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Contre les frontières et leurs prisons

[Brochure] Quelques textes autour de la lutte contre les Centres l’Identification et d’Expulsion – Italie – novembre 2012/avril 2013

Quelques textes autour de la lutte contre les Centres d’Identification et d’Expulsion

[Italie – novembre 2012/avril 2013]

Sommaire :

Turin : À propos de la lutte contre le centre, page 3

Rome : Feu à Ponte Galeria – entretien avec un retenu, page 9

Chronologie, page 12

Lettre de Greg depuis la prison de la Valette, page 25

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[Rome] Entretien avec un retenu de ponte galeria

Feu à Ponte Galeria

D. Salut. Lundi 18 février au CIE de Ponte Galeria à Rome est survenue une révolte. Tu peux nous raconter ce qui s’est passé et comment tu as été libéré ?

R. La révolte a éclaté parce qu’ils ont commencé à taper un mec nigérian qui cherchait à résister à son expulsion. Ils l’ont tapé de manière inhumaine. Pour eux nous ne sommes que des numéros. D’autres mecs nigérians ont alors commencé à foutre le bordel pour essayer de le défendre… et de là a éclaté la révolte.

D. D’après beaucoup de journaux, ce ne sont que des nigérians qui se sont révoltés, c’est vrai ?

R. Au départ, comme je disais, c’était les nigérians, mais après les autres aussi ont foutu le bordel, géorgiens, moldaves, marocains, albanais… Nous étions tous ensemble parce que nous vivions tous les mêmes conditions, nous avions tous le même problème : vivre. Ils ont arrêté des mecs nigérians parce qu’ils ont vu sur les vidéos que c’étaient eux les premiers… Après nous nous sommes tous unis et nous avons commencé à allumer le feu, qui s’est diffusé dans tout le centre. Les personnes se sont révoltées parce que de toute façon la situation est difficile ; qui n’est pas passé par Ponte Galeria ne peux pas s’imaginer ce que signifie y vivre. C’est insupportable, une vie qu’il n’est pas possible non plus de raconter.

D. Il y a donc eu cette révolte avec le feu. C’est la première que tu as vécue ? Depuis combien de temps es-tu à Ponte Galeria ?

R. j’y suis resté un mois. Les choses de ce genre ont déjà eu lieu deux ou trois fois, toujours avec le feu, car l’unique chose que peuvent faire les détenus pour exprimer leur rage est d’allumer des feux. Cette fois le feu s’est diffusé partout, il a pris le plastique (les vitres de plexiglas qui protègent les barreaux, pour empêcher les retenus de s’en approcher). Les flics n’ont pas réussi à intervenir avec la rapidité et la violence habituelles parce qu’il y avait des journalistes présents ce jour-là… Ils devaient être trop pris à se faire interviewer, qui sait. En plus ils ont dû attendre les docteurs pour soigner le mec nigérian qui devait être expulsé, ils l’avaient tapé fort…

D. Qu’est-ce qui a brûlé à part les panneaux de plexiglas ?

R. Les fils qui connectent les caméras de vidéo-surveillance… La structure n’a pas été rendue inutilisable, mais le système de contrôle ne fonctionne plus.

D. Tu me racontais que cette fois, à la différence d’autres, quelques heures après la révolte la police, la nuit, s’est trouvée en difficulté…

R. La police s’est mise en poste en pleine nuit, et nous a contraints à dormir lumière allumée pour pouvoir mieux contrôler si nous nous levions ou si nous tentions de nous échapper. Ils ont été contraints à rester tout le long du périmètre du centre, comme ils ne le font jamais de nuit.

D. A cause des dommages causés au système de surveillance ils ont vidé le CIE.

R. Oui, ils le vident entre transferts dans d’autres centres, expulsions, et personnes qui ont été libérées parce qu’elles n’ont pas été identifiées. Cependant, neuf mecs ont été arrêtés et quatre ou cinq mis à l’isolement. C’est difficile de comprendre précisément combien ont été transférés, combien expulsés et combien libérés. Au moment de la révolte à l’intérieur nous étions 150, maintenant il n’en reste que 30 ou 40… Je répète, je ne sais pas combien sont sortis au total. Avec moi sont sortis quatre ou cinq personnes.

D. A la différence d’autres révoltes, cette fois ils ne vident pas le CIE parce qu’il est inutilisable…

R. Avec cette révolte nous n’avons pas rendu le CIE moins utilisable qu’avant parce que avant aussi cet endroit était dégueulasse pour y vivre. Avec la crasse qu’il y a, nous étions enfermés dans cet endroit comme dans une cage à poule. Ils nous enfermaient dans les chambres à 21 heures et les ré-ouvraient à 9 heures du matin.

D. T’as raison, ce qui les intéresse c’est seulement les dispositifs de sécurité, les panneaux pour empêcher de s’échapper…

R. Oui c’est vrai, par exemple ce que je te disais qui est arrivé la nuit de la révolte, la lumière allumée pour nous surveiller, est arrivé d’autres fois, est une forme de punition. Quand il y a du bordel, des protestations, des révoltes, ils laissent les lumières allumées jusqu’à deux heures, trois heures du matin. C’est des lumières très fortes que nous ne pouvons pas éteindre et qui nous empêchent de dormir.

D. Ceci, plus qu’une punition est une torture. Les tortures du genre sont diffuses dans certaines prisons… Tu sais si des fois ils utilisent des psychotropes dans la bouffe ? A Turin, beaucoup des prisonniers dans le centre se sentent fatigués et confus après avoir mangé…

R. Non, ici à Rome non, ici ils laissent la lumière allumée et ils essayent de te fatiguer psychologiquement.

D. Évidemment, vu que le CIE de Turin est géré par la Croix-Rouge, ils ont des compétences médicales spécifiques, ils savent utiliser les psychotropes. A Rome je ne sais pas en quoi est spécialisée la coopérative Auxilium qui gère le centre…

R. Eux sont spécialisés dans le tour de clés.

 source : traduit de Invece – mensile anarchico – n°22 mars 2013 – italie

[Rome] Rassemblement à Ponte Galeria – 21 avril 2013

Il est toujours là, aux portes de Rome, enterré pour le rendre invisible et proche de l’aéroport de fiumicino commode pour les déportations forcées.
C’est le CIE (centre d’identification et d’expulsion) de Ponte Galeria, le camp d’internement pour migrants en attente d’expulsion de l’Europe.

Cages, clôtures et des murs gardés par des dispositifs technologiques, forces de l’ordre et militaires, géré depuis trois années par la coopérative sociale Auxilium.
Murs, clôtures et cages qui selon l’appel d’offre pour l’assignation du prochain mandat seront gérés par un candidat qui acceptera une paye encore plus basse, partant de 30€ par jour et par tête.
Aujourd’hui le CIE de Ponte Galeria est au deux-tiers des gravats, sa capacité totale de 360 place est devenue notablement réduite par une révolte née de la résistance à une déportation collective vers le Nigéria le 18 février.
Aujourd’hui dans ces cellules sont retenus 66 hommes et 44 femmes et, selon la loi illes pourraient y rester jusqu’à 18 mois avant d’être déporté-e-s dans un pays ou illes ont fait le choix de ne pas vivre.

Le système des appels d’offres vers le bas diminue le butin que les coopératives, fondations, multinationales et la croix rouge italienne ont toujours récolté avec la gestion des camps pour migrants. D’une moyenne de 55 euros pour chaque personne retenue, on passe à une moyenne de 25 euros avec laquelle les gestionnaires devraient garantir la bouffe, le nettoyage  les services d’hygiène et payer le personnel. Il est clair que ceux qui ont toujours prospéré sur l’existence de ces lager comptent ce qui leur reste dans les poches. C’est pourquoi en mars le CIE de Bologne ferme, défini non conforme à la dignité humaine car en état de dégradation total.

Après des années de silence, journalistes et médias compilent leurs cahiers de doléance, dénonçant avec dossiers photographique et interviews chocs la brutalité des CIE.
Il y a ceux qui invoquent l’exigence d’une régulation interne valide pour tous les centres, à la discrétion du gestionnaire, et la diminution du temps d’emprisonnement à un maximum de 12 mois.
Mais ce n’est pas une réforme que nous voulons, ni une restauration.
L’unique étincelle de dignité humaine qui s’est exprimée durant toute ces années, incessamment,  des fois de manière coordonnée entre retenu-e-s de divers centres, l’a été à travers les nombreuses évasions, de masse ou individuelles, les gestes de rébellion à l’enfermement, la résistance aux déportation et les révoltes qui ont carbonisé des sections entières, parfois amenant la fermeture totale des centres mêmes.

À Ponte Galeria aussi, beaucoup parmi les personnes internées ont été disposées à tout risquer pour leur liberté, détruisant une bonne partie du système de surveillance et des sections entières.
Après trois ans auxilium finit son mandat de gestion et sont encore inconnus les informations relative au prochain tour.
A l’intérieur comme dehors, sabotons la machine à expulser, détruisons les lagers de la démocratie.

Dimanche 21 avril nous serons devant les murs du CIE de Ponte Galeria pour exprimer notre solidarité avec les personnes enfermées ici et répéter que nous ne voulons d’aucun camp, ni ici ni ailleurs.
Pour y aller ensemble, rendez vous à 9 heures à la station Ostiense pour prendre le train jusqu’à Fiera di Roma.
Dès 10 heures, micro ouvert.

Compagnonnes et compagnons

[Turin] Affiche : La libertà brucia – février 2013

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voir aussi ici

[Rome] Révolte au CIE de Ponte Galeria – 18 février 2013

Le lundi 18 février une révolte a éclaté au centre de rétention de Ponte galeria à Rome. Plusieurs dizaines de retenus sont montés sur les toits et ont mis le feu aux matelas.

L’élément déclencheur de leur révolte semble avoir été le refus d’un jeune nigérian de se faire expulser. Sa résistance et la violence des flics ont déclenché la solidarité des autres nigérians emprisonnés. Selon divers témoins, le centre de rétention a alors été mis à feu et à sang dans le secteur homme, les pompiers ont mis 3 heures à éteindre l’incendie. Selon les autorités seuls les nigérians, qui sont au nombre de 43 sur les 132 prisonniers du centre, auraient participé à la révolte. Selon d’autres retenus les révoltés seraient allés chercher tous les matelas et toutes les couvertures dans toutes les cellules, les auraient rassemblés et auraient allumé un feu. Victor, le jeune homme qui refusait l’expulsion n’a pas pu être expulsé. Par contre 8 personnes retenues ont été arrêtées et transférées de la prison pour sans-papiers à la prison pour tous (enfin, presque tous, dans la prison pour tous ce sont surtout les exploités qui y sont enfermés). En Italie en ce moment beaucoup de personnes sans papiers commettent des actes désespérés. Il y a quelques jours un homme dans cette situation s’est jeté sous le métro, un autre qui venait de recevoir un refus à sa demande d’asile s’est immolé à l’aéroport de Rome. Face à ces gestes de désespoir, les révoltes, même si elles sont parfois aussi désespérées, pourraient apparaître comme une bouffée d’air pur. Elles restent malheureusement trop souvent peu partagées, à l’intérieur comme à l’extérieur, et ne parviennent pas à briser les murs. Solidarité avec les 8 personnes emprisonnées et avec toutes celles qui, en s’opposant à l’expulsion d’un de leurs compagnons d’infortune, ont partagé ce petit moment de liberté retrouvée !

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