Sans Papiers Ni Frontières

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Contre les frontières et leurs prisons

Du 13 au 26 octobre, attention aux rafles dans toute l’Europe

Mise à jour des contrôles principalement en région parisienne ici.

[RAJOUT DE TRADUCTION EN KURDE ET AMHARIQUE]

[Rajout de traduction en TURC]

[Rajout de traduction en ROUMAIN]

[RAJOUT DE TRADUCTION EN CHINOIS, OURDOU, BENGALI, TAMOUL ET HINDI]

[RAJOUT D’UNE VERSION AUDIO MULTILINGUE]

[Rajout bas de page affiches faites par la permanence sans papiers de l’Attiéké à Saint Denis]

[En bas de page AFFICHES/TRACTS en français, anglais, farsi, arabe et russe À IMPRIMER, DIFFUSER, COLLER]

Du lundi 13 au dimanche 26 octobre 2014, une grande opération policière à l’échelle européenne va avoir lieu contre les migrant.e.s. Sous le nom de « opération Mos Maiorum », son objectif est d’arrêter et de contrôler des centaines de personnes afin de collecter diverses informations en vue de renforcer leurs politiques contre l’immigration.

Le nom « Mos Majorum » en dit long sur la philosophie qui sous-tend cette opération : du latin « mœurs des anciens » ou « coutumes des ancêtres » Mos Majorum désigne dans la Rome antique le mode de vie et le système des valeurs ancestrales. Ses cinq fondements sont : – fides : fidélité, respect de la parole donnée, loyauté, foi ; – pietas : piété, dévotion, patriotisme, devoir ; – majestas : sentiment de supériorité naturelle d’appartenance à un peuple élu ; – virtus : qualité propre au citoyen romain, courage, activité politique ; – gravitas : ensemble des règles de conduite du Romain traditionnel, respect de la tradition, sérieux, dignité, autorité. De quoi plaire aux fachos et adeptes de théories sur l’invasion.

L’opération Mos Maiorum est conjointement menée par l’Union européenne (UE), les États membres de l’espace Schengen et les agences européennes Frontex et Europol.

Frontex (Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures) est une agence européenne qui depuis octobre 2005 (date de sa première opération) se charge de mener divers opérations de surveillance et de contrôle aux frontières extérieures de l’Europe (principalement au Sud et à l’Est). Des moyens militaires, technologiques et policiers sont mis à sa disposition (navires, hélicos, radars, détecteurs, etc.) par les États membres de l’UE et un budget de plusieurs dizaines de millions d’euros chaque année lui est alloué. C’est le bras armé de la politique migratoire européenne : Frontex organise le blindage militaire et technologique des frontières. L’agence intervient aussi en dehors de l’UE, principalement dans les pays aux frontières extérieurs, pour externaliser les politiques migratoires européennes. Elle organise également des vols charters pour les expulsions conjointes entre plusieurs pays. Des dizaines d’organismes européen et internationaux travaillent avec Frontex : agences internationales de police et de justice, organismes de gestion des migrations et des réfugiés, centres de recherche et de développement en matière de sécurité, etc. (voir deux textes sur Frontex ici et , et des cartes sur les opérations Frontex ici)

Europol c’est l’office de police criminelle intergouvernemental de l’UE qui coordonne le travail des polices nationales en matière de terrorisme, trafic de stupéfiant et de criminalité organisée. De plus en plus Europol participe aux opérations européennes menées contre les migrant.e.s avec pour objectif affiché de « démanteler les réseaux de passeurs, de trafiquants et les groupes terroristes », fameux triptyque “immigrés, trafiquants, terroristes” qui sous-tend toute la politique européenne dans sa lutte contre l’immigration et qui sert d’épouvantail pour légitimer ses actions. La situation politique actuelle en Irak et en Syrie n’en est que plus profitable pour eux. Une autre opération menée par Europol du 15 au 23 septembre 2014 sous le nom de « Archimède » (à laquelle Frontex participait) et qui visait les groupes criminels internationaux a également mené au contrôle de plus de 10 000 migrant.e.s et aux arrestation de 170 passeurs.

La zone de contrôle va donc s’étendre sur les territoires de 32 pays (les 28 de l’UE plus 4 non membres de l’UE mais de l’espace Schengen) ainsi qu’en mer : de la Norvège à l’Espagne, de l’Islande à Chypre, du Portugal à l’Estonie en passant par la Roumanie. Pour ça pas moins de 18 000 flics et gardes-côtes vont être mobilisés et les coûts de l’opération seront couverts a posteriori par les États et Frontex.
Les zones de contrôle sont laissées à l’appréciation des participants et peuvent donc être très larges : les eaux territoriales, les ports et aéroports, les frontières extérieures et intérieures de l’UE et de Schengen, les gares et les trains, les autoroutes, les transports en commun et la rue, les lieux de travail et les administrations, etc.

Chaque contrôle donnera lieu à une procédure recensant : des informations sur le contrôle (lieu, date, heure, moyen de transport) ; sur les personnes arrêtées (nationalité, sexe, âge, lieu et date d’entrée en Europe) ; sur les routes empruntées, les moyens de transports et la destination finale ; sur les documents en possession, les démarches administratives entreprises et les paiements de passeurs. Un bureau de coordination de l’opération va être mis en place en Italie et chaque procédure lui sera transmise via une adresse mail (gruppo.frontiere@interno.it). Il semblerait que ce genre d’opération devrait avoir lieu tous les 6 mois, sous la coordination du pays qui assure la présidence de l’UE.
En octobre et novembre 2012, une opération similaire avait eu lieu : « l’opération Aphrodite » au terme de laquelle 5 298 personnes avait été arrêtées à travers l’Europe.

C’est à la fois une opération de fichage/recensement puisque des centaines de personnes vont être contrôlées (avec prise d’empreintes, inscription sur les fichiers européens, etc.) mais également une sorte d’enquête à l’échelle Afrique/Asie/Europe pour connaître les nouvelles routes empruntées par les migrant.e.s, les nouveaux pays de départ et de passage ce qui va permettre aux pays européens, en collaboration avec les pays « voisins », de renforcer leur contrôle et de nouveaux dispositifs.

Depuis des années, l’Union européenne, son agence Frontex et les États membre de l’espace Schengen mettent en œuvre des moyens colossaux pour rendre inaccessible l’Europe à celles et ceux qu’elle ne souhaite pas accueillir, avec la collaboration accrue des pays dits « de départ » ou « de transit », à l’Est de l’Europe, au Maghreb et en Afrique. Du système de VISA de moins en moins accessible aux plus pauvres, au blindage des frontières extérieures, la guerre aux migrant.e.s fait rage. En Atlantique et en Méditerranée, les murs de barbelés et de gadgets technologiques de Ceuta et Melilla et la présence militaire et policière en mer rendent les routes de plus en plus longues et dangereuses pour les harragas. Depuis 26 ans, plus de 21500 personnes sont mortes aux portes de l’Europe et le chiffre ne cessera d’augmenter de jours en jours.

Début 2014 le projet Eurosur a été mis en place. Il permet de mutualiser les moyens de surveillance des frontières maritimes déjà existants et d’en mettre d’autres à disposition (drones, radars, satellites, …). Les infos récoltées 24 heures sur 24 sont à la fois centralisées et diffusées de manière à ce que chaque pays puisse suivre une situation en temps réel et prendre les mesures qui s’imposent, c’est-à-dire intervenir afin de « réduire le nombre d’immigrants illégaux qui rentrent dans l’Union européenne sans être découverts. »
Une nouvelle mission appelée « Frontex Plus » va venir renforcer la surveillance au large des côtes italiennes et maltaises d’ici quelques semaines. Demandée par l’Italie suite aux récentes arrivées de harragas sur ses côtes elle doit remplacer « Mare Nostrum » qui touche à sa fin.

Concrètement avec cette opération Mos Maiorum on peut penser que le nombre de rafles va augmenter en région parisienne et dans les grandes villes, notamment dans les transports.

Chaque année des milliers de personnes sont contrôlées, arrêtées, enfermées dans les centres de rétention et expulsées car elles n’ont pas de papiers (en 2012, 43 746 personnes ont été enfermées en centre de rétention et 36 822 personnes ont été expulsées de France, d’après les associations présentes dans les CRA).

Depuis 2005 et la mise en place d’objectifs chiffrés d’expulsion, le nombre de contrôles faciès n’a cessé d’augmenter : dans les transports en commun, les rues, les gares et les trains, aux aéroports, dans les administrations (caf, préfecture), dans les banques, à la poste, sur les lieux de travail (restaurants, chantiers), dans les foyers, etc.

Régulièrement de grosses opérations sont organisées par la préfecture et la police permettant d’arrêter des dizaines de personnes d’un coup.
En région parisienne les quartiers ciblés sont les quartiers populaires du nord est parisien et de banlieue.
Les flics peuvent agir en civil ou en uniforme, par petits groupes ou en masse. La plupart du temps des camionnettes permettant d’embarquer les personnes contrôlées sont garées pas loin.
Ces rafles passent souvent inaperçues tellement nous sommes habitués à l’occupation policière.
Dans les transports elles sont souvent conjointes avec les contrôleurs, ratp ou sncf.

Depuis plusieurs années des groupes de personnes tentent de s’organiser contre ces rafles dans certains quartiers : chaînes d’alerte sms, affichage et diffusion, rassemblements, assemblées de quartier, perturbations de contrôles, présence aux audiences au tribunal, etc. À plusieurs reprises la solidarité avec des personnes du quartier a permis que la police soit contrainte d’arrêter et de rebrousser chemin.

LA CHASSE EST OUVERTE ? EMPÊCHONS-LA !
OCCUPONS LA RUE, INFORMONS, OPPOSONS-NOUS AUX CONTRÔLES.
PAS DE FRONTIÈRES, PAS DE NATIONS, STOP AUX EXPULSIONS !

 

AFFICHE DU 13 AU 26 OCTOBRE 2014 ATTENTION AUX CONTROLESAFFICHE DU 13 AU 26 OCTOBRE 2014 ATTENTION AUX CONTROLES2CHINOIS AFFICHE DU 13 AU 26 OCTOBRE 2014 ATTENTION AUX CONTROLES

En .PDF : AFFICHE DU 13 AU 26 OCTOBRE 2014 ATTENTION AUX CONTRÔLES

Affiches faites par le centre social autogéré Attiéké à Saint-Denis Affiche Attiéké1 // Affiche Attiéké2 (traduit en langue Amharique)

ማስጠንቀቂያ፥ በሙሉ አውሮፓ ህብረት ውስጥ ሰደተኞችን ለመውጋት አዲስ የፖሊስ ማንቀሳቀስ እየጀመረ ነው !
አዲሱ ግብረት ሞስ ማዮሩም /mos maiorum/ ይባላል። ከጥቅምት3 /october 13th/ እስከ ጥቅምት 16
/october 26th/ ይካሄዳል። ለሁለት ሳምንታት አስራ ስምንት ሺህ /18000/ ፖሊሶች መታወቂያ ወረቀት የሌላቸው
ሰደተኞችን ያሳድዳሉ። የፍልስት መንገዳችንን ማወቅ ይፈልጋሉ። መታወዊያና ፓስፖርት የሌላቸው ሰዎችን እንዲታሰሩ
ይፈልጋሉ። ስለዚህ ይህን ዜና ለመታወቂያ የሌላቸው ሰደተኞች ማሰራጨት አለብን። በተለይ ባቡር ውስጥ፣ ባቡር ጣቢያ
ውስጥ፣ በድንብር አካባቢ እና ዋናዎቹ መንገዶች ላይ ብዙ የፓስፖርትና የመታወቂያ ካርድ ቁጥጥርን ሊኖር ይችላል።

EN CHINOIS (pdf)

2014年10月13日至26日 小心身份证检查

2014年从10月13日星期一到10月26日 星期日,欧盟将采取针对非法移民(无 证者)的大规模警察行动。两周期间,一万八千名警察将展开行动,目标追捕最大数目的无证者。身份证检查包括街道,火车,火车站,飞机场,高速公路及欧洲各 国国界线上。目标是抓捕最高数量的人数;获知移民常用路线和方法;及阻止欧洲外来移民。

> 从现在起 提醒大家 每个你们认识的人,无论他们长居于欧洲抑或在此期间短占逗留
> 若身处现场,联合起来组织身份证检查。可以通过抗议来暴露身份证检查,也可以通过悄悄的提醒帮助他们避免身份证检查。
> 甚至只是表示我们的反对,停下脚步驻足观看,这也会干扰身份证检查。让我们尽我们的全力让这次行动成为一个失败。

地球属于每一个人,和那些因国家干扰而无法自由行动的人联合起来!

无国界无国家,终止遣送

Version AUDIO

Version bengali tamoul hindi ourdou

traduction bengali tamoul hindi ourdou

ROUMAIN   PDF(roumain)

Din 13 pâna pe 26 octombrie, atentie la controluri!

De luni 13 octombrie pâna duminica 26 octombrie Uniunea Europeana va organiza o foarte mare operatiune de politie ce vizeaza persoanele fara acte de identitate. Timp de doua saptamani 18000 de politisti vor urmari si vor încerca sa aresteze cât mai multe persoane fara acte. Se vor face controluri pe strada, în trenuri,gari, aeroporturi, la punctele de trecere a frontierei interne ale Europei, peste tot în Europa. Obiectivele sunt arestarea maximului de persoane si identificarea rutelor si mijloacelor utilizate pentru a veni în Europa. Se încearca astfel împiedicarea migrantilor de a ajunge în Europa.

PREVENITI DE PE ACUM toate persoanele pe care le cunoasteti, rezidente sau în tranzit în Europa, care vor sa vina în aceasta perioada. Sa fim solidari încercând sa ne opunem acestor controluri daca suntem martori fie protestând, fie prevenind dinainte persoanele vizate, ajutându-le astfel sa scape.

Sa ne manifestam dezaprobarea daca asistam la operatiune; ne putem doar opri si privi, controlul poate fi astfel mai greu de facut.

Sa facem totul pentru ca aceasta operatiune sa devina un esec!

Sa fim solidari cu toti cei carora aceste state vor sa le împiedice libera circulatie.

 

TURC  PDF (turc)

DİKKAT !
13 ve 26 Ekim Tarihlerinde Kağıtsızlara Yönelik Polis Operasyonları Yapılacak !

Avrupa Birliği, 13 ve 26 Ekim tarihlerinde, « kağıtsızlar » olarak bilinen ve oturumu olmayan göçmenlere karşı,18 000 polisin katıldığı geniş çaplı bir operasyon yapılacak. Polis, Avrupa sokaklarında, trenlerde, garlarda, havaalanlarında, yollarda, sınırlarda « kâğıtsızlar » avına çıkacak ! Operasyonun amacı, mümkün olduğunca çok « kâğıtsız » yakalamak, göçmenlerin Avrupa’ya gelmek için kulandıkları yolları ve nasıl geldiklerini açığa çıkarmak, göçmenlerin Avrupa’ya gelmelerini engellemeye çalışmak.

Avrupa’da oturan, geçiş olarak kulanan ve bu tarihlerde Avrupa’ya gelmek
isteyen bütün herkesi bugünden itibaren haberdar edelim ve uyaralım !

Ne yapabiliriz ?

Herhangi bir kontrole tanık olduğumuzda, buna engel olmayı deneyebiliriz.
Kontrol sırasında insanların dikkatini çekmek ve polislerin rahat bir şekilde hareket etmesini engellemeye çalışabiliriz.

Kaçak olduğunu düşündüğümüz insanları uyarabilir ve kaçmasına yardımcı olabiliriz.

Kontrol sırasında durup polislere bakarak ve yanlarında kalarak hemfikir olmadığımızı gösterebiliriz.

Bu eperasyonların başarısız olması için elimizden geleni yapalım !
Devletlerin, insanların özgür bir şekilde dolaşmasını ve yaşamasını engellemelerine karşı dayanışma içinde olalım.

Sınırlara, uluslara ve sınırdışı edilmelere hayır !

TRADUCTION EN KURDE

TRADUCTION EN AMHARIQUE

[Libye/UE] « Liaisons dangereuses » contre « les invasions barbares » : la mission EUBAM

Libye / Union européenne, « Liaisons dangereuses » contre « les invasions barbares » : la mission EUBAM

On pourrait croire qu’il s’agit du scénario du nouveau mauvais film en mode grosse production américaine à plusieurs milliers d’euros :

« Après la chute du dictateur, le pays est livré au chaos, des milliers de pauvres fuient vers les pays d’Europe, qui main dans la main avec le nouveau pouvoir en place érige une frontière de barbelés, d’uniformes et de technologies ».

Mais, en fait, ce document de 200 pages daté d’avril 2013, rendu public le 22 novembre par des journalistes, n’est pas un scénario de film d’anticipation : c’est un rapport confidentiel rédigé par le très institutionnel et très européen Service Européen pour l’Action Extérieure (SEAE) qui dresse un état des lieux de la situation en Libye en terme de lutte contre l’immigration, contre les groupes terroristes et contre les trafics (leur fameux triptyque sécuritaire), de sécurisation du territoire et détaille l’ensemble des actions engagées dans ce sens par l’Union européenne. Ce rapport est le résultat de plusieurs missions d’observation dans la suite de la guerre menée entre mars et octobre 2011 par l’Otan, l’Europe et l’Amérique du Nord.

lampedusaLe souhait des dirigeants européens c’est que, dans la continuité des accords passés avec l’ancien dictateur Kadhafi, le nouveau pouvoir en place coopère afin d’empêcher les migrants qui transitent par la Libye d’atteindre les côtes européennes. Au lendemain de la chute de Kadhafi, en août 2011, l’Italie re-signait avec le Conseil National de Transition tous les accords de coopération économique et en terme de lutte contre l’immigration passés avec l’ancien régime. Idem pour la France, qui avec l’Italie étaient les plus fervent défenseur de l’intervention militaire de 2011 (non content de n’avoir plus besoin de traiter avec Kadhafi, dur en affaires (sic)). C’est qu’il y a du fric à se faire : vente d’Airbus et autres merdes et exploitation par la multinationale italienne ENI (Enel) du pétrole libyen. En 2004, Kadhafi et Berlusconi alors président italien, avaient inauguré la mise en service de Greenstream, gazoduc alimentant l’Italie en pétrole libyen, et appartenant à Agip Gas BV, une coentreprise de l’italienne ENI et de la libyenne National Oil Corporation. L’accord diplomatique qui avait entériné cette coopération, prévoyaient également un renforcement de la lutte contre l’immigration, en Libye : surveillance accrue des frontières maritimes et terrestres, ouverture de centres de rétention financées par l’Ue ou l’Italie, etc. Kadhafi savait jouer sur la corde sensible de ses partenaires européens et menaçait régulièrement « d’ouvrir la vanne de l’immigration » afin de se faire satisfaire (en août 2010 il avait exigé 5 milliards d’euros à l’Europe faute de quoi il ne ferait plus barrage aux migrants). (écoutez sur le sujet de l’externalisation des politiques migratoire européenne l’émission Sans papiers ni frontières du 02 novembre 2012)

Jusqu’à aujourd’hui c’est le même processus qui est à l’œuvre. En septembre 2012, le gouvernement libyen a ouvert un nouveau centre de rétention à Tripoli, en lieu et place de l’ancien zoo municipal…Suite au naufrage au large de Lamedusa qui a coûté la vie à plus de 300 personnes, gouvernements italien et libyen se sont retrouvés pour lancer un programme de protection électronique des frontières libyennes et, on l’apprend dans le rapport, l’Italie a alloué au moins 280 millions d’euros à la Libye pour l’année 2012 (achat de matériel, formation à son utilisation, appuie aux gardes côtes, aide au « management » des migrants, etc.). Toujours en 2012, l’Union européenne lâche plus de 110 millions d’euros à la Libye pour sa politique migratoire. Cela s’ajoute aux 89 millions de l’agence européenne de surveillance des frontières Frontex pour la même année et aux 244 millions entre 2014 et 2020 du nouveau système de surveillance électronique Eurosur.

Dans ce même document, le Service Européen pour l’Action Extérieure parle également de la mise en place une nouvelle mission, appelée EUBAM (European Union Border Assistance Mission) qui vient d’être finalisée par les dirigeants européens. Son objectif est toujours le même, renforcer les frontières libyennes. Avec ucaughtn budget de 30,3 millions d’euros annuels, cette mission « opérationnelle » comme ils disent, a pour objectif : identifier les besoins les plus pressants en matière de sécurité frontalière, conseiller aux autorités les équipements a acquérir et les former à leur utilisation et entretien, entraîner des bataillons de policiers, de militaires et de douaniers chargés de la surveillance des frontières, travailler en liaison avec les services de renseignements, améliorer le fonctionnement de la chaîne de commandement (sûrement pour éviter les bourdes qui font que personne ne va intervenir pour repêcher les survivants d’un bateau qui coule en pleine méditerranée car chacun se renvoi la balle), améliorer la coopération avec les pays voisins. Cette mission est basée à Tripoli et a commencé à fonctionner en mai 2013. Elle compte une quarantaine de membres, mais devrait bientôt en compter 111. Sur le territoire libyen elle forme des flics et des douaniers à l’aéroport de Tripoli, assiste les bureaucrates en charge des questions d’immigration, propose des séminaires sur la « gestion intégrée des frontières ». La France apporte sa contribution en formant à l’Institut français de Tripoli des agents des douanes, en formant des pilotes à l’École de l’air de Salon-en-Provence, des officier de marine à Toulon et des officiers à l’École de guerre à Paris. D’autres pays, hors Union européenne participent aussi à EUBAM, comme les États-Unis, la Turquie, la Jordanie, le Qatar et les Émirats arabes unis, en formant des flics et des militaires et en envoyant du matériel, avec en ligne de mire les possibles investissements qu’ils pourront réaliser dans la région.

Le seul hic pour l’EUBAM, c’est que ses membres ont trop peur pour se déplacer dans le pays et restent cantonnés dans la capitale à l’hôtel Corinthia, dans le quartier des affaires. Pour y remédier, la mission a lancé un appel d’offre a des entreprises privées de sécurité. Sont en lice pour l’instant : les britanniques G4S, Control Risks et Hart, les français Arcos, Geos, Amarante, le canadien Garda World ainsi que le chypriote Argus Security.

On aurait pu imaginer qu’avec le processus révolutionnaire en cour pendant l’année 2011, la Libye de l’après Kadhafi refuserait de jouer la coopération. Mais un nouveau pouvoir a été mis en place et comme tout pouvoir, il a besoin de défendre et surveiller son territoire, de développer son économie pour entrer dans le jeu du capitalisme, de gérer et contrôler sa population. La Libye reste une porte d’entrée vers l’Europe pour les migrants, qui depuis des années sont des milliers à mourir dans le cimetière méditerranéen. Heureusement quelques nouvelles parviennent jusqu’ici qui racontent des histoires de révolte et d’insoumission comme cette récente évasion massive du centre de rétention d’al-Hamra.

Les frontières ne disparaîtrons que quand nous serons enfin libre, dans un monde débarrassé de toute autorité, de tout bureaucrate, de tout flic pour nous dire où l’on peut aller et où l’on ne peut pas, qui peut circuler où il veut et qui doit crever là où il est. Ce n’est sans doute pas tout de suite que l’on détruira à coup de hache les barbelés, les caméras thermiques et les drones pour ne plus jamais les voir repousser ; mais dans nos luttes quotidiennes, s’opposer aux rafles, se solidariser avec les révoltés d’un centre de rétention, saboter la machine à expulser… c’est s’attaquer aux frontières, celles qui nous paraissent lointaines et difficiles à atteindre comme celles qui se dressent ici et entre nous, à chaque contrôle, à chaque moment de chacun pour soi.

Contre toutes les frontières, Contre tous les pouvoirs !

[UE] L’Europe nous observe, crevons-lui les yeux !

 L’Europe nous observe, crevons lui les yeux !

Depuis début octobre et les deux naufrages au large de Malte et de Lampedusa qui ont coûté la vie à plusieurs centaines de personnes, l’Union européenne met en avant la nécessité de prendre des mesures pour éviter les naufrages et les noyades de migrant-e-s en Méditerranée. Alors qu’en 2011 au moins 2352 personnes sont mortes dans le silence en tentant la traversée, l’UE instrumentalise ces deux événements pour lancer son tout nouveau programme de surveillance des frontières maritimes, Eurosur, qui sera effectif le 2 décembre 2013.

Ce projet qu’on nous brandit aujourd’hui est en réalité dans les cartons depuis 2008. Il prévoit concrètement de mutualiser les moyens de surveillance des frontières maritimes déjà existants et d’en mettre d’autres à disposition (drones, radars, satellites, …). Les infos récoltées 24 heures sur 24 seront à la fois centralisées et diffusées de manière à ce que chaque pays puisse suivre une situation en temps réel et prendre les mesures qui s’imposent, c’est-à-dire intervenir afin de « réduire le nombre d’immigrants illégaux qui rentrent dans l’Union européenne sans être découverts. »

La Libye a demandé à l’UE un accès à son système satellitaire pour lui permettre de surveiller ses frontières maritimes et terrestres afin de renforcer le travail commun en matière de lutte contre l’immigration clandestine. Même si le feu vert n’a pas encore été donné, il est clair qu’Eurosur s’inscrit dans une logique d’externalisation des frontières de l’Europe, par le biais d’accords renforcés entre les pays européens et les États dits « de départ » et « de transit ». Un processus entamé depuis longtemps, sous le régime de Kadhafi l’UE finançait déjà des centres de rétention en Libye. L’idée est de déléguer le contrôle migratoire à la source.

La militarisation des frontières européennes et la guerre aux migrant-e-s sont déjà en cours depuis les années 90 et se sont accélérées ces dix dernières années.

Ainsi depuis 2004 l’agence européenne Frontex (dirigée par un finlandais ancien garde-côte qui se vante de consacrer sa vie depuis plus de trente ans à la lutte contre l’immigration clandestine, et par un ex-flic espagnol) coordonne la sécurisation des frontières externes de l’espace schengen.

Pour citer un projet récent et complémentaire avec Eurosur, le 1er avril 2013 les eurocrates lançaient Closeye – Collaborative evaLuation Of border Surveillance Technologies in maritime Environment bY pre-operational validation of innovativE solutions -, des essais de surveillance aérienne de la Méditerranée et en particulier du détroit de Gibraltar. Il prévoit l’utilisation de technologies telles que des drones et des satellites dirigeables qui permettront à l’Italie, à l’Espagne et au Portugal d’observer les mouvements en mer 24 heures sur 24, et de réagir au plus vite pour intercepter celles et ceux qui tentent la traversée illégalement, avec la bénédiction du gouvernement marocain. Les essais vont durer plusieurs années, l’objectif : « augmenter la collaboration entre les entreprises privées et les États clients », « adapter l’offre à la demande. » On voit bien que la lutte contre l’immigration est un business florissant pour les sociétés d’armement et de technologies de surveillance qui ont toujours besoin d’une prétendue situation d’urgence avec un ennemi désigné pour pouvoir continuer à prospérer.

Finalement ces naufrages représentent une aubaine pour l’Europe car en plus d’envoyer un message effrayant à d’éventuels candidats de l’autre côté de la Méditerranée, ils permettent de faire passer comme une lettre à la poste des dispositifs ultra-sécuritaires et de propager le mythe de l’ « invasion » : des hordes de migrant-e-s qui envahiraient le territoire, s’insinuant par tous les pores de la frontière qu’il faudrait d’urgence combler. Une représentation propagée complaisamment par les médias de masse, qui nous donnent à voir régulièrement les radeaux pleins à craquer et prêts à couler. En revanche, ce qu’ils oublient volontiers de nous montrer, ce sont les gardes-côtes qui tirent dans les pneumatiques des embarcations de migrant-e-s, les bâtiments de l’otan qui passent à côté de barques en détresse sans leur porter secours, les gens obligés de prendre des chemins plus détournés et donc plus dangereux…. Lors d’un des naufrages médiatisés début octobre, les personnes présentes sur le bateau ont alerté les secours 4h avant de couler mais l’État italien et l’État maltais se sont renvoyés la balle, avec pour conséquence des dizaines de mort-e-s. Le 1er ministre italien a quant à lui proposé de donner la nationalité italienne… aux morte-s au large de Lampedusa. Leur hypocrisie ne suffit pas à masquer les critères requis pour être un « bon » immigré.

Ce qui reste aussi systématiquement dans l’ombre ce sont les files d’attente interminables d’étranger-e-s devant les consulats et les préfectures des États européens. C’est pourtant là que se construit le statut du « clandestin ». Par les listes de documents à présenter, jamais exhaustives. Par les heures passées à poireauter pour se faire recaler à l’accueil. Par les visas non accordés. Par les titres de séjour pas renouvelés. Par l’enfermement en centre de rétention et l’expulsion de celles et ceux qui n’ont pas passé l’épreuve avec succès. Car les « clandestins » ne sont pas une « menace » venue de l’extérieur, mais le résultat d’une volonté politique des États européens, qu’on appelle « politique migratoire », la conséquence d’un contrôle strict des États sur qui a le droit ou non à des papiers.

Parce que, les sans papiers, les États européens en ont bien besoin. Parce que, que ce soit en utilisant les sans papiers comme main d’œuvre corvéable ou en délocalisant les entreprises à l’étranger, la logique est toujours la même : exploiter plus pour gagner plus. Parce qu’avoir un bouc émissaire sur lequel rejeter toutes les merdes intrinsèques au fonctionnement d’un État capitaliste, ça permet aux puissants de se légitimer pendant que les galériens s’entretuent. Parce qu’en agitant les « clandestins » comme un épouvantail, l’Europe justifie des projets flippant de militarisation de ses frontières et de contrôle des personnes à l’intérieur de son territoire.

Plus insidieusement, ces dispositifs de surveillance entraînent concrètement l’augmentation du contrôle sur toutes et tous. Ils sont expérimentés ici en Méditerranée, mais il y a fort à parier qu’ils finiront par envahir non seulement les mers mais aussi les rues et nos vies dans la droite lignée des caméras de vidéo-surveillance ou du fichage adn.

Ni frontières, ni papiers, soyons incontrôlables !

 

Organismes participants à Eurosur

ITALIA CONSORZIO NAZIONALE INTERUNIVERSITARIO PER LE TELECOMUNICAZIONI
FRANCE SAGEM DEFENSE SECURITE
NEDERLAND NEDERLANDSE ORGANISATIE VOOR TOEGEPAST NATUURWETENSCHAPPELIJK ONDERZOEK - TNO
ESPAÑA INDRA ESPACIO SA
UNITED KINGDOM UNIVERSITY OF PORTSMOUTH HIGHER EDUCATION CORPORATION
ITALIA ALENIA AERONAUTICA SPA
ITALIA THALES ALENIA SPACE ITALIA SPA
PORTUGAL EDISOFT-EMPRESA DE SERVICOS E DESENVOLVIMENTO DE SOFTWARE SA
FRANCE MONDECA SA
ITALIA TELESPAZIO SPA
FRANCE THALES COMMUNICATIONS & SECURITY SA
ESPAÑA TTI NORTE, S.L.
BELGIQUE-BELGIË SPACE APPLICATIONS SERVICES NV
FRANCE THALES ALENIA SPACE FRANCE
UNITED KINGDOM UNIVERSITY COLLEGE LONDON
SVERIGE TOTALFORSVARETS FORSKNINGSINSTITUT
DEUTSCHLAND THALES DEFENCE DEUTSCHLAND GMBH
ESPAÑA EUROCOPTER ESPANA SA
ESPAÑA INDRA SISTEMAS S.A.
ISRAEL CORRELATION SYSTEMS LTD
FRANCE CASSIDIAN SAS
FRANCE THALES SYSTEMES AEROPORTES S.A.
BELGIQUE-BELGIË JRC -JOINT RESEARCH CENTRE- EUROPEAN COMMISSION
ESPAÑA UNIVERSIDAD DE MURCIA
UNITED KINGDOM BAE SYSTEMS (OPERATIONS) LTD
NEDERLAND HITT HOLLAND INSTITUTE OF TRAFFIC TECHNOLOGY BV

Organismes participants à Closeye

ESPAGNE Guardia civil
PORTUGAL Guardia Nacional Republicana
ESPAGNE Ingenieria de Sistemas para la Defensa de España
ITALIE Agencia Spaziale Italiana
UE European Union Satellite Centre
ITALIE Marina Militare Italiana
ITALIE Centro Italiano Ricerche Aerospaziali
UE Frontex (rôle consultatif)
AUTRICHE Schiebel
ETATS-UNIS General Atomics AeronauticalSystems

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[Partout] Le marché juteux de la surveillance des frontières – 18 novembre 2013

Contrairement à nos habitude, nous reprenons ci-dessous un article de presse du journal algérien « El Watan ». Parce que nous pensons que les mass médias sont un outil au service des dominants, nous n’aimons pas reprendre la presse sans reformuler. Ici l’article nous semble intéressant pour ce qu’il expose et par le point de vue que la journaliste prend.

Le marché juteux de la surveillance des frontières

Le drame des migrants clandestins, au-delà du drame humain qu’il charrie, dévoile une face cachée des plus sordides. Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, de grands colosses de l’armement et de biens de sécurité aiguisent leurs appétits pour en tirer le maximum de profit par de juteuses affaires. Chacun y va de sa dernière trouvaille pour vendre des systèmes de protection et de surveillance des frontières dans une Europe plus que jamais véritable forteresse. Eurosur, Milipol, Frontex. De quoi s’agit-il au juste ? Eurosur est le nouveau système de surveillance des frontières de l’Union européenne (UE), adopté le 22 octobre dernier. Ce système qui a pour objectif de renforcer les contrôles aux frontières extérieures, terrestres et maritimes de l’espace Schengen, est appelé à entrer en vigueur en décembre prochain.

D’autres mesures qui devraient initialement l’accompagner ont été, quant à elles, différées par Bruxelles à juin 2014. Milipol est le salon mondial de la sécurité intérieure des États, organisé tous les deux ans, qui ouvre ses portes à Paris à partir de demain (mardi 19) jusqu’au 22 novembre, soit 4 jours de rencontres, de découvertes et de débats autour de la sécurité publique dans le monde. Frontex est le «fer de lance» et «l’instrument emblématique de la politique de contrôle des frontières de l’UE et des pays qui lui sont associés dans ce domaine, comme la confédération helvétique». Le migrant clandestin, quant à lui, est cet ennemi juré que l’Europe s’est inventé. Il constitue une menace contre laquelle une véritable guerre est lancée.

Des Drones anti-migrants

En réponse aux deux récentes tragédies en mer survenues sur les côtes de l’île de Lampedusa, ayant coûté la vie à près de 400 personnes, l’UE a donné son feu vert pour le déploiement de l’Eurosur. Frontex qui est appelée à jouer un rôle très significatif dans la supervision de ce dernier, est l’un des habitués du salon parisien Milipol. D’autant que, remise au-devant de l’actualité, drames de Lampedusa obligent, la mise en œuvre du système Eurosur qui prévoit l’acquisition de drones de surveillance les mieux appropriés et les plus efficaces pour repérer et poursuivre les migrants clandestins, serait effective d’ici peu.

A ce titre, a indiqué une source italienne de Migreurop, Milipol pourrait être pour Frontex l’occasion propice de renouer les contacts, entamés en 2011, avec d’illustres hôtes, des leaders mondiaux de l’armement et de biens de sécurité, à qui s’offrira également l’auguste opportunité pour exposer leur nouvel arsenal et mettre en avant leurs dernières innovations en matière de développements technologiques, indiquent nos sources. D’autant que «l’Agence est connue pour avoir invité des fabricants de drones américains et israéliens à faire une présentation de leurs marchandises devant son staff. Le ministère américain du Commerce a d’ailleurs recommandé aux producteurs d’armes du pays de garder un œil sur le Frontex, car il pourrait offrir des opportunités d’exportation pour les Etats-Unis», assure, dans nombre de ses écrits, l’Irlandais David Cronin, écrivain expert de Frontex et des questions migratoires.

Et, celui sur qui pourront compter les futurs partenaires pour leur faciliter la conclusion du «marché» des drones anti-migrants, israéliens et américains surtout, n’est autre qu’Ilkka Laitenen. Ce général de brigade finlandais, qui dirige l’Agence depuis sa création en 2005, siège au comité consultatif pour l’Agenda de la Défense et de la Sécurité (ADS), un groupe de réflexion vivant de financements de l’industrie de l’armement, toujours selon David Cronin. «Laitenen et son staff entretiennent également des contacts réguliers avec l’Agence Européenne de Défense, un organe mis en place afin d’attirer et de développer des affaires pour les fabricants d’armes du continent», apprenait-il.

Ces drones traqueurs de migrants viendront renforcer les capacités logistiques d’intervention dont dispose Frontex et déjà déployées, à savoir 26 hélicoptères, 22 avions, 114 navires et 477 appareils techniques entre radars mobiles, caméras thermiques, sondes mesurant le taux de gaz carbonique émis et détecteurs de battements de cœur… A cela, il faut ajouter la révision à la hausse des moyens financiers dont devrait bénéficier l’agence en 2014, décidée par Bruxelles lors du sommet européen du 24-25 octobre dernier autour des migrations clandestines tenue à la suite des drames de Lampedusa.

Frontex : un budget de 89 millions d’euros en 2012

Pour rappel, de 6 millions en 2005, 19 millions une année après, le budget de Frontex est passé à 118 millions d’euros en 2011. Et, même s’il a baissé en 2012 (89 millions d’euros), elle demeure l’agence opérationnelle la plus financée de l’UE. Cette Europe et son bras armé qui ont fait du cimetière marin de Lampedusa un fonds de commerce où se sucrent allègrement les fabricants d’armements et d’équipements de sécurité. «Étant propriétaires ou actionnaires majoritaires de grands médias européens, les marchands d’armes concourent indirectement à fabriquer une opinion favorable à l’approche, de plus en plus militarisée, envers les questions des migrations irrégulières adoptée par l’UE», assure Mounira Haddad, présidente de AFAD, une association très active dans le domaine de défense des droits des migrants et réfugiés.

«La création d’un ennemi étant indispensable pour justifier les dépenses militaro-sécuritaires, il s’agit de se défendre de la menace migratoire généralisée, cet ennemi sans visage vient brouiller les limites entre Défense et sécurité. Et l’émotion face à l’image macabre des victimes des deux derniers naufrages, mises en scène par les médias européens, fait accepter la nouvelle guerre à l’immigration clandestines, dites humanitaires», s’offusque un membre de l’Association mauritanienne de lutte contre l’immigration illégale (AMLII).

Ces imbrications des enjeux découlant de la lutte contre les migrations illégales, nombre d’experts militant au sein d’ONG internationales pour la cause des migrants, réfugiés et demandeurs d’asile, les ont maintes fois dénoncés. C’est le cas, par exemple, de Claire Rodier, membre du Groupe d’information et de soutien des immigrés (GISTI, Paris) et cofondatrice du réseau euro-africain Migreurop, lorsqu’elle fait référence à la participation régulière de Frontex aux rencontres, foires et salons où les professionnels de l’armement exposent leur matériel.
Ou lorsqu’elle parle de Laitenen, «général» directeur de l’agence européenne qui ne rate aucun colloque, forum et séminaire où se rassemblent militaires et policiers, industriels, représentants des ministères concernés et des institutions européennes.

En somme, «des enceintes où se tissent les liens entre les bailleurs de fonds et les entreprises, Frontex occupe une place stratégique : financée par les premiers, elle est courtisée par les seconds qui ont tout intérêt à son développement et à son autonomisation», écrivait-elle. Aux yeux de la juriste qui a dédié un volumineux ouvrage à ce croisement d’intérêts, intitulé Xénophobie Business et où elle s’interroge «A quoi servent les contrôles migratoires ?», l’agence européenne de gestion des frontières extérieures s’est avérée être doublement utile : d’abord en tant qu’«acheteur, puisqu’elle dispose d’un budget propre à cette fin.

En organisant, à la fin de l’année 2011, des démonstrations en vol des drones dont elle a l’intention de s’équiper pour mieux lutter contre l’immigration irrégulière, l’Agence a  ainsi donné un coup de pouce prometteur au marché européen du véhicule aérien sans pilote». Frontex est aussi également une «irremplaçable courroie de transmission, en mettant en relation les industriels en quête de financement pour la recherche et la réalisation du matériel de surveillance, qu’elle pratique de longue date, avec les décideurs institutionnels», conclura-t-elle. Une situation envers laquelle l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) basée à Genève, reste de marbre. Derrière ce silence assourdissant, se tapisseraient, peut-être, d’autres enjeux que seule cette Organisation, censée être l’un des garants des droits des migrants dans le monde, en sait quelque chose. Contactés par nos soins, les responsables de l’OIM n’ont pas jugé utile de se prononcer sur le sujet.

Naima Benouaret

 

Traque du migrant clandestin : mode d’emploi

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le 18.11.13
Depuis son apparition et le déploiement des troupes en uniformes ornés d’écussons étoilés – comme ceux de l’UE – sur le champ de bataille de la guerre «juste» contre les migrants et les requérants d’asile, Frontex ne cesse de gagner en reconnaissance.
Très utile s’est-elle avérée être, eu égard au rôle capital qui lui échoit désormais pour la commercialisation des équipements de sécurité dont plusieurs fabricants, notamment israéliens se disputent le marché dans le domaine de la surveillance des frontières. En témoignent quatre autres projets de nouveaux systèmes anti-migrations clandestine sont actuellement entre les mains de chercheurs spécialisés dans ce type de technologies de pointe. Il s’agit des systèmes Operamar, Wima, Effisec et Talos, indiquent des sources bien informées. Le premier consiste à créer des «fondations d’une capacité paneuropéenne en matière de sécurité maritime», précise-t-on.
Le Wima suggère, quant à lui, de multiplier l’usage des drones pour une surveillance plus efficace des côtes européennes. L’immigration clandestine et le trafic d’êtres humains sur les mers sont les deux exigences auxquelles doit répondre le Wima. D’où le nom de «systèmes des systèmes» retenu par ses concepteurs prévoient. En vue d’un renforcement plus accru des capacités en termes de contrôle et de surveillance des postes frontières (terrestres, aériens et maritimes), l’UE a, en outre, affecté une enveloppe conséquente pour la mise au point du nouveau dispositif Effisec. Celui-ci porte, pour sa part, sur l’intégration d’une série de technologies existantes et complémentaires (biométrie, documents électroniques, reconnaissance des signaux, analyses visuelles, détection de substances). La vidéosurveillance fait partie des pistes envisagées, ajoutent nos sources, indignées par le fait de «considérer les migrants comme des produits de contrebande».
Car, précisent-elles, détecter l’immigration illégale et les produits illicites est la finalité du système Effisec. Le Talos, est, aux yeux de nos interlocuteurs, le système qui traduit au mieux «le fantasme de frontière virtuelle». Et le concept, comment s’applique-t- il ? La patrouille autonome de surveillance des frontières entend utiliser des robots et des drones pour repérer à distance les immigrés clandestins et les interpeller avant qu’ils ne parviennent à s’évaporer dans la nature, a-t-on expliqué.
Autrement dit, des systèmes mobiles, modulaires et adaptables à toutes les situations. Le chef de projet Talos, soulignent nos sources, est une société polonaise de robots démineurs catégorie (PIAP), d’origine militaire. Son rêve étant de «cloner» ses engins IBIS, équipés de caméras thermiques et capables de tirer des projectiles en tous genres pour traquer les aspirants à l’immigration. «Ce beau bébé, un robot de combat et pas seulement d’observation, a d’ailleurs remporté la médaille d’argent au concours Eureka 2008, remis en novembre de la même année par les huiles de la Commission européenne», ont tenu à rappeler les mêmes sources qui ont requis l’anonymat.
Aussi, le robot IBIS sera doté de capacités lui permettant d’embarquer des armes dites à «énergie dirigée», mot savant pour désigner les canons à ultrasons, ajoutent nos sources. Et pour assurer le volet aérien de Talos, il a été fait appel aux compétences de la compagnie Israël Aircraft Industries, un des leaders mondiaux des drones de surveillance et d’attaque. Sa spécialité : détecter, localiser, cibler des terroristes, des trafiquants, des immigrés illégaux ou d’autres menaces sur la sécurité publique, 24h/24, même en cas de mauvaise météo et de faible visibilité. «On imagine bien où tout ce bel arsenal israélien a été testé grandeur nature», ironisent nos sources.
Naima Benouaret