

 

Le 16 décembre 2012, cinq personnes tentent de s’évader du centre de rétention de Palaiseau. Quatre vont y parvenir mais la cinquième personne, Ibrahim, va rester dans les mains de la police qui le passera à tabac. Il est placé en garde-à-vue puis déféré devant un juge deux jours plus tard accusé d’avoir ceinturé un flic pour lui voler un badge magnétique qui a permis aux autres de se faire la belle. Il est ensuite incarcéré en préventive à Fleury-Mérogis. En centre de rétention, l’évasion n’étant pas un délit, les flics et les juges cherchent donc à charger sur d’autres chefs d’inculpation.

Le 2 avril 2013, les juges de la cour d’appel de Paris l’ont condamné à 1 an de prison ferme pour les violences aggravées sur agents dépositaires de l’autorité publique en état de récidive légale. En première instance, sans avocat et sans interprète, il avait été condamné à 2 ans. Quand on est isolé, étranger et qu’on ne parle pas français, sans avocat, la justice écrase d’autant plus.

Mercredi 4 décembre il arrivait en fin de peine et devait être libéré. Malheureusement ce ne sont pas ses proches qui l’ont accueillit à la sortie, mais une escorte de la PAF qui l’a transféré au centre de rétention du Mesnil Amelot.

À Fleury Mérogis, une brigade spéciale de flics est chargée de veiller à ce que les sans papiers incarcérés soient expulsés ou enfermés en centre de rétention à l’issue de leur peine.

Lundi il devrait passer devant le JLD, situé dans la nouvelle cité judiciaire qui jouxte le centre du Mesnil Amelot, dans l’anonymat de la zone aéroportuaire Roissy Charles de Gaulle

D’une taule à une autre, de la prison pour étrangers à la maison d’arrêt, du centre de détention au centre de rétention, le chemin est tout tracé. Le pouvoir profitera toujours des révoltes, des tentatives d’évasions, des refus d’embarquement, pour enfermer toujours plus les récalcitrants. Et inversement, quand on sort de prison et qu’on est sans papiers, ce qui nous attend c’est dans la plupart des cas, le centre de rétention et l’expulsion.

Quand on est enfermé dans un centre de rétention, quand tous les recours juridiques sont épuisés et quand s’annonce l’expulsion, la seule alternative c’est l’évasion et la révolte. C’est pourquoi ces histoires se répètent : en 2012, 58 personnes ont réussi à se faire la belle des centres de rétention. À Hendaye (sud-ouest) le 1er novembre 2013, deux personnes se sont évadées. Une a été rattrapée et condamnée à 1 mois de prison tandis que l’autre court toujours.

A Marseille, en mars 2011, des retenus ont mis le feu à la prison pour étranger du Canet. Après des mois d’instruction, de prison et de contrôle judiciaire, deux anciens retenus ont été condamnés le 26 novembre 2013 à un an de prison ferme.

Pour Ibrahim comme pour les autres, il est important d’être solidaire avec celles et ceux qui se révoltent pour leur liberté, qu’ils soient innocents ou coupables. Car tant qu’il restera des prisons, des papiers et des frontières, la liberté ne restera qu’un rêve.

À BAS TOUTES LES PRISONS

evasionpalaiseau@riseup.net

Ibrahim, retour à la case départ – 4 décembre 2013

Ibrahim, retour à la case départ

Incarcéré suite à l’évasion du centre de rétention de Palaiseau le 16 décembre 2012, Ibrahim avait été condamné à 1 an de prison ferme par la cour d’appel de Paris le 2 avril 2013. Aujourd’hui, mercredi 4 décembre il arrivait en fin de peine et devait être libéré.

Malheureusement il n’est pas sorti seul de la prison de Fleury Mérogis, mais sous escorte de la PAF pour être transféré au centre de rétention du Mesnil Amelot. Il avait déjà été condamné à une Interdiction du Territoire Français de trois ans le 5 novembre 2012.
À Fleury Mérogis, une brigade spéciale de flics est chargée de veiller à ce que les sans papiers incarcérés soient expulsés ou enfermés en centre de rétention à l’issue de leur peine.

Lundi il devrait passer devant le JLD, situé dans la nouvelle cité judiciaire qui jouxte le centre du Mesnil Amelot, dans l’anonymat de la zone aéroportuaire Roissy Charles de Gaulle. Soyons nombreux et nombreuses pour le soutenir (heure à confirmer, mise à jour ici).

Reçu par mail

[Marseille] Un rapide compte rendu du procès des inculpés de l’incendie du centre de rétention du Canet

Un rapide compte rendu du procès des inculpés de l’incendie du centre de rétention du Canet

Ce Mardi 26/11/2013 les inculpés de l’incendie du centre de rétention du Canet étaient convoqués à 14H au Tribunal de Grande Instance de Marseille afin d’être jugés pour des faits de « destruction de biens d’autrui par des moyens pouvant entraîner la mise en danger des personnes », en l’espèce de plusieurs départs de feu survenus à l’intérieur du centre de rétention administrative du Canet (Marseille) en mars 2011. Après avoir effectué quelques mois de prison préventive en 2011 juste après les faits (3 mois pour l’un et 4 mois et demi pour l’autre), les deux inculpés étaient sorti sous contrôle judiciaire. Hier, ils comparaissaient donc « libres ». Enfin, « libres » autant que peuvent l’être des sans-papiers qui passent au tribunal, entourés de dizaines de flics de tous bords, présents devant le tribunal, dans les couloirs et dans la salle !

Les collectifs de soutien aux inculpés avaient appelé à un rassemblement devant le tribunal. Nous étions une centaine de personnes venues en soutien. La (petite) salle était remplie et il y avait aussi du monde dans la rue. Mais les plus nombreux à s’être mobilisés étaient en fait les flics. Devant le parvis du tribunal on ne comptait pas moins d’une dizaine de car de CRS. Devant l’entrée et au portique, les bleus étaient aussi nombreux que leurs barrières. Dans les couloirs et dans la salle, leur présence était tout aussi remarquable. Un dispositif disproportionné qui n’a presque pas manqué d’atteindre son but : mettre la pression !

Au début de l’audience, la cour a vite fait renvoyé toutes les affaires qui devaient être jugées ce jour là. Le procès des inculpés a donc débuté assez tôt. Lors du procès, les « coups de théâtre » se sont enchaînés. En premier lieu la directrice du centre de rétention du Canet, originellement appelée comme témoin à la barre, demande à se constituer partie civile pour un euro symbolique. L’avocat et le juge lui font remarquer que c’est pas très réglo, étant donné que le fait de faire cette demande lui permet d’assister à toute l’audience, tandis que le témoin à la barre lui, ne rentre dans la salle que lorsqu’il est interrogé. N’ayant néanmoins pas les moyens légaux de l’en empêcher, la cour lui permet d’assister à l’audience. Le juge commence alors un rappel des faits, dans lequel il insiste sur le nombre des victimes de l’intoxication provoquées par l’incendie et sur les lésions subies. Puis il énonce les éléments à charge contre les retenus, et fait la lecture de tous les témoignages qui interviennent dans la procédure, pour incriminer les deux inculpés. Ça paraît pas gagné d’avance… Le juge appelle les témoins à la barre. En premier lieu la directrice du centre. Celle ci n’était pas présente ce jour là. Cependant, elle renseigne la cour sur le fonctionnement du centre, le système de vidéo surveillance et évidemment sur le profil des inculpés, dont l’un est décrit comme un sujet « à problème », violent et anxieux, qui avait d’ailleurs menacé de mettre le feu au centre quelques temps plus tôt, devant un officier de police qui semblait le provoquer. L’avocat interroge à son tour la directrice du centre. Il lui fait le rappel de plusieurs rapports défavorables antérieurs à l’incendie, émanant de différentes autorités publiques, concernant les conditions de rétention au Canet, notamment le manque de personnel ou l’absence d’exercice incendie réguliers. Il lui demande si depuis l’incendie, des exercices d’évacuation ont été mis en place, avec les retenus et les associations travaillant sur place. Elle répond oui. Au passage, le juge ne manque pas de lui faire remarquer qu’il la trouve un peu trop sur la défensive et qu’elle devrait être plutôt confiante qu’anxieuse de donner son concourt à l’établissement de la vérité. Elle se rassoit, mouchée. Le second témoin entre. Il s’agit d’une chargée d’opération de l’association Forum Réfugiés, présente dans le centre de rétention du Canet. Quand l’avocat l’interroge sur la visite de l’un des inculpé dans son bureau, le jour de l’incendie, elle le décrit comme un individu calme. Ce qui dénote avec le portrait que les multiples témoignages et la directrice du centre, ont dressé de lui jusqu’à présent. Elle insiste même sur le fait que souvent, les retenus sont anxieux quand ils passent par leurs bureaux. Qu’il n’est pas rare que certains retenus menacent de s’auto-mutiler, de se suicider ou de détruire le centre. Que ce jour là, l’inculpé qui est venu la voir était calme et pas menaçant. Lorsque l’avocat lui demande s’ils participent à des exercice d’évacuation depuis l’incendie, celle-ci répond que non. A ce moment là, toute la cour lève les yeux au ciel en regardant la directrice du centre.

Après ce coup de théâtre, c’est au tour du proc’ de faire son réquisitoire. Et là, nouveau rebondissement: ce réquisitoire sonne à certains moments comme un plaidoyer contre les conditions dans les centres de rétention. La proc’ commence son réquisitoire par un rappel sur la gravité des faits et la mise en danger d’autrui que de tels faits pouvaient entraîner. Puis elle se lance dans une contextualisation de ces faits. Elle explique « le contexte de politique migratoire répressive en Europe, l’Europe forteresse, la libre circulation des marchandises mais pas des personnes, la répression des migrations qui n’empêchera jamais hommes, femmes et enfants de fuir la guerre, la misère économique ou une absence de perspective, la criminalisation de l’irrégularité administrative, l’injustice de la répression que subissent des gens qui se sont intégrés ici, ont fondé une famille, travaillent… » Elle salue « le travail des associations qui veillent à ce que les droits soient respecté, et leur vigilance qui permet de ne pas basculer vers une situation trop répressive. Ces associations qui n’ont pas manqué de soutenir les inculpés et qui sont aujourd’hui présents dans la salle ». On sait pas trop si c’est de nous qu’elle parle, mais on hallucine complet !!!!

Elle cite ensuite un rapport du Sénat, datant de 2006, qui critique les conditions de rétention administrative en France et épingle notamment Marseille. Puis un rapport du contrôleur général des lieux de privation de liberté, datant de 2010, qui épinglait le centre de rétention du Canet, sur l’encadrement des retenus, l’hygiène, le soutien psychologique, la distribution de vêtements et le système de mise au norme anti-incendie. Elle rappelle tout de même que « rien ne justifie de tels modes de protestation, d’autant plus lorsqu’ils sont le fait d’individus et qu’ils ne s’inscrivent pas dans un contexte d’émeute collective, au contraire de l’incendie de Vincennes, qui s’était déclaré lors d’une révolte collective répondant à la mort suspecte d’un retenu ». On a beau ne pas être d’accord avec son analyse des faits, c’est tout de même l’hallu de l’entendre quasi légitimer l’incendie du CRA de Vincennes ! Elle finit son réquisitoire par une enquête de personnalité au cours de laquelle elle insiste sur la manifeste volonté d’intégration des deux inculpés. Elle les déclare coupables des faits qui leurs sont reprochés et requiert à leur encontre 1 an de prison ferme assorti d’un sursis simple de 4 mois. On nage toujours en plein délire car on s’y attendait pas du tout.

L’avocat commence son plaidoyer. Il évoque le contexte politique du printemps arabe en mars 2011, les vagues d’immigrations Tunisiennes qui s’en sont suivi et la gestion expéditive de ces vagues de migrations par l’état français. Il évoque l’infamie des conditions de rétention en général, à Marseille, en particulier (lui aussi cite ces fameux rapports du Sénat et du contrôleur des lieux de privation de liberté), à ce moment là précisément. Puis il rentre dans le vif de son sujet, qui semble être de prouver à la cour, que l’État français a voulu traiter cette affaire dans la plus grande urgence, désignant arbitrairement deux coupables, et constituant, en l’absence de preuve tangibles, un dossier à charge. Il commence par rappeler que les inculpés ont faillis être jugés en comparution immédiate, alors qu’il paraissait évident que les présumés coupables avaient été désignés à la va vite et qu’il fallait une enquête plus poussée. Il insiste sur le manque d’expertise technique dans le dossier (absence d’analyse de la résistance au feu des matériaux présumés avoir été utilisé pour allumer le feu, absence d’analyse sur la propagation de l’incendie). Il relève les irrégularités ou incohérence de la plupart des PV du début de l’enquête (absence d’avocat lors des auditions, absence des questions des flics dans certains PV, dénonciations qui se font lors d’auditions irrégulières). Il évoque encore une fois une période de printemps arabe où les tensions entre nationalité s’exacerbent (on sait pas trop d’où il sort ça mais bon…). Il relève le fait que les deux inculpés soient les seuls Tunisiens présents dans cette affaire (les dénonciations venant principalement des autres personnes arrêtées après l’incendie, et mises hors de cause après ces dénonciations). Il finit en disant que la justice n’a aucun élément de preuve tangible pour déclarer coupables les deux inculpés, que ces présumés coupables ont peut-être été désignés pour expédier au plus vite une affaire qui emmerdait l’État. « Car si des coupables n’étaient pas désignés au plus vite, c’était peut-être l’État qui serait responsable ». La cour suspend l’audience avant le délibéré. Pendant ce laps de temps, la salle et le palais de justice se remplissent de CRS en tenue. Ils envahissent les couloirs et encerclent la salle. L’audience reprend. L’un des inculpé manque à l’appel. Tu m’étonne, vu le nombre de flics, comment ne pas prendre peur ? Le verdict tombe : 12 mois fermes pour les deux, un aménagement de peine sous forme de bracelet électronique pour l’un, une convocation pour un RDV avec le Juge d’Application des Peines pour l’autre. L’autre n’étant pas là, le juge a dit qu’il lui ferait parvenir cette convocation par courrier. Chacun a donc pris un an ferme. Il se pourrait qu’il y ait des aménagements de peine ou des remises de peine si ils travaillent. Le collectif de soutien fait donc appel à tous ceux qui pourraient soutenir en offrant un contrat de travail aux ex-inculpés. Pour toute proposition : soutien6cra@riseup.net

Trouvé sur Marseille Infos Autonomes

[Libye/UE] « Liaisons dangereuses » contre « les invasions barbares » : la mission EUBAM

Libye / Union européenne, « Liaisons dangereuses » contre « les invasions barbares » : la mission EUBAM

On pourrait croire qu’il s’agit du scénario du nouveau mauvais film en mode grosse production américaine à plusieurs milliers d’euros :

« Après la chute du dictateur, le pays est livré au chaos, des milliers de pauvres fuient vers les pays d’Europe, qui main dans la main avec le nouveau pouvoir en place érige une frontière de barbelés, d’uniformes et de technologies ».

Mais, en fait, ce document de 200 pages daté d’avril 2013, rendu public le 22 novembre par des journalistes, n’est pas un scénario de film d’anticipation : c’est un rapport confidentiel rédigé par le très institutionnel et très européen Service Européen pour l’Action Extérieure (SEAE) qui dresse un état des lieux de la situation en Libye en terme de lutte contre l’immigration, contre les groupes terroristes et contre les trafics (leur fameux triptyque sécuritaire), de sécurisation du territoire et détaille l’ensemble des actions engagées dans ce sens par l’Union européenne. Ce rapport est le résultat de plusieurs missions d’observation dans la suite de la guerre menée entre mars et octobre 2011 par l’Otan, l’Europe et l’Amérique du Nord.

lampedusaLe souhait des dirigeants européens c’est que, dans la continuité des accords passés avec l’ancien dictateur Kadhafi, le nouveau pouvoir en place coopère afin d’empêcher les migrants qui transitent par la Libye d’atteindre les côtes européennes. Au lendemain de la chute de Kadhafi, en août 2011, l’Italie re-signait avec le Conseil National de Transition tous les accords de coopération économique et en terme de lutte contre l’immigration passés avec l’ancien régime. Idem pour la France, qui avec l’Italie étaient les plus fervent défenseur de l’intervention militaire de 2011 (non content de n’avoir plus besoin de traiter avec Kadhafi, dur en affaires (sic)). C’est qu’il y a du fric à se faire : vente d’Airbus et autres merdes et exploitation par la multinationale italienne ENI (Enel) du pétrole libyen. En 2004, Kadhafi et Berlusconi alors président italien, avaient inauguré la mise en service de Greenstream, gazoduc alimentant l’Italie en pétrole libyen, et appartenant à Agip Gas BV, une coentreprise de l’italienne ENI et de la libyenne National Oil Corporation. L’accord diplomatique qui avait entériné cette coopération, prévoyaient également un renforcement de la lutte contre l’immigration, en Libye : surveillance accrue des frontières maritimes et terrestres, ouverture de centres de rétention financées par l’Ue ou l’Italie, etc. Kadhafi savait jouer sur la corde sensible de ses partenaires européens et menaçait régulièrement « d’ouvrir la vanne de l’immigration » afin de se faire satisfaire (en août 2010 il avait exigé 5 milliards d’euros à l’Europe faute de quoi il ne ferait plus barrage aux migrants). (écoutez sur le sujet de l’externalisation des politiques migratoire européenne l’émission Sans papiers ni frontières du 02 novembre 2012)

Jusqu’à aujourd’hui c’est le même processus qui est à l’œuvre. En septembre 2012, le gouvernement libyen a ouvert un nouveau centre de rétention à Tripoli, en lieu et place de l’ancien zoo municipal…Suite au naufrage au large de Lamedusa qui a coûté la vie à plus de 300 personnes, gouvernements italien et libyen se sont retrouvés pour lancer un programme de protection électronique des frontières libyennes et, on l’apprend dans le rapport, l’Italie a alloué au moins 280 millions d’euros à la Libye pour l’année 2012 (achat de matériel, formation à son utilisation, appuie aux gardes côtes, aide au « management » des migrants, etc.). Toujours en 2012, l’Union européenne lâche plus de 110 millions d’euros à la Libye pour sa politique migratoire. Cela s’ajoute aux 89 millions de l’agence européenne de surveillance des frontières Frontex pour la même année et aux 244 millions entre 2014 et 2020 du nouveau système de surveillance électronique Eurosur.

Dans ce même document, le Service Européen pour l’Action Extérieure parle également de la mise en place une nouvelle mission, appelée EUBAM (European Union Border Assistance Mission) qui vient d’être finalisée par les dirigeants européens. Son objectif est toujours le même, renforcer les frontières libyennes. Avec ucaughtn budget de 30,3 millions d’euros annuels, cette mission « opérationnelle » comme ils disent, a pour objectif : identifier les besoins les plus pressants en matière de sécurité frontalière, conseiller aux autorités les équipements a acquérir et les former à leur utilisation et entretien, entraîner des bataillons de policiers, de militaires et de douaniers chargés de la surveillance des frontières, travailler en liaison avec les services de renseignements, améliorer le fonctionnement de la chaîne de commandement (sûrement pour éviter les bourdes qui font que personne ne va intervenir pour repêcher les survivants d’un bateau qui coule en pleine méditerranée car chacun se renvoi la balle), améliorer la coopération avec les pays voisins. Cette mission est basée à Tripoli et a commencé à fonctionner en mai 2013. Elle compte une quarantaine de membres, mais devrait bientôt en compter 111. Sur le territoire libyen elle forme des flics et des douaniers à l’aéroport de Tripoli, assiste les bureaucrates en charge des questions d’immigration, propose des séminaires sur la « gestion intégrée des frontières ». La France apporte sa contribution en formant à l’Institut français de Tripoli des agents des douanes, en formant des pilotes à l’École de l’air de Salon-en-Provence, des officier de marine à Toulon et des officiers à l’École de guerre à Paris. D’autres pays, hors Union européenne participent aussi à EUBAM, comme les États-Unis, la Turquie, la Jordanie, le Qatar et les Émirats arabes unis, en formant des flics et des militaires et en envoyant du matériel, avec en ligne de mire les possibles investissements qu’ils pourront réaliser dans la région.

Le seul hic pour l’EUBAM, c’est que ses membres ont trop peur pour se déplacer dans le pays et restent cantonnés dans la capitale à l’hôtel Corinthia, dans le quartier des affaires. Pour y remédier, la mission a lancé un appel d’offre a des entreprises privées de sécurité. Sont en lice pour l’instant : les britanniques G4S, Control Risks et Hart, les français Arcos, Geos, Amarante, le canadien Garda World ainsi que le chypriote Argus Security.

On aurait pu imaginer qu’avec le processus révolutionnaire en cour pendant l’année 2011, la Libye de l’après Kadhafi refuserait de jouer la coopération. Mais un nouveau pouvoir a été mis en place et comme tout pouvoir, il a besoin de défendre et surveiller son territoire, de développer son économie pour entrer dans le jeu du capitalisme, de gérer et contrôler sa population. La Libye reste une porte d’entrée vers l’Europe pour les migrants, qui depuis des années sont des milliers à mourir dans le cimetière méditerranéen. Heureusement quelques nouvelles parviennent jusqu’ici qui racontent des histoires de révolte et d’insoumission comme cette récente évasion massive du centre de rétention d’al-Hamra.

Les frontières ne disparaîtrons que quand nous serons enfin libre, dans un monde débarrassé de toute autorité, de tout bureaucrate, de tout flic pour nous dire où l’on peut aller et où l’on ne peut pas, qui peut circuler où il veut et qui doit crever là où il est. Ce n’est sans doute pas tout de suite que l’on détruira à coup de hache les barbelés, les caméras thermiques et les drones pour ne plus jamais les voir repousser ; mais dans nos luttes quotidiennes, s’opposer aux rafles, se solidariser avec les révoltés d’un centre de rétention, saboter la machine à expulser… c’est s’attaquer aux frontières, celles qui nous paraissent lointaines et difficiles à atteindre comme celles qui se dressent ici et entre nous, à chaque contrôle, à chaque moment de chacun pour soi.

Contre toutes les frontières, Contre tous les pouvoirs !

[UE] L’Europe nous observe, crevons-lui les yeux !

 L’Europe nous observe, crevons lui les yeux !

Depuis début octobre et les deux naufrages au large de Malte et de Lampedusa qui ont coûté la vie à plusieurs centaines de personnes, l’Union européenne met en avant la nécessité de prendre des mesures pour éviter les naufrages et les noyades de migrant-e-s en Méditerranée. Alors qu’en 2011 au moins 2352 personnes sont mortes dans le silence en tentant la traversée, l’UE instrumentalise ces deux événements pour lancer son tout nouveau programme de surveillance des frontières maritimes, Eurosur, qui sera effectif le 2 décembre 2013.

Ce projet qu’on nous brandit aujourd’hui est en réalité dans les cartons depuis 2008. Il prévoit concrètement de mutualiser les moyens de surveillance des frontières maritimes déjà existants et d’en mettre d’autres à disposition (drones, radars, satellites, …). Les infos récoltées 24 heures sur 24 seront à la fois centralisées et diffusées de manière à ce que chaque pays puisse suivre une situation en temps réel et prendre les mesures qui s’imposent, c’est-à-dire intervenir afin de « réduire le nombre d’immigrants illégaux qui rentrent dans l’Union européenne sans être découverts. »

La Libye a demandé à l’UE un accès à son système satellitaire pour lui permettre de surveiller ses frontières maritimes et terrestres afin de renforcer le travail commun en matière de lutte contre l’immigration clandestine. Même si le feu vert n’a pas encore été donné, il est clair qu’Eurosur s’inscrit dans une logique d’externalisation des frontières de l’Europe, par le biais d’accords renforcés entre les pays européens et les États dits « de départ » et « de transit ». Un processus entamé depuis longtemps, sous le régime de Kadhafi l’UE finançait déjà des centres de rétention en Libye. L’idée est de déléguer le contrôle migratoire à la source.

La militarisation des frontières européennes et la guerre aux migrant-e-s sont déjà en cours depuis les années 90 et se sont accélérées ces dix dernières années.

Ainsi depuis 2004 l’agence européenne Frontex (dirigée par un finlandais ancien garde-côte qui se vante de consacrer sa vie depuis plus de trente ans à la lutte contre l’immigration clandestine, et par un ex-flic espagnol) coordonne la sécurisation des frontières externes de l’espace schengen.

Pour citer un projet récent et complémentaire avec Eurosur, le 1er avril 2013 les eurocrates lançaient Closeye – Collaborative evaLuation Of border Surveillance Technologies in maritime Environment bY pre-operational validation of innovativE solutions -, des essais de surveillance aérienne de la Méditerranée et en particulier du détroit de Gibraltar. Il prévoit l’utilisation de technologies telles que des drones et des satellites dirigeables qui permettront à l’Italie, à l’Espagne et au Portugal d’observer les mouvements en mer 24 heures sur 24, et de réagir au plus vite pour intercepter celles et ceux qui tentent la traversée illégalement, avec la bénédiction du gouvernement marocain. Les essais vont durer plusieurs années, l’objectif : « augmenter la collaboration entre les entreprises privées et les États clients », « adapter l’offre à la demande. » On voit bien que la lutte contre l’immigration est un business florissant pour les sociétés d’armement et de technologies de surveillance qui ont toujours besoin d’une prétendue situation d’urgence avec un ennemi désigné pour pouvoir continuer à prospérer.

Finalement ces naufrages représentent une aubaine pour l’Europe car en plus d’envoyer un message effrayant à d’éventuels candidats de l’autre côté de la Méditerranée, ils permettent de faire passer comme une lettre à la poste des dispositifs ultra-sécuritaires et de propager le mythe de l’ « invasion » : des hordes de migrant-e-s qui envahiraient le territoire, s’insinuant par tous les pores de la frontière qu’il faudrait d’urgence combler. Une représentation propagée complaisamment par les médias de masse, qui nous donnent à voir régulièrement les radeaux pleins à craquer et prêts à couler. En revanche, ce qu’ils oublient volontiers de nous montrer, ce sont les gardes-côtes qui tirent dans les pneumatiques des embarcations de migrant-e-s, les bâtiments de l’otan qui passent à côté de barques en détresse sans leur porter secours, les gens obligés de prendre des chemins plus détournés et donc plus dangereux…. Lors d’un des naufrages médiatisés début octobre, les personnes présentes sur le bateau ont alerté les secours 4h avant de couler mais l’État italien et l’État maltais se sont renvoyés la balle, avec pour conséquence des dizaines de mort-e-s. Le 1er ministre italien a quant à lui proposé de donner la nationalité italienne… aux morte-s au large de Lampedusa. Leur hypocrisie ne suffit pas à masquer les critères requis pour être un « bon » immigré.

Ce qui reste aussi systématiquement dans l’ombre ce sont les files d’attente interminables d’étranger-e-s devant les consulats et les préfectures des États européens. C’est pourtant là que se construit le statut du « clandestin ». Par les listes de documents à présenter, jamais exhaustives. Par les heures passées à poireauter pour se faire recaler à l’accueil. Par les visas non accordés. Par les titres de séjour pas renouvelés. Par l’enfermement en centre de rétention et l’expulsion de celles et ceux qui n’ont pas passé l’épreuve avec succès. Car les « clandestins » ne sont pas une « menace » venue de l’extérieur, mais le résultat d’une volonté politique des États européens, qu’on appelle « politique migratoire », la conséquence d’un contrôle strict des États sur qui a le droit ou non à des papiers.

Parce que, les sans papiers, les États européens en ont bien besoin. Parce que, que ce soit en utilisant les sans papiers comme main d’œuvre corvéable ou en délocalisant les entreprises à l’étranger, la logique est toujours la même : exploiter plus pour gagner plus. Parce qu’avoir un bouc émissaire sur lequel rejeter toutes les merdes intrinsèques au fonctionnement d’un État capitaliste, ça permet aux puissants de se légitimer pendant que les galériens s’entretuent. Parce qu’en agitant les « clandestins » comme un épouvantail, l’Europe justifie des projets flippant de militarisation de ses frontières et de contrôle des personnes à l’intérieur de son territoire.

Plus insidieusement, ces dispositifs de surveillance entraînent concrètement l’augmentation du contrôle sur toutes et tous. Ils sont expérimentés ici en Méditerranée, mais il y a fort à parier qu’ils finiront par envahir non seulement les mers mais aussi les rues et nos vies dans la droite lignée des caméras de vidéo-surveillance ou du fichage adn.

Ni frontières, ni papiers, soyons incontrôlables !

 

Organismes participants à Eurosur

ITALIA CONSORZIO NAZIONALE INTERUNIVERSITARIO PER LE TELECOMUNICAZIONI
FRANCE SAGEM DEFENSE SECURITE
NEDERLAND NEDERLANDSE ORGANISATIE VOOR TOEGEPAST NATUURWETENSCHAPPELIJK ONDERZOEK - TNO
ESPAÑA INDRA ESPACIO SA
UNITED KINGDOM UNIVERSITY OF PORTSMOUTH HIGHER EDUCATION CORPORATION
ITALIA ALENIA AERONAUTICA SPA
ITALIA THALES ALENIA SPACE ITALIA SPA
PORTUGAL EDISOFT-EMPRESA DE SERVICOS E DESENVOLVIMENTO DE SOFTWARE SA
FRANCE MONDECA SA
ITALIA TELESPAZIO SPA
FRANCE THALES COMMUNICATIONS & SECURITY SA
ESPAÑA TTI NORTE, S.L.
BELGIQUE-BELGIË SPACE APPLICATIONS SERVICES NV
FRANCE THALES ALENIA SPACE FRANCE
UNITED KINGDOM UNIVERSITY COLLEGE LONDON
SVERIGE TOTALFORSVARETS FORSKNINGSINSTITUT
DEUTSCHLAND THALES DEFENCE DEUTSCHLAND GMBH
ESPAÑA EUROCOPTER ESPANA SA
ESPAÑA INDRA SISTEMAS S.A.
ISRAEL CORRELATION SYSTEMS LTD
FRANCE CASSIDIAN SAS
FRANCE THALES SYSTEMES AEROPORTES S.A.
BELGIQUE-BELGIË JRC -JOINT RESEARCH CENTRE- EUROPEAN COMMISSION
ESPAÑA UNIVERSIDAD DE MURCIA
UNITED KINGDOM BAE SYSTEMS (OPERATIONS) LTD
NEDERLAND HITT HOLLAND INSTITUTE OF TRAFFIC TECHNOLOGY BV

Organismes participants à Closeye

ESPAGNE Guardia civil
PORTUGAL Guardia Nacional Republicana
ESPAGNE Ingenieria de Sistemas para la Defensa de España
ITALIE Agencia Spaziale Italiana
UE European Union Satellite Centre
ITALIE Marina Militare Italiana
ITALIE Centro Italiano Ricerche Aerospaziali
UE Frontex (rôle consultatif)
AUTRICHE Schiebel
ETATS-UNIS General Atomics AeronauticalSystems

Reçu par mail

 

[Italie] Effondrements – 20 novembre 2013

Il y a deux semaines a été détruit le centre de Gradisca. C’est le septième à fermer en Italie. Cela peut sembler évident mais il est préférable de le préciser avant que quelques politiciens plus ou moins sinistres*  ne pensent à s’attribuer le mérite de ce qu’ils n’ont pas fait : ces centres ont été  formellement  fermés parce qu’un fonctionnaire ministériel en a ordonné l’évacuation, mais factuellement ils ont été détruits par le feu des révoltes des retenus. Sept centres sur treize sont fermés, et on ne peut pas dire que ceux qui restent se portent à merveille. Considérant la vitesse à laquelle ils tombent en morceaux, on pourrait affirmer que la machine à expulser est proche de l’écroulement  En voulant être sincères, si l’on doit parler d’écroulement, il y aurait besoin de dire quelque chose aussi de l’écroulement qui semble avoir touché les divers mouvements qui, ces dernières années, ont soutenu les luttes des retenus. Alors que l’on est dans un des moments les plus forts et les plus incisifs en terme de lutte à l’intérieur, à l’extérieur rien ne bouge. Il serait important de tenter quelques raisonnement propositifs, mais nous laissons ces pensées temporairement de côté. *( jeu de mot avec sinistra (gôche), NdT)

La machine à expulser est clairement en crise, et il n’y a pas besoin d’être spécialiste en philosophie politique pour comprendre que derrière chaque soit-disante crise se cache la possibilité d’une restructuration. Il pourrait sembler qu’au ministère de l’intérieur on se tourne les pouces mais il est quasiment certain qu’ils pensent et préparent quelque chose. Les nouvelles officielles à ce propos sont peu nombreuses, mais nous savons par exemple que les centres de Modène et de Bologne pourraient rouvrir l’année prochaine. En plus, il y a toujours en jeu la construction de deux nouveaux centre à Santa Maria Capua Vetere (Casert) et à Palazzo San Gervasio (Potenza). Ouverts en toute hâte il y a deux ans et demi durant le plan « urgence afrique du nord » (suite aux révolutions arabes, NdT) et restés en fonction seulement quelques mois, ils devaient rouvrir avant la fin de l’année, mais depuis que le gouvernement a lancé les appels d’offre et la collecte de fonds pour la restructuration on n’en a plus entendu parler.

Comme chaque restructuration qui se respecte, celle des CIE n’est pas seulement une question de contrats pour savoir qui construira les murs, les grillages et les barreaux. Chaque dispositif répressif a aussi besoin d’idées et de théories sur lesquelles se baser et se renouveler et sur ce front les choses sont en train de bouger. En mars 2013 a été publiée une proposition de réforme des CIE écrite par Connecting People et la Fondation Xenagos. Fatigués de recevoir de continuelles «  attaques sur plusieurs fronts, les qualifiant notamment de tortionnaires redoutables » Maurino et cie ont mis noir sur blanc leurs idées pour une « réforme copernicienne » de la machine à expulser. Parmi les propositions les plus inquiétantes il y a celle d’obliger les retenus à travailler, une nouvelle qui transformerait les CIE en réels camps de travail, au profit de ceux qui les gèrent. De son côté, après une campagne désormais décennale, la croix rouge est obligée d’abandonner pour l’instant les jeux de mots autour de sa prétendue impartialité et à finalement découvrir la différence entre les concepts d’ « accueil » et d’ « expulsion ». Il y a six mois a aussi été publié un document programmatique sur les CIE, un long travail d’analyse sur la condition des centres rédigé par une commission de bureaucrates du ministère de l’intérieur. Obsédés par la rationalisation de la machine à expulser, jugée coûteuse et inefficace mais surtout mise à rude épreuve par les « épisodes, actuels ou potentiels d’insurrection ou de dégradations graves », les fonctionnaires ont mis au point des propositions. Pour garder sous contrôle une situation leur ayant déjà échappé des mains trop souvent, le ministère étudie « la création d’un corps de professionnels, à qui confier la gestion des activités impliquant un contact direct avec les hôtes du centre ». Des équipes de para-matons privés. Pour le comprendre il suffit de lire comment le ministère s’imagine ce nouveau corps  : « opérateurs spécialisés, préparés à l’aide de formations spécifiques et d’entraînements, organisés avec la contribution de l’administration pénitentiaire, qui seront aux côtés des forces de l’ordre ». Dans le projet des bureaucrates l’intégration de la machine à expulser à l’intérieur du circuit carcéral ne se limiterait pas seulement à l’entraînement de gardiens, mais inclurait également « la création d’une structure mixte (à l’intérieur des prisons), composée par du personnel de l’administration pénitentiaire et de la police d’état » afin d’identifier les détenus sans-papiers. Un projet qui est aussi soutenu, depuis quelques temps, par des partisans de la fermeture des centres. L’une d’entre eux est Serena Pellegrino, écologiste et libérale de gauche qui, dans la foulé des révoltes de Gradisca a demandé des modifications législatives qui permettront « l’identification des très nombreux détenus sans-papiers, durant la période d’incarcération ».

En attendant de savoir ce qui adviendra dans les prochaines semaines à l’intérieur, hors et autour des CIE voyons où en sont les six restés ouverts.

Milan. Restructuré il y a moins de trois mois, après une série de travaux qui auraient dû améliorer les niveaux de sécurité et empêcher les révoltes, le centre est de nouveau pratiquement détruit et il n’y reste que vingt-huit places. Après la dernière révolte et en vue du renouvellement de l’appel d’offre de gestion, la croix rouge a décidé de pleurer misère et de hausser le ton : évidemment la gestion d’un CIE est devenue une affaire toujours moins intéressante en terme d’image et de rentabilité.

Turin. Le centre est à moitié détruit : une section entière est fermée, les cinq autres sont toutes plus ou moins sérieusement endommagées et il ne reste donc dans la structure que 98 places. Les dégradations les plus conséquentes datent de juillet dernier, lorsque a été détruite et incendiée la section blanche, fraîchement pensée et restructurée comme section anti-émeutes. Comme à Milan, à Turin aussi la gestion est depuis longtemps confiée à la croix rouge et l’appel d’offre tombera au printemps prochain.

Rome. On n’a plus de nouvelles du centre de Rome depuis la grande révolte de février dernier, quand le feu détruisit une grande partie du centre et des grilles d’enceinte les rendant pratiquement inutilisables pour plusieurs jours. L’absence de nouvelles est un signe évident que la gestion par la coopérative Auxillium porte ses fruits en réduisant au silence à grand renfort de sédatif les protestations des retenus. Une gestion plébiscitée un peu partout : parmi ceux qui estiment la coopérative nous trouvons beaucoup de fonctionnaires du ministère, même ceux qui sont connus comme fabulateurs de gauche.

Bari. Les dernières protestations significatives remontent à deux ans, mais l’œuvre de destruction du centre par les retenus a sûrement continué sans relâche bien que l’on n’ait pas de nouvelles. Le CIE est à moitié détruit et un groupe d’avocats a lancé une class action pour contraindre le préfet à acter qu’il ne reste que 112 places dans le centre. Depuis six mois la gestion du centre est confiée à Connecting People, les collègues de ceux qui géraient jusqu’à il y a deux semaines, le centre de Gradisca.

Caltanissetta. Après un été bouillant de révoltes et d’évasions, un des trois pavillons du centre a été définitivement fermé en septembre. Il n’y reste donc plus que 70 places. Depuis octobre la gestion a été confiée à la coopérative Auxillium, la même qui gère le centre de Rome. Malgré les compliments récents de l’évêque monseigneur Russotto et d’un groupe de parlementaires grillini (adeptes de Bepe Grillo, mouvement 5 étoiles, NdT) il est suffisamment évident que les nouveaux gestionnaires n’ont pas la situation sous contrôle : il y a eu au moins trois tentatives d’évasion accompagnées d’affrontements avec la police le mois dernier.

Trapani Milo. Immergé dans la campagne trapannaise, éloigné des centres résidentiels, il est renommé pour être le CIE des évasions. Même si la police a tout essayé, allant même jusqu’à couper les lacets de chaussures aux retenus, la moitié des retenus qui passent par là arrivent à s’en échapper. Dans la tentative de mettre fin à cette situation le ministère a récemment débloqué plus de 600 000 euros pour sécuriser le centre et le préfet a révoqué la gestion à la coopérative Oasi, lançant un nouvel appel d’offre. Pourtant, en masse comme en petit groupe, on continue toujours à s’enfuir du centre de Trapani.

 source : macerie